"Jamais" est entré dans ma vie pour y rester. "Jamais" semble si injustement punitif. Pour le restant de mes jours, je vivrai en tendant les mains vers des choses qui ne sont plus là. (p. 66)
Parce que j’aimais tant mon père, que je l’aimais si farouchement, si tendrement, j’ai toujours, dans un coin de ma tête, redouté ce jour.
Mais, anesthésiée par sa relative bonté, je croyais que nous avions le temps. Je croyais que le moment n’était pas encore venu. « J’étais persuadée que Daddy était parti pour être nonagénaire », dit mon frère Kene. Nous l’étions tous. Peut-être aussi avions-nous cette croyance déraisonnable que sa bonté, le fait que c’était quelqu’un de tellement bien, allait le maintenir parmi nous bien au-delà de ses quatre-vingt-dix ans.
"Un ami m'envoie une phrase de mon roman : "Le chagrin était la célébration de l'amour, ceux qui pouvaient ressentir un véritable chagrin avaient la chance d'avoir aimé." Comme c'est étrange que la lecture de mes propres mots me cause une douleur si exquise."
Dénégation de sa femme : « Mais il ne m’a rien dit ». Parce qu’il lui aurait dit. Ils étaient comme ça. S’il avait été sur le point de nous quitter pour toujours, il le lui aurait dit, donc le fait qu’il ne le lui ait pas dit signifiait que ça ne pouvait pas être vrai.
Le chagrin n'est pas vaporeux; il a du corps, il est oppressant, c'est chose opaque. Son poids est plus lourd le matin, après le sommeil (...)
Je ne reverrai jamais mon père. Jamais plus. J'ai l'impression de ne me réveiller que pour sombrer, encore et encore. A ces moments-là, je suis certaine de ne plus jamais vouloir faire face au monde. (p. 41)
"Le chagrin est un enseignement cruel. On apprend combien le processus du deuil peut être brutal, combien il peut être lourd de colère. On apprend combien les condoléances peuvent paraîtres creuses. On apprend combien le chagrin est question de langue, l'échec de la langue et la tentative de s'y raccrocher."
Le chagrin n'est pas vaporeux ; il a du corps, il est oppressant, c'est chose opaque.
Ma mère dit que des veuves sont venues lui expliquer la coutume. Tout d'abord, la veuve aura la tête rasée-sans la laisser continuer, mes frères s'empressent de dire que c'est ridicule et qu'il n'en est pas question. je dis que personne ne rase jamais la tête des hommes quand leurs épouses meurent, personne n'impose aux hommes de manger frugalement des jours durant, personne ne s'attend à ce que les corps des hommes portent l'empreinte de leur perte. Mais ma mère dit qu'elle veut tout faire: "Je ferai tout ce qui se fait. Je le ferai pour Daddy." (p. 80)
Le chagrin est un enseignement cruel. On apprend combien le processus du deuil peut être brutal, combien il peut être lourd de colère. On apprend combien les doléances peuvent paraître creuses. On apprend combien le chagrin est question de langue, l'échec de la langue et la tentative de s'y raccrocher. (p. 15)
Le chagrin est un enseignement cruel. On apprend combien le processus du deuil peut être brutal, combien il peut être lourd de colère.