AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782016189221
400 pages
Hachette Livre BNF (01/12/2016)
3/5   2 notes
Résumé :
Un monde qui s'en va : comme dans la vie (15e éd.) / par Albert DelpitDate de l'édition originale : 1890Le présent ouvrage s'inscrit dans une politique de conservation patrimoniale des ouvrages de la littérature Française mise en place avec la BNF.HACHETTE LIVRE et la BNF proposent ainsi un catalogue de titres indisponibles, la BNF ayant numérisé ces Œuvres et HACHETTE LIVRE les imprimant à la demande.Certains de ces ouvrages reflètent des courants de pensée caracté... >Voir plus
Que lire après Un monde qui s'en va : comme dans la vie 15e éd.Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce recueil de pages est une torture pour l'esprit, un supplice de mièvreries moralisatrices qui agressent l'intelligence et la patience.
Ce récit de crime et de remords aurait pu rivaliser avec Thérèse Raquin de Zola dans le même genre, mais hélas, l'auteur a préféré enrober son oeuvre d'un vernis mielleux, d'une couche de mièvreries qui gâche tout le plaisir de lecture.

Fils d'un banquier richissime qui a connu la faillite, Roland a été jeté comme un vieux chiffon après avoir été évincé de son poste d'enseignant. L'administration préférait donner sa place chaude à un protégé plutôt qu'à cet être doux, sérieux et méritant.
Il se morfond alors dans les bas-fonds parisiens, recherchant au hasard les mille et un petits boulots ingrats et mal payés. Pourquoi, lui dit-on, s'est-il lancé dans des inutiles études littéraires et à quoi bon maîtriser quatre langues différentes ? En ces temps industriels, quel service pouvait-il rendre ? Ses connaissances ne font qu'effrayer et éloigner ceux qui devraient l'admirer.

Une proposition des plus étranges s'offre à lui grâce à un ami : suivre une veuve américaine fortunée à travers les Etats-Unis pour lui servir d'interprète et de conseiller juridique afin de vendre et liquider les vastes domaines qu'elle possède.
Mme Readish, la veuve, semble toutefois plus s'intéresser à son nouveau compagnon qu'à ses propriétés. Elle le complimente outrageusement sur sa beauté, le déstabilisant dès les premiers instants. Mais derrière cette façade charmante se cache une personnalité profondément instable, sous l'emprise constante de la morphine et de l'alcool. Imprévisible et dangereuse, elle oscille entre joie soudaine, rêveries irréalistes, sommeil profond, et parfois même des crises de violences lorsqu'elle mélange alcool et médicaments…

À mesure que les crises s'enchaînent, Roland se sent de plus en plus insulté par la position humiliante qu'il occupe, lui qui a pourtant reçu une éducation supérieure. Toutes ces scènes à ce moment du roman sont intrigantes, originales, bien décrites et Mme Readish, personnage touchant malgré ses nombreux délires, est l'unique élément digne d'intérêt de ce roman.

Un soir, alors qu'ils se trouvaient au coeur du Far West américain, Roland, Mme Readish et sa domestique se retrouvent cernés par une horde de 25 cow-boys. Ces derniers, tout en gentillesse, mettent le feu à tout ce qui se trouve autour de la maison et s'approchent tranquillement.
Pendant ce temps, la droguée Mme Readish est totalement hors d'elle-même, venant tout juste de doubler sa dose de morphine et d'alcool.
Elle commence à gifler et à battre sa servante, la traînant par les cheveux jusqu'au milieu de la pièce. Mais fort heureusement, Roland ne manque pas de courage et, faisant preuve d'un admirable sang-froid, parvient à tenir tête aux 25 cow-boys quelque temps tout en maîtrisant la folle furieuse qui était en train de massacrer sa servante sans raison. Après avoir maîtrisé un instant Mme Readish par la force, il s'agenouille pour recueillir doucement le corps presque inanimé de la pauvre domestique.

Ce pauvre Roland, dépassé par les événements, se retrouve pris entre deux feux : d'un côté une femme folle, dangereuse, droguée qui s'en prend directement à lui, veut l'étrangler et lui lance même un couteau et de l'autre une horde de bandits armés s'approchant lentement. Il cède à la panique, perdant lui aussi son contrôle et étrangle violemment sa protectrice sans réaliser la gravité de son geste. Elle semblait s'évanouir mais était décédée.

Le pillage se poursuivait impitoyablement, tandis que Roland, victime d'une blessure à l'épaule, tomba évanoui. À son réveil, il découvrit avec effroi le cadavre de Mme Readish. Tout en tâtant le pouls de son coeur inerte, confirmant ainsi son funeste sort, il décela en outre une enveloppe attachée à son collier. Débordant de billets de banque, celle-ci renfermait une fortune colossale, plusieurs millions qui allaient changer à jamais son destin.

Qui aurait pu se douter de ce qui se cachait derrière la fortune de Roland ? Héros malgré lui d'une nuit mouvementée dans le Far West, acclamé par les habitants locaux pour sa bravoure face à une horde de cow-boys, il rentre en France auréolé de gloire par les journaux.
Il eut en outre l'habileté d'investir patiemment cette fortune sans éveiller les soupçons, puis créa une banque, démultipliant sa fortune à l'abri des regards. Désormais, il est devenu l'un des hommes les plus riches et respectés de la capitale, sans que personne ne sache d'où vient réellement sa fortune.

Si j'ai pris le temps de décrire en détail les événements du crime dans ce roman, c'est parce que je ne suis pas du tout d'accord avec l'analyse pudibonde et même d'un dangereux puritanisme fanatique de l'auteur.

Après avoir savamment orchestré les conditions idéales pour un "vol" qui ressemble plutôt à la découverte fortuite d'un trésor (d'un point de vue strictement moral, non juridique) l'auteur qualifie l'affaire de "crime" et va jusqu'à parler « d'assassinat » pour la mort de Mme Readish.
Une exagération totalement déplacée, puisqu'il ne s'agit en réalité que d'un simple homicide involontaire, au pire une maladresse excusable compte tenu des circonstances éprouvantes de l'attaque par 25 cow-boys.

Je suis indigné face à l'attitude condescendante de l'auteur. Après toute cette intrigue rocambolesque, il dédaigne les 1000 circonstances atténuantes, tant juridiques que morales, et traite sans pitié son personnage principal de criminel.
Le lecteur, qui ne peut qu'avoir envie de compatir s'il est un être normalement constitué, qu'il soit sincèrement religieux ou non d'ailleurs, va devoir subir la longue et injuste expiation de l'auteur sur ce personnage principal, semblant indirectement dire : « Toi, lecteur, qui aurait pu faire pareil, sache que tu n'es qu'un vaurien. Continue la lecture de mon roman afin de savoir quel châtiment, quelle interminable expiation je réserve à des sous-hommes de ton espèce… » Même les auteurs les plus profondément catholiques comme d'Aurevilly n'auraient jamais pu pondre une telle morale aussi navrante de stupidité et d'une implacable sévérité qui tend à l'idiotie.

Dans tout son être, Roland dégageait l'honnêteté, la franchise et la droiture. Mais cela n'a pas empêché l'auteur de le condamner pour ne pas avoir remis les millions à son unique héritière. Mais pourquoi ? L'héritière n'était pas dans une situation financière désespérée et les cow-boys auraient bien pu dérober cet argent. Et puis, n'a-t-il pas mérité ce trésor pour avoir fait preuve d'un courage exemplaire en tentant de défendre deux femmes contre 25 cow-boys ? En réalité, Mme Readish, dans son état d'ivresse et de toxicomanie, a causé sa propre mort en s'attaquant à Roland alors même qu'il tentait de les protéger. C'est si ironique et absurde de lui reprocher un assassinat… Et pourtant, le stupide auteur n'hésite pas à le faire et à lui infliger une lourde expiation… Quoiqu'on dise des moeurs de son temps, de la foi de l'auteur… Cela reste totalement abêtissant et inhumain tant la morale est idiote — ce roman est véritablement nocif de bêtises.

Le reste de l'ouvrage est dépourvu de toute singularité, à l'exception d'un élément notable : le héros se marie sans le savoir avec la fille de Mme Readish, et lorsque le voile se lève sur la véritable identité de sa conjointe, il est accablé par des remords indescriptibles.
Les personnages sont fades, sans profondeur émotionnelle sincère, et le livre se perd dans une morale pesante qui plombe toute la seconde moitié du récit. C'est navrant.

L'absurdité de la situation se renforce : l'un des cow-boys impliqués dans l'attaque de la propriété de Mme Readish est condamné aux Etats-Unis à une ridicule peine 4 ans de prison pour avoir pris part au meurtre de cette dernière (l'auteur explique que cette sentence clémente fut décidée par la justice par crainte de représailles des cow-boys).

Une fois sa peine purgée, que fait ce criminel endurci, qui a participé à des années de pillages et d'agressions en tout genre ? Se réjouit-il de sa liberté retrouvée et se montre-t-il reconnaissant envers la justice et la société pour sa peine légère ?
Bien sûr que non !... L'auteur nous invente un crétin de cow-boy, qui, au lieu de se réjouir d'être sorti si vite de prison, ne cesse de protester contre son injuste procès pour homicide ! Un cow-boy !…
Il est ahurissant de voir comment l'auteur a pu transformer un vulgaire criminel en une victime.
Ce cow-boy, sans scrupules, a été condamné sur un mauvais motif, soit, mais sa peine fut miraculeusement légère et au mieux, il purge indirectement cette peine non pour homicide mais pour pillage, et aussi pour les centaines d'autres crimes commis auparavant et restés impunies, qu'a-t-il donc à se plaindre et à gémir sans cesse sur son sort ?

Il est persuadé que Roland est le véritable coupable, sans aucune preuve concrète. Peut-être que cette femme est morte des suites d'une surdose de morphine et d'alcool, ou peut-être a-t-elle été tuée par un autre cow-boy ou même par sa domestique, tout cela eut été plausible.
Mais non, ce cow-boy a la certitude absolue que Roland est le véritable coupable et part en France dans l'unique but d'assouvir sa vengeance. C'est à croire que l'auteur veut nous faire prendre des vessies pour des lanternes…

Après des rebondissements peu crédibles et bâclés par l'auteur, celui-ci tente de nous faire avaler l'idée qu'un cow-boy mal dégrossi, sans grande fortune, ait pu pénétrer l'élite parisienne dont faisait partie Roland, et ainsi s'en rapprocher et le retrouver.

Mais voilà que tout tourne au fiasco lorsque Roland, ayant compris que le cow-boy était sur ses traces et que sa vie était en danger, l'élimine à temps. C'était bien légitime ! Tout au plus, pourrait-on lui reprocher, sur le plan pénal, de s'être fait justice soi-même, et c'est tout, mais absolument rien d'immoral, au contraire. Toutefois, l'auteur, dans une inversion totale des valeurs, transforme cela en un second crime ! Quelle absurdité !

Lorsque la soeur de Roland apprend la vérité, elle perd toute admiration pour son frère et se livre à une tirade interminable, aussi criarde que faussement dramatique, dégoulinant de mièvreries. Elle ne manifeste aucune compassion pour son frère et préfère se complaire dans sa propre détresse. Quelle comédie !

Et pour couronner le tout, dans la lignée des romans du XIXème siècle où tuer le personnage principal était un moyen facile de conclure, Roland meurt finalement d'épuisement, rongé par ses remords jusqu'à la mort.
Si seulement le style était remarquable… Mais hélas, le style est neutre, ni bon ni mauvais.

Ce livre est insupportable de mièvreries moralisantes… Heureusement qu'on y trouve quelques idées ingénieuses et qu'on est intrigué par l'étrange Mme Readish, car le reste est affligeant.
Commenter  J’apprécie          910


Les plus populaires : Littérature française Voir plus
Livres les plus populaires de la semaine Voir plus


Lecteurs (3) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2886 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *}