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Critiques de Sofia Aouine (168)
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Rhapsodie des oubliés

Dans un premier temps, Sofia Aouine plante le décor et décrit l'ambiance dans laquellevit Abad, ce jeune adolescent de 13 ans, exilé du Liban il y a seulement trois ans, mais qui a "déjà l'impression d'avoir vieilli de dix piges", rien qu'en se posant sur le banc du square Léon. Il vit avec ses parents dans le quartier de Barbès, La Goutte d'Or, à Paris XVIIIe et sa rue est la rue Léon.

C'est lui qui est le narrateur, un narrateur philosophe, inoubliable.

À cause de bêtises commises avec sa bande des "Apaches du dimanche", il sera considéré comme primo-délinquant et sera astreint par les services sociaux à des séances chez une psychologue qui va, comme il le dit si bien "l'ouvrir dedans". Elle s'appelle Ethel Futterman. Très rétif au départ, il ne dit mot, et lorsque la psychologue change de méthode lui disant : "Pose-moi des questions, si tu ne veux pas répondre aux miennes", il va tout lâcher et elle aussi lui racontera sa vie, et quelle vie ! Il va comprendre alors que chaque être porte un passé, souvent très lourd à assumer.

Tout en décrivant le quotidien du quartier populaire de Barbès, avec toute sa diversité, ceci, de manière remarquable, l'auteure nous brosse une série de portraits réalistes, avec une verve acide et à la fois tendre et émouvante. Elle explique aussi comment certains jeunes du collège, des potes à Abad, peuvent très vite se convertir au djihad sans que personne n'ait rien vu venir. le conflit des générations pèse également dans ces vies difficiles.

Difficile en tout cas, de ne pas être émue par Odette, cette voisine amoureuse de la musique depuis toujours, par la vie brisée de Gervaise, cette prostituée africaine si belle, venue pour sauver sa fille Nana, ou par ce jeune moldave arrivé en cours d'année au collège. Que dire de cette fille d'en face dont Abad était tombé amoureux en voyant son visage entre toutes les fenêtres : "Elle se devait de rester invisible sous le tissu noir qu'on lui avait imposé quand elle était devenue une femme."

Rhapsodie des oubliés est un titre bien choisi et on ne peut plus explicite.

J'ai beaucoup apprécié la beauté des mots et la justesse de ton avec laquelle l'écrivaine a décrit la vie de ces femmes, leurs joies, leurs souffrances surtout, mais aussi leur combat pour survivre.

Avec ce premier roman, Sofia Aouine réussit un livre très maîtrisé qui rend compte à la fois de cette période délicate de l'adolescence, des difficultés rencontrées par un jeune enfant pour s'épanouir, dans un contexte aussi violent - un des chapitres s'intitule d'ailleurs : Ceux qui n'auront pas d'enfance - mais également de la vie pleine de bruits, de couleurs, d'odeurs et malheureusement de noirceur de ces quartiers où vivent nombre d'oubliés. Il serait peut-être temps d'ouvrir les yeux et de partager !

Le Prix de Flore a récompensé en 2019, de façon très méritée, ce superbe roman éblouissant et bouleversant, à l'écriture jeune et alerte.

Si j'ai pu découvrir ce roman, c'est grâce à Yaena, une amie babéliote, que je remercie ici, qui en a fait une superbe critique et m'a vraiment donnée envie de le lire !


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Rhapsodie des oubliés

Abad, treize ans, habite rue Léon, à Barbès. Depuis qu’il a fui le Liban avec ses parents, sa vie s’est mise à tourner de travers. Entre les coups de son père, détruit par l’exil et l’humiliation de ses abrutissantes conditions de vie parisienne, et le silence dans lequel s’est retranchée sa mère, l’adolescent s’est laissé happer par la rue. Dérivant de bêtise en bêtise jusqu’aux marges de la délinquance, en tout cas rapidement assimilé « malfaisant », il raconte son existence : la jungle qu’est l’école, la rue qui remplace sa famille, la vie de son quartier et de ses laissés-pour compte, comme Gervaise la prostituée au destin tragique, Odette la vieille dame abandonnée à l’hospice, ou Batman la jeune fille séquestrée par son frère salafiste…





La langue de ce monologue coloré et rythmé est celle d’un gamin des cités : argotique, crue, pas toujours totalement compréhensible, encombrée des obsessions sexuelles de l’adolescent, elle donne au récit des accents d’authenticité et maquille d’une fausse naïveté le regard tout en acuité de l’auteur sur la vie des quartiers dits sensibles.





Avec beaucoup de tendresse, mais aussi de virulence, Sofia Aouine nous fait entendre une sorte de complainte des oubliés de notre société. Appelant à la lumière les fractures qui séparent plusieurs générations de personnages littéralement dévorés par leur environnement et leurs malheurs, elle dénonce le terreau que représentent l'isolement et le désespoir pour les engrenages violents en tout genre : délinquance, drogue, prostitution, sectarisme…





Malgré quelques réticences, liées au découpage très marqué entre les histoires, quasi juxtaposées, de chaque personnage, à l’absence d’une véritable conclusion et à la présence de quelques clichés, j’ai été globalement emportée par ce récit dérangeant et plutôt poignant, à la fois tendre et rageur, aux personnages attachants et crédibles, et où l'on devine parfois une résonance toute personnelle avec certains éléments de la biographie de l'auteur.


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Rhapsodie des oubliés

Habituée à ne lire pratiquement que des romans historiques, j'apprécie de sortir de temps en temps de ma zone de confort et de me confronter à des oeuvres vers lesquelles je ne me tournerais pas naturellement. Et les premiers romans attirent toujours mon attention, car il y souffle bien souvent un vent nouveau...



« Rhapsodie des oubliés » est justement un premier roman. Son autrice, Sofia Aouine, est née en 1978 dans les Hauts-de-Seine au sein d'une famille d'origine kabyle. En raison d'un contexte familial compliqué, Sofia est confiée dans un premier temps à sa grand-mère qui vit en Kabylie, puis, de retour en France, elle est placée en pouponnière puis dans différentes familles d'accueil. Elle est aujourd'hui reporter radio.



Fidèle à sa vocation professionnelle qui est d'enquêter et de transmettre des histoires, Sofia Aouine nous invite dans ce roman à suivre le quotidien d'Abad, un adolescent d'origine libanaise de 13 ans qui vit dans ce quartier de sinistre réputation qu'est la Goutte d'Or, au coeur du XVIIIe arrondissement de Paris. Ce sujet – la vie d'un adolescent dans un quartier sensible – a été maintes fois exploré sous forme romancée mais hélas souvent de façon caricaturale ou artificielle. Ce roman sera-t-il celui qui nous présentera enfin la vie réelle d'un adolescent d'un quartier difficile et de ses habitants ?





UN HÉROS BRUT DE DÉCOFFRAGE MAIS ATTENDRISSANT

En choisissant Abad, le personnage principal de ce roman, comme narrateur, Sofia Aouine nous met immédiatement dans le bain : hors de question pour elle d'observer de loin les événements, elle nous fait entrer de plain-pied dans l'univers de ce jeune garçon et nous fait partager ses pensées et ses sentiments. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de comprendre les émotions et les réflexions d'un adolescent, mais ce n'est pas toujours évident ! Ici, l'autrice parvient à entrer dans la peau d'un jeune garçon de 13 ans avec une aisance vraiment déconcertante : langage, attitudes, réactions, tout sonne vrai, pas une seule fausse note ! Alors, parfois, oui, certains passages m'ont heurtée en raison du langage très cru employé, mais il est utilisé à bon escient et surtout pas pour « faire genre » ou pour choquer car c'est un langage vrai. Mais ce dernier sait aussi se montrer drôle et inventif quand Abad nous présente les « pseudos-imams façon 2.0 » comme des Barbapapas, les femmes en jilbab comme des Batmans et sa psychologue comme la « dame de l'ouvrir dedans » – d'ailleurs les descriptions des séances chez la psychologue sont hilarantes !



Abad habite rue Léon, en plein coeur du quartier de la Goutte d'Or. Une mère discrète et silencieuse, un père peu présent, qui se ruine la santé au travail, tout cela pour un salaire dérisoire. Un père taiseux et parfois violent, qui montre les poings quand Abad commet des bêtises.

Mais un jour, son père est victime d'un accident sur son lieu de travail. Devenu en partie invalide, il tente pourtant de trouver un nouvel emploi, mais en vain. Se sentant humilié, il quitte le domicile familial du jour au lendemain, pour toujours, et Abad devient l'homme de la famille. Mais Abad ne veut pas finir comme son père, il rêve d'un avenir meilleur, loin de ce quartier laid, étouffant et douloureux – même les murs pleurent d'après Abad –, gangrené par les trafics en tout genre, la prostitution, la misère, la violence et la radicalisation religieuse. Terriblement lucide, ce jeune garçon jette un regard sans concession sur le monde qui l'entoure et nous fait découvrir ce quartier dont on ne parle pas ou bien en mal dans les médias.

Pour survivre dans un tel environnement, il vaut mieux avoir une solide carapace et Abad a réussi à s'en construire une, comme ses copains. Ici, impossible de laisser transparaître la moindre faiblesse ou bien le moindre sentiment, sinon tu es fichu.



Mais derrière ce langage cru et ces réflexions désabusées se cache en réalité un garçon futé, sensible, attentif aux autres, un garçon qui a soif de liberté et d'amour. Et c'est cet espoir en un avenir meilleur et ce besoin de liberté et d'amour qui vont conduire Abad à commettre malgré lui quelques bêtises… Son parcours semé d'embûches, d'une réalité troublante, est d'autant plus poignant qu'à plusieurs reprises on sent bien qu'Abad est sur le fil du rasoir et on aimerait le guider, le rassurer, l'encourager car c'est un garçon de bonne volonté, qui veut s'en sortir, mais on reste impuissants, spectateurs, lecteurs...

En parlant d'amour, Abad est en effet à l'âge des premiers émois amoureux et il semble vraiment très préoccupé par la question, c'est le moins que l'on puisse dire… L'accent mis en particulier sur ce point m'a un peu gênée ayant davantage l'habitude d'entendre à cet âge-là que « les filles sont bêtes » (pour rester polie). Et Abad n'y va pas par quatre chemins pour nous raconter son éveil à la sexualité, toujours avec son langage direct et inventif (avec lui, la masturbation devient la bagnette). Mais c'est avec beaucoup d'émotion qu'il nous parle de cette Batman qu'il observe depuis sa fenêtre et dont il est tombé amoureux. C'est cette silhouette féminine qui va être l'un des éléments déclencheurs lui permettant de se libérer petit à petit de sa carapace…





UN ENTOURAGE FAMILIAL DÉFAILLANT MAIS DES FEMMES PORTEUSES D'ESPOIR...

Car c'est bien grâce aux femmes qu'Abad va parvenir à s'élever et à se libérer, non pas par sa mère, une femme silencieuse, discrète, restée trop longtemps soumise et qui ne comprend plus son fils, si désespérée qu'elle laisse l'Aide sociale à l'enfance le placer en famille d'accueil, l'éloignant tout de même enfin de la rue Léon et de ce quartier. Non, il s'agit de quelques belles rencontres, inopinées, qui seront comme autant de mains tendues.

Ces femmes vont jouer un rôle essentiel dans la vie d'Abad puisqu'elles vont, chacune à leur manière, intervenir à un moment crucial de la vie du jeune garçon sans qu'il s'en rende compte et fissurer sa carapace, pour l'aider à trouver sa voie et à prendre son envol.

Il y a la Batman, dont il tombe éperdument amoureux ; Odette, la vieille voisine qui lui donne le goût de la lecture et de la musique ; Ethel Futterman, sa psychologue ; Gervaise, une prostituée africaine qui espère rejoindre un jour sa fille Nana restée au Cameroun. Malheureusement certains de ces personnages vont disparaître au cours du roman et donc de la vie d'Abad, mais le souvenir de ces femmes restera toujours gravé dans un coin de sa tête. Car derrière ces fortes personnalités se cachent des drames effroyables, des souffrances indicibles, et je regrette un peu que les histoires de ces personnages n'aient pas été davantage développées, même si cela aurait dilué le récit et peut-être fini par perdre le lecteur.

Évidemment chacun pourra reconnaître derrière ces personnages des références à des oeuvres littéraires ou cinématographiques, la plus évidente étant celle au film « Les Quatre Cents Coups » de François Truffaut, dans lequel Antoine Doinel, un jeune garçon turbulent finit dans un centre pour délinquants dont il s'échappe pour aller voir la mer… Comme Antoine, Abad se sent emprisonné dans un système social dans lequel il ne se reconnaît pas et qu'il tente de fuir pour de trouver sa place dans la société. On pensera aussi à l'oeuvre naturaliste d'Émile Zola avec Gervaise Macquart (« L'Assommoir ») et sa fille Anna Coupeau dite Nana (« Nana ») que l'on retrouve dans les personnages de Gervaise, la prostituée, dont la fille, Nana, est en Afrique. Et comment ne pas évoquer Momo et Madame Rosa, les deux personnages de « La Vie devant soi » de Romain Gary ?





UN STYLE DÉTONNANT, PERCUTANT ET PUISSANT !

Mais c'est dans l'écriture que réside le véritable tout de force de ce roman ! Dès les premières lignes, les mots m'ont littéralement sauté au visage, comme autant d'uppercuts, à un rythme saccadé, comme un débit de mitraillette, entrecoupé d'accalmies. Langage cru, phrases longues, phrase courtes, énumérations, répétitions, jeux avec la ponctuation, dialogues, descriptions… Tous ces mots, toutes ces phrases créent par là même un rythme très particulier évoquant différentes sonorités musicales, que l'on retrouve dans la playlist proposée en fin d'ouvrage.

Il est impossible de rester indifférent face à une telle écriture ! On pourra aimer, on pourra détester, mais force est de remarquer que l'autrice fait preuve d'une grande maîtrise puisque cette rage et cette souffrance ne se retournent pas contre le lecteur, bien au contraire. Non, l'autrice a si parfaitement bien dosé sa plume que chaque mot, chaque phrase nous interpellent, comme si nous étions sur un ring, lors d'un entraînement, face à une boxeuse dont les coups ne sont pas portés.



Pourtant ce style musclé et direct laisse parfois la place à des moments d'écriture plus doux et plus sensibles, lorsque l'autrice aborde l'histoire de ces femmes. J'ai été particulièrement touchée par celle d'Ethel Futterman qui pourrait faire l'objet un roman à elle toute seule, mais aussi par celle d'Odette. Tout en modulant son style qui s'adapte à ses personnages, tantôt cru et mordant, tantôt poétique et lumineux, Sofia Aouine parvient à maintenir tout au long de son récit un rythme sans faille et cette musicalité qui, elle aussi, évolue en fonction des personnages.



Comme François Truffaut qui s'est affranchi en son temps des carcans de l'époque avec notamment sa caméra au poing, Sofia Aouine, stylo au poing, par sa liberté de ton, sa langue inventive et son écriture musicale, donne la voix à travers un jeune adolescent à toute une population oubliée et en dresse un portrait bouleversant, empreint d'humanité et de tendresse.
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Rhapsodie des oubliés

Il est bien bavard, le jeune narrateur qui traine ses savates dans les rues de la Goutte d’or, où il apprend les codes, ceux des adultes, ceux des junkies, ceux des pseudo-imams qui tentent sous couvert d’une religion qu’ils ignorent, d’imposer leur loi, celle qui voile les femmes dans le seul but de les réserver à leur consommation personnelle . Il est bavard et l’on se fait porté par cette mélodie aux accents de rap et ce lexique parfois un peu trop typé pour être totalement compréhensible. Et puis au fur et mesure de la lecture, on se lasse, car la forme cache le fond, et on a l’impression de tourner en rond, malgré un récit court.



Les entrevues avec la « dame d'ouvrir dedans » comme il nomme la psy qui est chargée de sortir cet ado de la mutité dans laquelle il s’est enfermé, et qui contraste fort avec tout ce qu’il nous livre, sont une respiration dans ce récit logorrhéique .





La plume est audacieuse et exubérante, il reste à l’auteur de faire ses preuves dans d’autres registres . La rhapsodie est une composition libre dans le style et la forme, souvent en rapport avec des thèmes régionaux ou folkloriques. L’auteur pourra t-elle nous proposer une symphonie?


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Rhapsodie des oubliés

La famille d'Abad a fuit le Liban et tente de se construire une vie dans le quartier de la Goutte d'or à Paris. C'est là qu'Abad traîne ses baskets sur le bitume couleur désespoir de la rue Léon. Rue Léon… c'est pas une rue ! C'est la cour des miracles ! Elle est peuplée d'oubliés et de petites gens qui vivotent. A croire qu'on les a tous stockés au même endroit. Comme pour ne pas gêner les bourgeois avec la misère… Des personnages meurtris par la vie, malmenés, fatigués et pourtant salvateurs pour Abad. Des bouées de sauvetage qui lui permettront de se construire, de ne pas sombrer et de continuer à croire que la vie ce n'est pas que la misère. Les oubliés d'Abad, c'est une bande d'estropiés qui s'appuient les uns sur les autres dans l'espoir de continuer à avancer.

Il y a Gervaise, la pute Camerounaise, belle à se damner et qui s'accroche à son rêve d'une vie simple et rangée. Et puis « pute » c'est pas une insulte ! « Les putes aussi c'est des mères » alors Abad il s'en fout bien de savoir comment elle gagne sa vie Gervaise. Il l'aime parce qu'elle est belle. Surtout son coeur. Il y a aussi Odette, la vieille d'à côté, qu'Abad aime comme sa grand-mère, même quand elle attrape « la maladie qui sonne comme un gros mot craché par un allemand en colère ». Odette c'est les livres, la musique, les vieux films et les tartes aux pommes. Elle est vieille mais pas comme la dame d'ouvrir dedans, la psy qu'Abad est obligé de voir et qui ressemble à Schreck. Avec elle c'est compliqué, c'est un peu je t'aime moi non plus mais finalement Abad l'aime bien, même s'il lui en veut de le faire parler de ces choses qui lui font mal. Mais il lui pardonne parce qu'elle aussi elle en trimballe des casseroles, même si maintenant elle vit dans les quartiers chics.

Et puis à 13 ans on a des potes. Pour Abad ce sont les 4 fantastiques dont la principale occupation sont les « nichons Yougo » et autres conneries du même genre qui leur attireront bien des ennuis.



Sofia Aouine nous parle de ces invisibles sans misérabilisme, et sans fard dans une langue crue et rythmée pleine de gros mots et sans aucun égard pour le politiquement correcte. Condition féminine, sexe, religion, misère sociale… elle se saisit des sujets qui fâchent avec un humour grinçant et sous couvert de la franchise d'un gosse de 13 ans en pleine rébellion.



Certains peuvent être choqués par le vocabulaire d'Abad, personnellement je trouve que ce parti pris de l'auteur rend son personnage crédible. Employer un autre langage ç'aurait été travestir Abad. Dans la rue Léon un langage soutenu serait tombé comme un cheveu sur la soupe et puisque c'est Abad qui raconte et qu'il vit rue Léon... Et puis malgré son langage outrancier, il en dit de belles choses Abad. Tout ce qu'il nous raconte c'est beau, c'est triste et c'est criant de vérité !



Merci beaucoup à Babelio et audiolib pour la découverte.

Ce fut ma première expérience de « lecture audio » et si j'ai apprécié l'écoute de ce livre je reste une inconditionnelle du papier. En ce qui me concerne l'immersion dans l'histoire et le travail d'imagination m'est beaucoup plus agréable avec un livre entre les mains.
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Rhapsodie des oubliés

J'avoue m'être précipité sur ce roman lors de sa sortie en poche , un petit livre dont la couverture s'avère très suggestive avec les facéties d'un jeune garçon dont on peut penser qu'il pourrait être le petit Abad, le héros.

Abad va nous emmener dans son territoire , la rue Léon, dans le quartier de Barbés , La Goutte d'or . Qu'est - ce que l'on fait de son adolescence dans un territoire qui ne veut pas trop de vous , ne vous offre pas grand chose si ce n'est du rêve, de l'utopie , mais vous façonne sans que vous puissiez vous échapper ? La rue est sans pitié pour les plus faibles , territoire réservé, asservi , où tous les moyens sont bons pour exister , assurer une vie quotidienne bien précaire.

A treize ans , c'est le début de l'adolescence , l'éveil des sens , les seins des nanas qui obsédent les esprits et excitent les bas - ventres .... Nous suivrons ,tout au long du récit, les pérégrinations de bon nombre de personnages gravitant autour de notre jeune héros.Des personnages plus ou moins attachants , jeunes ou vieux , sur lesquels notre regard s'attardera avec plus ou moins d' attention , avec plus ou moins de sympathie , plus ou moins d'empathie....

C'est , pour moi un bon roman, certes ; n'obtient pas le " Prix de Flore " qui veut , mais il me laisse un peu sur ma faim , balançant entre des passages émouvants, des passages humoristiques , des passages " un peu limite " aussi quant à une certaine obsession " sexuelle " sur laquelle l'autrice s'appesantit un peu trop à mon goût . Après, on peut regretter aussi un "découpage" particulier qui peut désorienter et un rythme assez lent .

Ensuite , il y a le langage et je vous laisse juges . Pour moi , j'aurais souhaité un peu plus de " retenue ", un peu de langage de la rue , mais aussi plus de vocabulaire " châtié " ou simplement plus " usuel et universel " .

Un tel sujet est forcément difficile à aborder et les clichés ne manquent pas même s' il ne convient pas de résumer le livre à cette caractéristique. Je ne regrette pas ma lecture , pas du tout , mais j'attendais autre chose . C'est un premier roman , il conviendra de s'en souvenir car la " plume " n'est pas maladroite .
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Rhapsodie des oubliés

Mieux la Goutte d’or que le Triangle d’or ! J’en ai soupé des histoires de femmes névrosées dont l’unique problème est de confier leur 4X4 au voiturier de la rue Montaigne ! Là, on a de l’authentique, du sincère, du spontané, de l’inventif, du vivant ! Naturaliste comme du Zola, émouvant comme du Gary (on pense à la Madame Rosa de « La vie devant soi »), décomplexé comme du Rajaa Alsanea (Les filles de Riyad), le roman de Sofia Aouine est non seulement divertissant, il est nécessaire. Le rôle d’un écrivain est de donner à voir. À voir des mondes où le lecteur n’ira jamais. L’auteur les rend familiers, attachants, accessibles. Mission accomplie. J’ai été sensible à la langue de la rue, imagée, créative, irrésistible. Les salafistes sont des barbapapas, les femmes en niqab des batmans. On ne s’adonne pas à l’onanisme, on pratique la bagnette et la psychologue, c’est la dame de « l’ouvrir dedans ». Sofia Aouine aime viscéralement ce quartier du XVIIIe (descriptions magnifiques dans les premières pages) et ses habitants. Sous sa plume, les balafres ont du charme, les blessures sont toujours près du cœur. Les délinquants, les égarés, les putes, les mécréants, les apprentis jihadistes, les dealers, les clodos, les maquereaux, les petits vieux, les travailleurs immigrés… Chacun a sa place sur cette planète qui résiste à tous les envahisseurs, à la gentrification, à l’islamisation, à la drogue et aux descentes de police. Sofia Aouine leur donne une voix. J’ai été particulièrement touchée par le journal de la jeune musulmane déchirée entre son désir d’émancipation et le respect qu’elle doit à sa communauté (pages 111-118). Émue aussi par les confessions de la vieille dame qui voit sa vie lui échapper. Bouleversée par le tragique destin de Gervaise, la prostituée venue d’Afrique. Un livre beau et fort, une célébration d’un quartier haut en couleurs et en douleurs.
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Rhapsodie des oubliés

Lu en audio. Je regrette le choix de la voix de Mme Ascaride. Je ne l'ai pas trouvé convaincante dans ses différents rôles et même dans son rythme.

A moins que ce ne soit le roman lui même qui suscite chez moi la même absence de réaction.

Les situations décrites m'ont parues amplifiées exagérément, artificiellement et m'ont empêché une identification, une reconnaissance minimale de cette galerie de personnages.

En sortant le disque de mon lecteur, je me suis dit que c'était bien une Rhapsodie, il n'y a donc pas tromperie sur la marchandise.

Définition choisie de ce substantif : Péj., vieilli. Ouvrage en vers ou en prose fait de morceaux divers, mal liés entre eux.
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Rhapsodie des oubliés

Sofia Aouine déroule la vie d'Abad. Gamin déraciné du Liban qui tente de s'enraciner entre Barbès et la Goutte d'Or. Rue Léon.



Abad est un peu le gavroche des temps modernes, débrouillard, ouvert au monde qui l'entoure, surtout aux femmes. Gamin sensible dans un quartier tout aussi sensible !



Histoire de déracinés, tombés tous dans la rudesse d'un quartier où il faut être fort, où règne la délinquance. Pourtant il y a de l'amour aussi dans le quartier de ce môme, le tarifé et le vrai, celui que le lie à la Batman d'abord, à Gervaise, Odette, Ethel et son drôle de chat, Colette.



Afin de lui éviter de tomber dans la délinquance, il est envoyé voir une psychologue censée lui guérir le dedans. Coupé de ses racines, il enferme la douleur jusqu'à la rencontre de la dame qui lui fouille le dedans. La perte de sa Mémé, la guerre de 1975. Avec quelques clins d'oeil littéraires et cinématographiques à découvrir pour étoffer le propos.



Sofia Aouine nous offre une histoire percutante, réaliste, violente, sombre et lumineuse où se concentre toute la noirceur du monde, qui ne laisse pas indifférent. L'écriture est crue, brutale et tendre à la fois.



Ce premier roman-là bouscule, ne laisse pas indifférent, on aime ou il échappe des mains. Je l'ai tenu jusqu'à l'épilogue !




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Rhapsodie des oubliés



Barbès- Rochechouart, fragments de la vie d’Abad dans le quartier de la Goutte d’or. Un quartier où même les gens honnêtes ont l’air de voleurs, alors Abad jeune poulbot de treize ans vit son âge et sa pauvreté et fait donc pas mal de conneries. En chemin il croise, Gervaise une belle de nuit qui a laissé Nana sa fille au pays. Nana, Gervaise, finalement le XVIII éme arrondissement de Paris n’a pas beaucoup changé depuis « L’assommoir » de notre cher Émile.



Rhapsodie Rap, approche poétique et documentaire d’un quartier et d’une époque, Sofia Aouine à la langue bien écrite et son petit héros, turbulent et tendre pose un regard sans concession sur le monde qui l’entoure. Abad c’est le petit frère de Momo de « La vie devant soi » et le petit cousin d’Antoine Doinel.



Impossible dans l’épilogue de « Rhapsodie des oubliés », ne pas imaginer le long travelling de la course d’Antoine pour voir la mer, il ne manque que le regard caméra. Fort et poignant.



Sofia Aouine aime Jean Cocteau, François Truffaut et Romain Gary, ça tombe bien, nous aussi.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Rhapsodie des oubliés

Bienvenu à Barbès, Paris 18ème. A deux pas du Sacré-Coeur.

Ah là, on n'est pas dans le Paris chic des Champs Élysées et des boutiques de luxe.

Ici, le luxe c'est Tatiland comme on l'appelle, c'est quand même autre chose...

C'est là qu'Abad, un jeune Libanais de 13 ans a atterri avec sa famille.

Abad, il va vous faire visiter son quartier, sa rue Léon.

Il va vous présenter sa famille, ses voisins, ses putes, ses fantasmes (avec sa bande de potes puceaux), il va vous faire rencontrer Gervaise, Odette, Batman ou encore la dame pour ouvrir dedans (c'est lui qui l'a baptisé comme ça, mais je vous laisse deviner qui elle est, d'ailleurs).

À Barbès vous allez croiser toutes les communautés, toutes les religions, tous les excès. Vous allez fréquenter les bistrots, les mosquées ou les hôtels de passe. Vous allez observer depuis votre fenêtre, votre balcon (plus sûrement votre fauteuil), la vie des autres, de ces gens-là qu'il est plus facile de montrer du doigt que d'essayer de comprendre.

Que savons-nous du déracinement ?

Que connaissons-nous des causes qui ont amené là, tant de nationalités, de religions et de cultures différentes, obligées de cohabiter ?

Ici on vend de tout, tissus, fruits et légumes, alcool, drogue, on vend son corps, on vend du rêve et de l'espoir, à chacun son Dieu,  même si celui des barbus est omniprésent, à chacun ses croyances, ici, souvent, on baisse la tête. Ici des femmes qui se cachent sous le niqab croisent des femmes qui, elles, dévoilent leurs charmes.

Abad, avec son regard d'ado, ne dément pas. Il ne vous décrit pas le paradis sur terre.

Sous la plume caustique de Sofia Aouine, vous allez vivre le quotidien d'un gosse de Barbès.

Oh, vous n'allez certainement pas l'envier, ni ceux qu'il croise d'ailleurs, mais vous allez vivre au plus près d'un monde que nous autres nantis on se plaît à deviner plus qu'à fréquenter.

À Barbès, des hommes battent femmes ou enfants parce que l'alcoolisme ou le chômage.

À Barbès des femmes subissent et élèvent leurs enfants en silence.

À Barbès des enfants font des conneries alors on sévit. 

À Barbès on rit, on chante, on pleure, comme partout, y a juste les langues qui diffèrent.

Sofia Aouine réussit un coup de maître avec ce premier roman. Elle ne cherche pas l'empathie. Elle n'accuse pas. Elle ne culpabilise pas.

Dans son livre, elle ouvre la fenêtre d'Abad et lui dit doucement à l'oreille :

- Regarde petit, respire, écoute, voici ton monde, il n'est ni beau ni laid, il est le monde...

Abad c'est les habitants de Barbès, c'est elle, c'est nous...



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Rhapsodie des oubliés

Abad, le poulbot de la Goutte-d’Or



Sofia Aouine fait des débuts fracassants avec sa Rhapsodie des oubliés. Elle met en scène Abad, un adolescent plein de gouaille et de rêves, qui entend sortir du destin misérable qui lui est promis.



«Ma rue raconte l’histoire du monde avec une odeur de poubelles. Elle s’appelle rue Léon, un nom de bon Français avec que des métèques et des visages bruns dedans.» Dès l’incipit, le ton est donné, le style est là, quelque part entre un naturalisme baroque et un air de rap, entre Zazie dans le métro et La vie devant soi. C’est du reste sous l’exergue de Romain Gary / Émile Ajar que ce premier roman – logiquement sélectionné pour le Prix du style 2019 – s’inscrit. Cette gouaille, ce sens aigu de l’observation est celui d’Abad, 13 ans, qui va nous faire découvrir sa rue, ce quartier du Nord-Ouest de Paris qui est aussi présent dans Après la fête de Lola Nicolle. Outre les descriptions des faits – et surtout des méfaits – qui font le quotidien de ce microcosme cosmopolite, nous aurons aussi droit à des portraits croqués avec la même force d’évocation, la même fausse naïveté du regard de l’enfant qui perd son innocence face à la dureté du monde qu’il côtoie jour après jour. Il y a d’abord ses parents, qui ont surtout appris à se taire pour se fondre dans la masse, à jamais orphelin de ce Liban qu’ils ont dû fuir. Puis viennent une jeune fille aperçue derrière la fenêtre d’une tour voisine et qui est retenue par son salafiste de père, Ethel Futterman la psy chez qui on l’envoie pour tenter de la remettre dans ce droit chemin dont chacun a pourtant bien compris qu’il n’existe qu’en rêve et qui est une rescapée des rafles de juifs durant l’Occupation ou encore Gervaise, la pute qui espère pouvoir revoir sa fille restée au Cameroun selon le schéma détaillée par Karine Miermont dans Grace l’intrépide, sans oublier Odette, sa voisine, qui va finir en EPHAD, rongée par la maladie d’Alzheimer.

Oscillant entre comédie loufoque comme le camp d’entrainement des Femen qu’il découvre de sa fenêtre et qui va donner lieu à une belle empoignade entre féministes, intégristes – les barbapapas – et forces de l’ordre ou encore ce trafic mis en place avec un camarade de jeu dans le vestiaire et qui permettait de reluquer les filles tout en se masturbant. Une activité beaucoup pratiquée tout au long du roman et que l’on pourra interpréter comme une preuve de vitalité soit comme qui va mal finir, comme à peu près toutes les initiatives prises par Abad et qui vont finir par le séparer de sa famille pour se retrouver au milieu d’autres «cassos» dans une famille d’accueil en baie de Somme.

Mais avant cela, il aura beaucoup appris et beaucoup mûri. Compris comment on tenait les prostituées, comment on parvenait à radicaliser les musulmans, comment on éloignait tous les gêneurs qui entendaient ne pas se soumettre aux règles des intégristes. Et décidé de résister, de ne pas se laisser avoir à son tour et continuer à faire les 400 coups.

Avec les livres et avec les mots. Avec Marguerite Duras et avec le petit carnet noir que lui a donné sa psy. C’est ainsi que Sofia Aouine est devenue grande et qu’elle réussit à nous enchanter. À suivre de près !




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Rhapsodie des oubliés

J'ai tout d'abord été séduite par le titre "Rhapsody des oubliés" mais ce titre poétique contraste avec la plume de Sofia Aouine car s'il y a quelques réflexions poétiques, la plupart du temps l'écriture est crue.

Mon plaisir de lecture a été inégal et je crois que la plume y est pour beaucoup.

J'ai été touchée par certains passages mais d'autres m'ont presque ennuyée. Abad, petit bonhomme de 13 ans vivant dans le 18e à Paris, quartier populaire de la Goutte-d'or, raconte ce qu'il voit, ce qu'il vit et nous fait rencontrer des personnages qui nous touchent plus ou moins. Odette fait partie de mes coups de cœur.

Le sexe est beaucoup trop présent, je ne suis pas convaincue qu'il faille en parler autant et surtout de cette façon.



Les références à Zola, Romain Gary, Truffaut n'ont pas suffi à me convaincre totalement et je dois même dire que par moment j'ai été agacée par les clichés.

Je reste donc mitigée sur ce roman.
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Rhapsodie des oubliés

Avant de recevoir ce roman, je l’avais vu passé dans les sorties annoncées. Il faut bien l’avouer, d’un premier coup d’œil, ce roman ne m’avait pas parlé. Tout d’abord, à cause de sa couverture (le marketing a malgré tout une place importante dans la vente de romans, il ne faut pas se leurrer) très sommaire et peu attirante. Et ensuite, le résumé : bien qu’il ne soit pas inintéressant, ce n’est pas le type de résumé qui m’appelle à la lecture. Trop basique, trop banal presque … rien qu’avec ce résumé j’ai eu l’impression que tout cela allait manquer de dynamisme et de consistance. Mais comme le dit le proverbe : l’habit ne fait pas le moine. C’est donc avec curiosité et entrain que je l’ai commencé. Malheureusement, mon entrain s’est vite mué en désespoir.

Il faut reconnaître que le postulat de base n’était pas fait pour me convaincre : utiliser une langue si familière à la limite du grossier, très peu pour moi. J’aime lire pour la beauté des textes et la poésie de la langue française. J’estime que c’est une langue si expressive qu’elle nous permet de tout écrire et de faire passer un grand nombre de sentiments. Malheureusement, ici, je n’ai pas été sensible à cette familiarité donnée à cette langue. Et au-delà de ça, elle a créée une sorte de barrière entre le texte et moi.

Une barrière si grande que j’ai vite abandonné cette lecture. Pendant plusieurs jours, j’ai été incapable de dépasser la page 90. J’ai dû me forcer à le reprendre tellement ce début de roman m’avait ennuyé. Et lorsque je l’ai enfin recommencé, j’avais finalement complètement oublié ce que j’avais lu auparavant … Comme si, à l’image d’Odette, j’étais atteinte d’Alzheimer. La raison première à cette perte de mémoire ? Je dirais que ça manque indéniablement de « sentiments ». Je n’ai rien ressenti lors de cette lecture. Ni colère, ni peine, ni frustration, ni compassion… Juste de l’indifférence. J’ai manqué de vrais rebondissements, de vrais enjeux. C’était, à mes yeux, très plat. Mais, il faut bien reconnaitre qu’il y a une réussite : tout tourne autour de l’oubli … Autant pour l’auteure que pour le lecteur. L’auteure parle des oubliés et le lecteur les oublie. Le titre est donc particulièrement bien choisi.

Autre fait qui m’a lourdement dérangé : l’obsession d’Abad pour la « baguette ». Pourquoi ? Lorsque le résumé disait : « le cœur plein de ronces, l’amour et le sexe », je ne m’attendais pas à ça. On peut être curieux lorsqu’on est jeune, mais il y a des limites. Un roman qui ferait donc « retomber toutes les baguettes ».

Pour en revenir au résumé, il est question de roman noir, de hip-hop et de soul music. J’ai longuement cherché, mais rien ne m’a rapproché de ces genres-là. Pour faire un roman noir, il ne suffit pas de créer des malheurs à n’en plus finir aux protagonistes. Il ne suffit pas de les faire évoluer dans les rues jonchées de prostituées, non plus. Il faut une atmosphère particulière. Et cette atmosphère est inexistante, de bout en large. Où sont ces sensations d’oppression, d’étouffement, de danger imminent, de chute vertigineuse ? Ce roman est à l’image de l’électrocardiogramme d’un mort : lisse. Et, personnellement, lorsqu’on me parle de hip-hop, je m’attends à un sentiment de colère, de rage presque. Quand on me parle de Soul music, je m’attends à de la beauté, de la souffrance et à une certaine douceur. Mais je n’ai rien eu de tout cela.

Au niveau des personnages, j’ai eu bien du mal à m’attacher à Abad. Je ne l’appréciais, ni ne le détestais … en vérité, je me moquais un peu de son histoire. Je n’avais qu’une hâte : retrouver Ida. Ce qui est fort dommage puisqu’il est le personnage principal. À l’image du roman lui-même, j’ai trouvé Abad très « fade ». L’auteure avait tous les moyens de nous le rendre sympathique (sans qu’il soit obligatoirement un merveilleux et sage jeune homme) et pourtant elle l’a dénué de tout charisme (même nos anti-héros préférés en ont). J’ai adoré Ida. J’ai adoré son personnage, son histoire, sa force, son courage… C’était LE personnage qui, à mon sens, aurait dû être central. Elle avait quelque chose à raconter (autre qu’une histoire de « baguette » …), quelque chose d’intéressant, de prenant.

Seules les histoires d’Ida, du père d’Abad et d’Odette parvenaient à me maintenir en alerte. Elles étaient si prenantes que j’arrivais à oublier ce style d’écriture qui ne me convenait pas. C’était de vraies histoires. Des histoires qui créaient un sentiment chez le lecteur, et même une certaine addiction. Quelle déception de voir qu’elles ont été survolées au profit de celle d’Abad qui ne méritait pas tant de pages. En résumé, je ne pense pas être bon public pour ce roman. De ce fait, je n’ai pas réussi à réellement l’apprécier. Et je dois bien l’avouer, si je n’avais pas pris de notes lors de ma lecture, j’aurais été incapable (à peine trois jours plus tard) de me souvenir de l’histoire d’Abad. Rhapsodie des oubliés sera donc pour moi, un grand oublié de ma bibliothèque.
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Rhapsodie des oubliés

Barbès nous est raconté, Barbès est pourri, Barbès est une ville dans la ville. Sofia Aouine, grâce à une écriture tantôt littéraire, tantôt acerbe et crue, tantôt alimentée de langage de rue, nous fait découvrir le quotidien d'Abad, un autre monde. Le lecteur peut le sentir, le toucher, presque l'apprivoiser. C'est un contraste étonnant entre Abad, ce jeune homme désinvolte, vif et malicieux et ce quartier où se côtoient malheur et déchéance. Et puis, il y a ceux qui ont changé la vie d'Abad et son regard sur le monde. Gervaise, qui vend son corps (qui a une fille qui s'appelle Nana restée au pays, joli clin d'oeil à Zola), sa voisine Odette et une poignée d'autres. Une lueur dans la noirceur... (...)



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Rhapsodie des oubliés

Ce petit roman m'a tout de suite fait penser à "Emile Ajar"; Abad, c'est Momo!

Mais Sofia Aouine n'est pas Romain Gary.

Abad est un jeune garçon libanais qui a atterri à Barbés, par accident, pour qui la rue est sa maison, des parents paumés, des copains dans la même situation, beaucoup de bêtises à l'horizon, un besoin très fort d'être aimé .

Certes , ce n'est pas une écriture classique, il n'y a pas de dictée à faire sur ce texte c'est sûr, mais il y a une telle humanité, un tel amour pour ces enfants qui s'élèvent seuls ou au gré de belles rencontres, une vieille voisine, une psy, que je me suis laissée prendre par cette lecture.
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Rhapsodie des oubliés

Ce que j’ai ressenti:



Sur le boulevard des rêves brisés…



Il y a Paris, mais pas l’amour. Il y a le bitume, mais pas l’amour. Il y a la rue, mais pas l’amour. Il y a le quartier, mais pas l’amour.



L’amour, c’est pour les autres…Ici, tu es dans la rue Léon. L’amour, il n’y en a pas. Des « Je t’aime », il n’y en a pas.



Sur le boulevard des rêves brisés, il y a tout de même un jeune immigré de 13 ans, Abad, qui le cherche désespérément l’amour. Avec toute l’innocence de la jeunesse, avec toute l’ardeur de son âge charnière, avec toute la désespérance de sa situation, il le cherche vraiment l’amour. Mais dans la rue Léon, dans le quartier de Barbès, il n’y en a pas tant que ça de l’amour. Ça ne court pas les rues, l’amour…En tout cas, pas celle là…



Sur le boulevard des rêves brisés, ça serait plutôt la prostitution, l’intolérance, le fanatisme, la mort et la violence qui courent… Mais Abad cherche derrière cette odeur de misère, le trésor. Il n’a peut être pas les mots, pas toujours le bon comportement, et sans doute trop d’espérance dans ce mot. Il nous partage tout, sans filtre et sans concession, avec humour et incrédulité, la rhapsodie de sa rue. Il a une touchante maladresse, Abad, une obsession hormonale envahissante, et malgré tout, il a aussi quelques personnes qui vont lui donner des miettes d’affection. Heureusement.



Ce n’est donc pas facile de le trouver cet amour. Putain d’amour! Mais il est où, sérieux?! Dans les yeux de Ethel? Dans le corps de Gervaise? N’existe-t-il que dans les livres et les chansons?!



C’est vrai que j’ai juré. C’est qu’on l’attrape vite le virus de la rue et puis, ça m’énerve aussi. Mais qu’on lui donne à ce gamin! Qu’on lui tende un peu la main, qu’on ouvre un peu les fenêtres, qu’on déblaye la rue avec cette odeur de poubelle! Surtout que l’amour, ça n’attend pas, ça se barre vite fait! Comment tu veux le voir en plus, avec toute cette crasse?! La Goutte d’Or, je t’en foutrais moi, de l’or! C’est tout gris dans cette rue Léon. Il y a des revenants et le bordel, des Batman et l’enfer, des cassos et la pauvreté, des fantômes et le bitume, des seins nus et des chats qui puent, des valises et des malheurs, une Marguerite et des âmes divisées… Mais pas d’or. Et pas d’amour. Non, toujours pas. Il est où, l’amour, putain?! Pardon, j’ai juré. Encore.



Alors, Paris, tu vas le laisser sur le bitume aussi celui-là de gamin? Tu ne vas rien faire pour lui, même s’il a un stylo à la main et des rêves d’avenir trop grands? Hein, dis?! S’il te plaît, n’en fais pas un oublié de plus. Abad, il s’est ouvert en dedans, pour laisser toute la place à l’amour, laisse-le encore monter sur les toits, voir ta beauté, Paris. Laisse-le nous ce gamin, laisse grandir ce personnage attachant de Sofia Aouine…Laisse-le trouver l’amour. Dis lui, aussi que ce n’est pas que pour les autres, l’amour, et que le boulevard des rêves brisés va bientôt disparaître…



-(♫La nuit, je mens…♫, je m’en lave les mains)-



Pourquoi je t’entends chanter, Paris? Et puis, c’est quoi que tu chantes,là?! Hein dis?!!



-(♫La nuit, je mens…♫, je m’en lave les mains)-







Je ne t’oublierai pas, moi, Abad.
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Rhapsodie des oubliés

J’ai débuté la lecture de ce premier roman avec un doute immense : la prestation de la jeune auteure dans l’émission de La Grande Librairie, sur France 5, m’avait séduite, mais je craignais ne pas apprécier du tout le langage utilisé, celui des banlieues du XVIIIe. En effet, les phrases de type de celles utilisées par les jeunes des quartiers sensibles ne sont pas du genre à me rappeler de bonnes périodes de ma carrière d’enseignante : "Oh la victime, il a une tête de chelou!", "Obligé, c'est un cassos de la Ddass!", "Regarde ses pompes, abusé!", "La honte wallah… Moldavie wesh, sa daronne fait la manche au marché de Barbès… Attention, cache ton iPhone, ah c'bâtard, il va nous dépouiller…" Mais ici, l’utilisation de ce type de langage est un passage obligé (et momentané) puisque l’auteure laisse son petit héros maghrébin prendre la parole en tant que principal narrateur de ce bout de vie, ce morceau d’une année, celle d’un gamin de treize ans, né au Liban, atterri en banlieue parisienne du jour au lendemain, loin de sa mémé adorée.

C’est là, qu’à ses heures perdues, depuis l’arrière des stores de l’appartement familial qu’il joue l’observateur d’un microcosme polychrome en constante mouvance (« Certaines familles […] préféraient voir leur fils faire le jihadiste de pacotille au quartier plutôt que la victime au mitard »), plutôt vers le bas, dans la crasse, le malheur et la violence, d’un petit coin de la capitale française où l’imaginaire collectif se nourrit habituellement de récits élaborés au cœur des quartiers bobos où tout va bien, tout est beau, estampillé Vuitton, Chanel ou Dior et où tout rutile dans l’éblouissement de la ville Lumière…



Abad, de haut de ses treize ans, lui, n’est pas dupe. Tout juste adolescent, il nourrit une passion : il adore les « nichons » ! Toute fissure dans un mur est propice à des heures passées en espérant voir des filles se déshabiller et à pratiquer la « bagnette ». Quelle chance quand il a, pour un laps de temps, une « Femen » en guise de voisine ! Son obsession va mettre sur sa route Gervaise (comme dans Zola, oui…), jeune Africaine mise sur le trottoir, parce qu’elle « avait grandi mal et trop vite en passant des nattes et chaussettes blanches aux strings ficelle en l'espace de quelques années », de rêves perdus en désillusions douloureuses, elle n’en possède pas moins un cœur immense…



Deux autres figures féminines vont aider Abad à ouvrir les yeux ; sa voisine, Odette, mamie fan de musique et de littérature, et Mme Futterman, psychologue survivante de la Shoah. Au final, trois portraits de femmes aux secrets lourds et à la vie partiellement brisée. Trois survivantes.

Et je pense que c’est grâce à ces trois personnages féminins que ce roman est devenu pour moi, au fil des pages, un véritable coup de cœur. J’ai senti mon émotion grandir au fur et à mesure des évènements qui se sont succédés dans la vie de ce petit bonhomme, mais aussi dans celles des personnages corollaires. Aucun n’est épargné. Et on se rend bien compte que même si nous sommes dans un roman, ce texte colle tellement à la réalité de milliers de personnes vivant en France actuellement qu’il ne peut laisser indifférent. Il me marquera pendant un moment, je pense.

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Rhapsodie des oubliés

Abad 13 ans réfugié libanais, habite à Paris rue Léon, ici c'est Barbès le quartier de la Goutte-d'Or. Sa rue a la gueule d'une rue bombardée, une gueule de décharge à ciel ouvert, une rue qui ne dort jamais. Une rue parsemée des vomis des clochards et des seringues des toxicos. Un refuge d'éclopés, de cassos, d'âmes fragiles. Les prostituées côtoient les drogués et les « Barbapapas », les islamistes qui gangrènent le quartier.



Abad est obsédé par ce qu'il a dans son slip. Alors il pratique « la branlette », le seul sport des garçons de son âge, tout en rêvant aux filles. Comme celle d'en face, un visage de princesse au milieu des ordures, bientôt revêtue d'un tissu noir qu'on lui a imposé quand elle est devenue femme.

« Une fille, ça s'échappe pas. C'est un oiseau dans une cage fermée à double tour. À moi, des ailes me poussent. Je me suis souvent blessée en essayant de les couper. »



Un roman réaliste porté par une langue crue, souvent vulgaire, mais qui sonne juste dans la bouche de ce jeune garçon, une plongée dans un monde qui est une ville dans la ville avec ses règles, ses caïds, ses laissés pour compte. Sofia Aouine à travers les yeux d'Abad 13 ans, une sorte de Gavroche d'aujourd'hui qui nous entraîne dans son quotidien. J'ai été touché par ce récit, principalement par les portraits tendres de femmes au passé douloureux. Ethel la psy, la femme qui « soigne de l'intérieur », marquée par le drame de sa famille juive. Odette, la vieille voisine, elle lui lit des livres et lui raconte des histoires à dormir debout et puis sa mémoire qui lâche, elle se souvient parfois, mais cela devient de plus en plus rare. Gervaise, une Africaine qui tapine pour rembourser une dette qui n'en finira jamais, et retrouver enfin sa fille au pays.

« Vous savez, une pute, c'est une belle qui a grandi trop vite. Même si vous pensez que c'est juste une pute, je le sais et je vous le dis, une pute, c'est une maman aussi. »

Toutes ces femmes vont donner de la tendresse et de la chaleur humaine à cet adolescent qui en manque terriblement.



Ce roman aborde des thèmes très actuels, le sort des mères et surtout des jeunes filles emprisonnées par la religion de leur père, La montée de l'islamisme dans les quartiers avec des jeunes hommes, jihadistes de carnaval, qui se vantent d'avoir passé quelques mois en prison, d'avoir tenté le Jihad en Syrie et d'être fiché S. La violence des pères.

« On est beaucoup dans ma rue, et même au collège, à être élevés par des droites et qu'on fait taire avec des bonbons. La principale religion à la maison s'appelle le silence. Pour éviter les problèmes et espérer être un peu heureux, la tactique à employer est de fermer sa gueule, baisser la tête, raser les murs. Alors c'est ce qu'on fait, maman et moi. »



Deux regrets cependant, l'auteur insiste beaucoup trop sur les désirs sexuels d'Abad et cela devient un peu répétitif. Ensuite elle entrecoupe son récit de deux histoires courtes vécues par deux femmes et cela aurait sans aucun doute mérité que l'on s'y attarde davantage.

Heureusement que l'écriture semble légère, grâce à la fraîcheur du narrateur, car en fait derrière se cache une histoire terrible, la réalité des certains quartiers sensibles, et comme toujours ce sont les femmes qui en payent le plus lourd tribut. C'est d'une tristesse infinie.





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Rhapsodie des oubliés

Rhapsodie des oubliés, c'est une immersion dans le Paris des bas-fonds, à travers le regard cru et sans filtre d'Abad, un adolescent de 13 ans qui a du fuir le Liban avec ses parents et qui vit désormais dans le quartier de Barbès : « une planète de martiens, un refuge d'éclopés, de cassos, d'âmes fragiles, de « ceux qui ont réussi à dépasser Lampedusa », de vieux Arabes d'avant avec des turbans sur la tête et des têtes d'avant, de grosses mamans avec leurs gros culs et leurs chariots qui te bloquent le passage quand tu veux traverser le boulevard. Des gens honnêtes qui ont toujours l'air de voleurs et qui rasent les murs pour pas qu'on les voie … Ma rue a la gueule d'une ville bombardée, une gueule de décharge à ciel ouvert, une rue qui ne dort jamais, où les murs ressemblent à des visages qui pleurent ».



Dès les premières pages, le ton est donné, et Abad va raconter son quotidien et celui de sa bande des « quatre fantastiques » avec laquelle il fait les 400 coups.



Même si la première partie m'a moyennement convaincue car un peu trop axée à mon goût sur les émois sexuels adolescents, je me suis laissée entraîner dans l'histoire de ce personnage malicieux et attachant. J'ai aimé sa rage et son grand cœur, ainsi que la maturité et l'impertinence avec lesquelles il évoque le sort des habitants de son quartier, ces déracinés à qui la vie ne fait de cadeau.



L'auteure décrit d'une plume très juste la violence de la rue, gangrenée par l'intégrisme, la prostitution et la drogue. Au milieu de la misère, elle a su insuffler de la beauté et de l'humanité avec de beaux portraits de femmes. Il y a notamment Gervaise, la prostituée africaine prise au piège d'un réseau et qui rêve de retrouver sa petite fille restée au pays, Odette, sa voisine âgée qui rappelle à Abad sa mémé Jémayel et qui lui fait aimer la culture et les livres, et Ethel, la psychologue au lourd passé qu'Abad est contraint de consulter sur décision du juge des enfants et qui l'aide à « ouvrir dedans ».



J'ai tout de même un petit regret : la chute du livre, assez brutale et qui m'a laissée sur ma faim...



Lu dans le cadre du prix des lecteurs du livre de poche 2021
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