Dial. ii. — A. Vous ne voyez plus M… ?
B. Non, il n’est plus possible.
A. Comment ?
B. Je l’ai vu, tant qu’il n’était que de mauvaises mœurs, mais depuis qu’il est de mauvaise compagnie, il n’y a pas moyen.
Dialogue ier. — A. Comment avez-vous fait pour n’être plus sensible ?
B. Cela s’est fait par degrés.
A. Comment ?
B. Dieu m’a fait la grâce de n’être plus aimable ; je m’en suis aperçu, et le reste a été tout seul.
FABLE V.
Cette fable du loup et du chien est parfaite d’un bout à l’autre ; il n’y a à critiquer que l’avant-dernier vers.
Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.
Un loup n’a que faire d’un trésor.
FABLE IV.
V. 5. Relevé. Mauvaise rime qu’on appelle suffisante ; La Fontaine pouvait mettre d’un pas dégagé.
V. 6. Et faisait sonner sa sonnette.
Est un vers heureux et d’harmonie imitative, qui s’est trouvé sous la plume de l’auteur.
La Fontaine ne manque pas, du moins autant qu’il le peut, l’occasion de mettre la morale de son Apologue dans la bouche d’un de ses acteurs. Cette fable des deux Mulets est d’une application bien fréquente.
V. 2. Celui-ci, glorieux d’une charge si belle,
N’eût voulu pour beaucoup en être soulagé.
Ce mulet-là fait songer à bien d’honnêtes gens.
FABLE III.
Cette petite fable est charmante par la vérité de la peinture, pour le dialogue des deux grenouilles, et pour l’expression élégante qui s’y trouve.
Plusieurs gens de goût blâment La Fontaine d’avoir mis la morale, ou à la fin, ou au commencement de chaque fable ; chaque fable, disent-ils, contient sa morale dans elle-même : sévérité qui nous aurait fait perdre bien des vers charmans.
FABLE II.
C’est ici qu’on commence à trouver La Fontaine. Le discours du renard n’a que cinq vers, et n’en est pas moins un chef-d’œuvre. Monsieur du corbeau, pour entrer en matière ; et à la fin, vous êtes le phénix, etc.
V. 14. Il est plaisant de mettre la morale dans la bouche de celui qui profite de la sottise : c’est le renard qui donne la leçon à celui qu’il a dupé, ce qui rend cette petite scène, en quelque sorte, théâtrale et comique.
Il est fâcheux que Monsieur rime avec Flatteur, c’est-à-dire ne rime pas ; mais c’était l’usage alors de prononcer l’r de monsieur. On tolère même de nos jours cette petite négligence au théâtre, parce qu’elle est moins remarquable.
FABLE I.
Cette fable est une des plus faibles de La Fontaine. Elle n’est très-citée que parce qu’elle est la première. La fourmi qui paiera l’intérêt et le principal. Je chantais, eh bien ! dansez maintenant. La brièveté la plus concise vaudrait mieux que ces prétendus ornemens.
V. 15. La fourmi n’est pas prêteuse ;
C’est là son moindre défaut.
Il y a là une équivoque, on plutôt une vraie faute. La Fontaine veut dire que d’être prêteuse est son moindre défaut, pour faire entendre qu’elle ne l’est pas ; et on peut croire qu’il dit que de n’être pas prêteuse est son moindre défaut, c’est-à-dire qu’elle a de bien plus grands défauts que de ne pas prêter.
CHAMFORT / Maximes et Pensées, Caractères et Anecdotes / Garnier-Flammarion 1968
« Le grand malheur des passions n’est pas dans les tourments qu’elles causent, mais dans les fautes, dans les
turpitudes qu’elles font commettre, et qui dégradent l’homme. Sans ces inconvénients, elles auraient trop
d’avantages sur la froide raison, qui ne rend point heureux. Les passions font vivre l’homme, la sagesse le
fait seulement durer. »
< 118 p.76 >