Lexpérience directe comme chemin déveil | Stephan Schillinger | TEDxAlsace
Cher Ami,
Sur le chemin, à certains moments, tu seras inévitablement rejeté, méprisé, et surtout fui par tes congénères. L’impermanence est une des grandes lois de l’existence. Il en est de même pour les relations humaines que pour les saisons.
Sur ce chemin, quand tu auras donné à t'en dessécher le coeur, Quand on aura bu à ta source jusqu’à tarir ton âme,
Quand tout sera sec, aride et dépeuplé,
Quand ceux que tu appelais « amis » t'auront déserté,
Rappelle-toi seulement qu’il est bien ambitieux de demander d’être compris par qui ne se comprend pas lui-même,
D’être entendu par celui qui ne sait pas s’écouter et qui est en perpétuelle fuite du Soi,
D’être accepté par celui qui ne s’accepte pas.
On ne peut rencontrer l'autre qu’aussi profondément que l’on s’est déjà rencontré soi-même.
Il est dit qu’aucun arbre ne peut croître au ciel sans avoir de racines en enfer. Indéfectibilité et inconditionnalité d'une relation sont réservées à ceux qui sont familiers avec leur propre ombre.
Cela implique un chemin introspectif que peu sont prêts à entreprendre. Ce chemin commence par prendre conscience de son masque, la persona, pour mieux le déposer.
Ce qui permet l’exploration sincère de son espace intérieur, la rencontre avec ses blessures pour ne plus les fuir,
Et enfin placer le respect de l’autre comme une valeur supérieure à la fuite incontrôlée et névrosée de son intériorité.
Une feuille ne retient pas la sève que l’arbre lui donne. La feuille est l’arbre, l’arbre est la feuille, et la feuille est à la fois instrument de réception et instrument de propagation.
Si la feuille avait comme nous un ego, elle aurait peur de ne pas recevoir de sève, et garderait toute la lumière du soleil pour elle, couperait la connexion avec l’arbre, et mourrait.
La plupart d’entre nous sommes des feuilles mortes au pied de l’arbre, et nous nous plaignons et souffrons de cette position dont nous ne sommes conscients ni de la cause ni de la conséquence.
La réintégration à l’arbre de la vie, passe par la putréfaction de cet état de séparation du tout, afin de réintégrer l’arbre que serait ” la Vie ”, par le sol. S’ensuivra un long chemin de transmutation, souterrain puis ascensionnel. Pour redevenir une feuille au service de l’arbre. Qui ne manquera plus jamais de rien
— Maître, je crois que je ne manque de rien dans ma vie, mais pourtant je suis insatisfaite... J’en arrive à saboter mon bonheur, je me crée des problèmes là où il n’y en a pas... j’ai tendance à angoisser et avoir peur, alors que tout va bien.
— La peur est l’outil principal de notre mental pour nous protéger. Le cerveau est cette machine ultra-sophistiquée, dont un des logiciels est dédié à la détection et la résolution de problèmes, afin de protéger l’individu à l’aide de son outil principal : la peur. Nous devons notre survie en tant qu’espèce à ce programme extrêmement performant de détection de problèmes. Malgré son utilité, c’est une couche de plus qui nous sépare de ce dont le monde manque cruellement, l’amour, la reconnexion à la conscience, la présence, l’expérience directe par le corps. Ces considérations-là, ne se trouvent pas dans notre mental, que nous pourrions associer à l’ego, mais au niveau du coeur, que nous associons à l’existence de quelque chose d’infiniment plus grand, plus profond : l’âme. Certaines personnes ont un mental qui fonctionne extrêmement bien, d’une redoutable efficience, car leur programme protège des blessures extrêmement vives et profondes. Quand à un moment il leur a été nécessaire de pouvoir continuer à avancer debout pour survivre à certains traumas, il est devenu la tour de contrôle de notre individu. Ce formidable outil de protection et de détection de problèmes, le mental, est alors en surchauffe permanente. Quand tout va bien, comme dans ta vie, il ne peut accepter le chômage technique, qui serait cessation de sa raison d’être. Survient alors la création de problèmes fictifs. C’est là, que naît le sabotage du bonheur. Certaines personnes, victimes de cet état, deviennent incapables de ressentir, de vivre le moment présent, victimes de la dictature du mental, de l’ego, outil surperformant de protection des blessures.
Il s’agit alors, avec une douceur infinie, de déplacer la tour de contrôle de quelques centimètres vers le bas, au niveau du plexus. Là où se joue la Vie, au-delà des concepts ou des stratégies. Là, où se joue l’instant présent à travers le ressenti, à travers l’expérience directe de ce qui est, au-delà des mots. Là, où la tour de contrôle devient un puits duquel nous pouvons extraire dans l’intelligence du vivant.
- Et toi, qu'as-tu appris ?
- Que nous sommes l'univers qui s'exprime pendant un minuscule temps sous une forme humaine, et que nous tremblons tous d'un irrépressible désir de retour à l'unité.
Un Mystique peut être considéré comme une personne en recherche. Frappé par la nostalgie d'un ailleurs, il ne peut, pour des raisons gisant dans les profondeurs de son âme, se satisfaire pleinement des apparences de l'existence quotidienne. (...)
Il sent intuitivement que derrière l'objectivité du monde, il y a autre chose qui agit en secret, un moteur invisible et puissant qui fait tourner la roue de la vie.
Toute pensée est agissante, rien ne se perd, tout est entendu, ne serait-ce que par nous-même.
[...] le plus grand voyage du monde. Il fait 50 centimètres et part du cerveau pour aller vers le cœur.
Il n'y a aucun texte, aucune formule magique, aucun rituel secret, aucune position corporelle, aucune incantation sacrée qui permette d'accéder à la même intensité et la même profondeur qu'une expérience psychédélique menée avec humilité, courage, respect et engagement. Il y a plus de spiritualité et d'enseignement dans une poignée de cactus ou de champignons que dans toutes les églises, les temples et les livres du monde.
Le vivant, c’est à dire la nature dans son infini Mystère, confie des choses étranges à qui lui prête toute son attention. Les grands mystiques ont tenté de l’exprimer de diverses manières.
Si nous prenons soin de ce qui nous effleure et entre dans notre champ de perception, il est quelque chose qui prend soin de nous et pourvoit à nos besoins. Puisque de cette même manière cela pourvoit aux besoins du plus grand nombre.
Nous pouvons nous réfugier dans un éternel scepticisme, il arrive un moment qui impose l’évidence d'une « loi de redistribution naturelle » qui vise à agir au bénéfice du plus grand nombre.
Rien ne nous parvient, matériellement ou spirituellement, si nous envisageons d'en arrêter le bénéfice à notre propre personne. Il s'agit de se mettre dans une disposition particulière, et propice à faire circuler tout ce qui nous parvient.
Quand on touche cela du bout des doigts, il n'y a pas besoin de temple, d’église ou de mosquée, de rituel ou d'intermédiaire. Cela est là, et cela coule en nous en ce moment même.
De ce fait, ce livre s’adresse avant tout à celui ou celle qui cherche, engagé·e dans une quête spirituelle ou sur le chemin du Soi. Celui ou celle qui désire explorer sa conscience, examiner le tissu de la réalité, redéfinir ce que nous percevons, ou con-naissons du monde. Celui ou celle qui cherche des réponses aux fameuses questions restées en suspens depuis des millénaires et auxquelles les religions ont souhaité mettre un terme en appliquant à tous, pour tous, des réponses et des règles, deve-nues dogmes, issues de l’expérience de quelques-uns, et surtout interprétées par d’autres dont les préoccupations, les intentions et les conclusions sont parfois très éloignées de l’expérience initiale. De cette expérience directe nous voulons bien extraire ce qui nous arrange, et dissimuler ce qui dérange : la possibilité pour cha-cun d’avoir accès à quelque chose dont l’existence est sujette à débat depuis des millénaires ; ce à quoi certains aiment donner une forme vaguement humaine, jusqu’à la nommer « Dieu », et lui prêter une attitude rédemptrice, curieusement soucieuse de nos préoccupations humaines.
D’autres, moins dogmatiques et plus ouverts, affirment que nous pouvons accéder à ce qui se cache derrière notre « réalité ordinaire », bien concrète, faite de tangible et de visible, par de longues méditations, une ascèse stricte – dont nous avons bien voulu oublier les fondements réels, et dont nous explorerons plus loin les raisons constitutives. Ceux-ci prétendent, à juste titre, que tout ce que l’homme a toujours cherché est là, à la fois sous nos yeux et en nous, et qu’il n’est besoin de rien, tout au plus d’appliquer quelques techniques millénaires, elles aussi. Comme le yoga, par exemple. Non pas celui que l’on pratique le plus fréquemment, de nos jours, pour se détendre après le travail et, enfin, s’offrir la possibilité de se déclarer comme une personne spirituelle, et que l’on décline à loisir pour l’adapter à une démarche toujours plus commerçante. Mais le yoga dans sa pratique de chaque instant, en dehors des salles de ville, celui qui commence dès que l’on quitte son tapis. Ce travail d’examen et d’observation de notre présence au monde, et dont les postures physiques ne sont que la face visible du gigantesque iceberg qu’est cette voie profondément liée à l’ingestion de plantes sacrées – psychédéliques ou enthéo-gènes –, comme nous en explorerons les preuves plus tard.