J'adore cette maison d'édition, le passager clandestin. J'ai d'ailleurs eu le grand plaisir de les rencontrer au salon du livre féministe 2024 et j'ai ainsi pu découvrir d'autres collections que « dyschroniques ». de belles lectures à venir.
Au début de ma lecture, je n'étais pas complètement convaincu, une histoire de guerre entre des civilisations dans des galaxies éloignées... Ce n'est pas forcément le genre de lecture vers lequel je me tourne habituellement.
Mais très vite, le propos sous-jacent de l'auteur
Poul Anderson apparait et la critique de la société terrienne et même occidentale est de plus en plus claire.
Pour recontextualiser, le texte date de 1950.
Après une guerre entre deux peuples, le temps de la reconstruction arrive. Une troisième civilisation plus avancée et dominante dans tous les domaines, les soliens (ou terriens), propose son aide. L'une des civilisations y aura accès Cundaloa, pas l'autre Skontar. le négociateur de cette dernière est visiblement le seul responsable de cet échec et son peuple devra en subir les conséquences. Etait-ce une si grande erreur ?
Progressivement, nous voyons les soliens conditionner leur aide à des changements de plus en plus importants de la civilisation de Cundaloa. Leur langue est trop compliquée pour interagir avec les soliens, ils devront l'abandonner ou largement la modifier ; leur monnaie n'est pas pratique, pourquoi la conserver ; leurs unités de mesures ne conviennent pas aux scientifiques et industriels soliens, elles devront changer, etc, etc, etc. Rien ne va dans cette civilisation poétique et au mode de vie doux, tout devra être réformé pour toujours plus de productivisme.
De l'autre côté, Skontar n'ayant pas eu accès aux subsides soliens, s'est reconstruite seule et a pu évoluer à son rythme et garder son identité.
Au final, après quelques décennies, lorsqu'il s'agira de comparer les deux anciennes ennemies. Cundaloa sera devenue une sous-civilisation de Sol alors que Skontar aura gardé son âme et aura évoluer de façon plus raisonnée et plus raisonnable mais pas moins efficace.
Il y a clairement une critique du modèle hégémonique américain dont le modèle s'est imposé progressivement après guerre, notamment grâce au plan Marshall permettant à la fois de reconstruire une partie de l'Europe mais également d'ouvrir largement les marchés européens pour la diffusion des produits industriels et culturels étasuniens.
C'est aussi l'opposition entre les deux blocs de la guerre froide que l'on observe avec des trajectoires et des visions différentes.
Une belle lecture de ce livre trouvé dans les rayonnages de la super librairie de Saint-Pierre-des-corps « L'oiseau vigie ».