En Angleterre comme dans le reste de l’Europe, l’histoire de l’orgue, à partir du XVIe siècle, constitue l’un des chapitres les plus curieux et les plus importants dans les annales de la musique. De Taverner, un des plus anciens maîtres de cet âge, il a subsisté un nom et des œuvres manuscrites. Nous avons cité Tye avec Tallis : il y a lieu d’insister sur lui, surtout en sa qualité d’organiste. Il était en possession de cet emploi dans la Chapelle d’Elisabeth. Aussi indépendant que certains artistes germaniques dont nous
avons noté les réparties parfois assez peu civiles dans notre Histoire de la musique allemande, il ne craignit pas, un jour que la grande reine lui faisait dire « qu’il ne jouait pas dans le ton des chanteurs », de se borner à cette sommaire et péremptoire réponse : « Ce sont les oreilles de Sa Majesté qui ne se trouvent pas dans le ton. »
C’est en un passé légendaire, dans des régions appartenant, pour ainsi dire, à la tradition préhistorique, que l’on doit aller chercher, en Angleterre, les premières traces de la vie musicale. Les premiers musiciens anglais furent les bardes bretons, parmi lesquels émerge, au commencement du VIe siècle, Aneurin Gwandrydd. Ces artistes primitifs, à la fois poètes, compositeurs, et interprètes de leurs propres œuvres, étaient en même temps, comme tous les hommes de leurs tribus, des guerriers. Non seulement ils jouaient le rôle classique de Tyrtée, exaltant les âmes, adressant aux combattants une sorte d’éloquent et persuasif sursum corda, mais ils prenaient eux-mêmes part à la bataille.