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3.41/5 (sur 26 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Agen , le 10/01/1974
Biographie :

Eloïse Lièvre est une écrivaine française.

Ancienne élève du Lycée Michel-Montaigne à Bordeaux et de l'École normale supérieure de la rue d'Ulm (promotion B/L 1993)2, Éloïse Lièvre suit des études de lettres modernes, de sociologie et d'histoire de l'art. Agrégée de lettres modernes, titulaire d'un doctorat portant sur l'ensemble de l'œuvre de Marivaux, elle enseigne depuis 2007 la littérature et les sciences humaines en classes préparatoires.

En 2009, elle fait partie de la sélection de l'« opération manuscrit » du magazine Tecknikart et présente au Salon du livre de Paris le texte de ce qui deviendra "La biche ne se montre pas au chasseur", publié en 2012.

Si ce premier texte relève de l'autofiction, le deuxième, "Les gens heureux n'ont pas d'histoire" (J.C. Lattès, 2016) assume l'autobiographie sous la forme d'un calendrier de l'avent accompagné de portraits photographiques personnels, écrit à l'occasion des quarante ans de l'écrivain.

En 2020, "Notre dernière sauvagerie" (Fayard), consacré à la place du livre dans la vie et à la valeur anthropologique et écologique de la lecture, mêle récit de soi, non-fiction, sociologie, anthropologie et analyse littéraire.

Elle a publié des textes dans les revues Espace(s), La Moitié du fourbi, Teste, La Piscine, Bonbek.
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Source : http://www.eloiselievre.fr/bio/
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"Notre dernière sauvagerie" d’Éloïse Lièvre par Cédrik Armen


Citations et extraits (32) Voir plus Ajouter une citation
Lorsque je rencontrai sur ma route urbaine, en plein hiver, nuit tombée déjà alors qu'il n'est pas si tard, le lecteur d'Alcools d'Apollinaire, penché, recueilli, semblant célébrer solitairement les cent ans d'une blessure de guerre, le titre du poème me revint soudain en mémoire, comme un éclat d'obus sur la tempe. L'"Adieu". Tout peut être relativisé, mais un mot est un passage secret. L'adieu, qui n'avait rien d'aussi dramatique ni d'aussi définitif que dans ces vers, était ce à quoi il fallait enfin se résoudre. (p. 74)
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Je monte dans la rame. Les gens sont debout, ils sont assis. Ils sont vêtus, apprêtés, chargés. Ils sont opérationnels. Ils sont exploitables et conformes. Ils ont toutes les formes, toutes les teintes de l'obéissance, de l'embrigadement compréhensif, de la conscience du nécessaire. Ils sont civilisés. Ils sont intégrés. Ils sont courageux. Mais je monte dans la rame et mon regard traque, j'ai besoin d'être rassurée, mon regard traque ceux qui ont quelque chose en plus, dont la modernité marchande a fait quelque chose de moins, ceux dont les mains expressives tiennent un livre ouvert, ces rectangles de reconnaissance (...) (p. 90)
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Le 12 décembre 2014, j'ai volé la première photographie. Ce ne fut pas seulement une source d'exaltation personnelle. Ce ne fut pas autre chose que l'amorce d'une résistance. (p. 18)
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Quand la vie commence la vie a déjà commencé. Nous sommes tout d'un coup, nous avons une seconde de vie, puis une minute puis une heure puis un jour. Nous sommes déjà nous-mêmes car ceux par qui nous sommes tiennent beaucoup à ce que nous soyons cet être-là, singulier, emmailloté dans leur fierté. Mais ce qui ne se dit pas, c'est que nous sommes aussi ce qu'ils sont, ont été, nouveaux-nés déjà vieux de leurs années, lestés. Nous sommes aussi ce qu'ils veulent que nous soyons, et une réponse aux attentes plus ou moins discrètes, plus ou moins impatientes, des grands-parents, les émerveillements ou les jalousies des oncles et des tantes, le serti d'une famille.
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Les mains du lecteur sont celles d'un berceur en même temps fervent, une espèce de prieur. La photographie saisit ce que peut-être le lecteur tient dans ses mains refermées, l'une dans l'autre, exactement ce que dit le titre du livre de Zafon : l'ombre du vent. (p. 139)
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Le 12 décembre 2014, j’ai commencé à prendre des photographies des gens qui lisent dans le métro.
Je sais pourquoi.
Au début, je voulais sans même qu’il le sache, donner tort à quelqu’un. Il pensait, entre autres catastrophes annoncées, que les gens ne lisaient plus. Je voulais accumuler des preuves contre cette conviction pessimiste qui veut que le livre soit menacé d’extinction, espèce parmi les espèces.
Ce quelqu’un était l’homme avec lequel je vivais encore, mon mari, que je n’identifierais bientôt plus que par la périphrase de l’inaliénable, le père de mes enfants. J’allais mal. Nous allions mal. Nous allait mal. Plus rien ne semblait avoir de sens. La phrase est figée, le constat blanc, protocolaire, mat. Elle énonce ce qui tient encore lorsque tout le reste vacille et finit par céder. Plus rien ne semblait avoir de sens que le délitement de ce qui avait duré, ce qui s’était construit, au bout du compte bancal, entre les étais de nos volontés. Nous avions été présomptueux comme tout le monde. Nous nous étions sentis protégés par nos ardeurs de conquête, la rapacité jeune, et notre certitude d’être différents, comme tout le monde, de savoir échapper à l’usure. On croit bien faire, mais c’est toujours comme ça, il faudrait prévoir qu’on ne peut jamais prévoir.
Nous nous séparions.
Ce n’était pas une décision qui aurait été prise, c’était un long mouvement de détachement. Nous nous séparions, nous commencions tout juste à nous séparer, nous n’en finissions plus de nous séparer.
Une rupture. C’est toujours soi, à l’intérieur de soi, que ça rompt.
Je voulais aussi, en prenant dans mes trajets quotidiens des photographies des gens qui lisent, trouver dans mon existence quelque chose pour tenir. Je me demandais : à présent, comment vivre ? Je me demandais : où trouver le sens ? J’étais un cerveau à ciel ouvert. Je pensais que l’action nous manquait. Non pas à nous seulement, ce nous-couple à présent découplé, mais à nous tous, dont les vies extérieures ressemblent à des colliers de perles. Ce n’était pas que l’action avait disparu, mais elle s’était absentée dans sa forme visible, dans sa forme pleine et digne. Elle avait mué, troqué son enveloppe ample contre une autre plus petite, comme dans une croissance à rebours, envers exact de l’expansion des gardes-robes d’enfants. Plus de décisions, plus de seuils, plus de franchissements grandioses, plus d’épique, plus d’élan plus loin que les vacances prochaines, la seule évasion qu’il nous restait, régulière, organisée, solennelle. Et jusque-là, le lent surplace des semaines. L’action ne s’inscrivait plus que dans des périmètres gardés, le confort d’un appartement, la familiarité d’un bureau, périmètres lacés des servitudes continuelles, douces quand bien même, puisque c’est commode les limites, les étroitesses, rassurant, le pré carré gestionnaire, administratif, intendant, changement d’échelle, changement à grande échelle, réduction, retranchement. L’action s’était abrégée en actes, puis en gestes, et de ces gestes, ce serait la répétition, cette répétition dont les corps en fatigue sont tous frères, qui tiendrait lieu de seule grandeur.
La vie, quel est son diminutif ?
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La bibliothèque des éboueurs d'Ankara a une soeur en France. Je tombe sur elle par hasard et c'est mon âme soeur aussi instantanément. Elle s'appelle la Bibliothèque Fantôme et son créateur Ludovic Cantais. Ludovic est artiste, photographe et réalisateur. Il s'intéresse aux objets, à l'abandon, à la poussière, tout ce qui fait vestige, trace. Un jour, il s'est mis à recueillir les livres abandonnés dans la rue. (p. 259)
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Des mains entrent dans le champ. Elles sont très pâles. Elles prolongent des poignets déliés et secs dont les attaches semblent graciles et sur lesquels les lumières artificielles déposent des alluvions plus clairs encore que la peau. Autour du poignet gauche, le bracelet brun d’une montre, où brillent deux micas. Ce sont des mains de femme. Elles jaillissent des manches d’un pull noir, débordant, lui, des manches d’un manteau sombre mais moins sombre, bronze. En vérité, des mains, on ne voit presque rien. Les pouces, ongles ras mais pas rongés, sur le bas de page, des poignets vifs, précis. Mains et livre sont posés sur un sac de toile beige dont un nombre et deux lettres visibles me permettent de deviner la provenance. Les mains tiennent le livre, fermement, elles l’agrippent comme pour forcer son ouverture. Je reconnais ce geste-là, un peu impérieux, un peu impatient, d’imposer au livre sa fonction, de vaincre la résistance de sa forme matérielle en faveur d’une relation impalpable, de la substance intactile des rêves, la lecture. Elle vient à peine de commencer ici, ce qui peut expliquer la petite insoumission concrète du livre, la courbe jolie, presque exaltée, tout près de la tranche, et le feuilleté de ses pages de gauche, un éventail de papier avide de liberté. Tout est presque noir autour. Mains, livre et sac font un îlot de clarté, et de cette enclave, le point culminant serait les pages ouvertes, planches de lumière où le lierre très sage des caractères d’imprimerie pousserait en treille, indéchiffrables pour l’observateur, comme le visage de la lectrice que la photographie se doit de réserver, et le titre de son livre que l’on ne connaîtra jamais. Mais le plus émouvant, ce sont les cinq fragments de lignes que la composition typographique et la respiration des paragraphes laissent blancs. Si l’on se concentre bien un instant, on arrive à ne pas voir que cela, ces canaux qui se jettent dans les marges ou les soulagent et irriguent le txte, ces trouées, ces persiennes désaccordées, ces sillons de labours excessivement parcellaires, ces rigoles pour l’écoulement du mystère, ces voies creusées pour tous, allée, impasse, appels d’air, des silences dont il faut faire chair.
C’est là qu’il faut être. Se glisser. Sur les livres, dans les blancs des pages, dans la lecture des lecteurs, il y a quelque chose encore à écrire.
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(...) et je me laisse obséder par cette formule en clair-obscur, héroïque et silencieuse, l'Armée des ombres, pour en revêtir les liseurs, nous, les veilleurs. (p. 84)
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Les livres sont des objets du monde. Concrets. Odeur des livres cette antienne, ils sentent le doux ou le duvet ou le grain exactement de leur toucher, le renfermé des séjours encartonnés, les déménagements, leur grand désordre durable, leurs égarements, les hivers caverneux, humides, les feux de bois de la maison d'enfance. (p. 76)
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