Citations sur L'Attente du soir (59)
Mais quitter le cirque, quitter la grande roue en marche, c’était déjà mourir un peu, passer de l’autre côté, dans la lumière blanche et froide du jour, alors que nous autres ne vivons que dans l’attente du soir et de la lumière chaude des projecteurs, des bougies fébriles des roulottes ou de l’éclat fantastique du feu de camp, au bivouac des grands chemins. (p. 90.)
J'étais donc là quand la lettre arriva.Ma mère l'ouvrit et cria pour appeler mon père qui se rasait.C'était inhabituel, mes parents ne se parlent jamais le matin, sauf le dimanche.J'avais déjà mon cartable au dos pour partir à l'école, ma mère ferma la porte et dit: "tu restes ici".
Le môme ne sait pas que les herbes immenses sont des arbres.
Accroupi de dos à la palissade, il les regarde et il voudrait les serrer dans ses bras, planter ses dents dedans, même si c'est du marron qu'il aime un peu moins que les autres couleurs.
Ils sont trois à parler à tour de rôle, trois marginaux en bord de monde.
Il y a d'abord Giacomo, vieux clown blanc, dresseur de caniches...
Il y a la femme grise sans nom, de celles que l'on ne remarque jamais...
Et puis il y a le môme, l'enfant sauvage qui s'élève seul...
On ne cueille pas les coquelicots si on veut les garder vivants.
Qui décide des couleurs sinon l'oeil, sinon le regard ? eh bien le regard, on ne 'avait pas posé sur moi, jamais, je l'ai assez répété et je ne m'en lamente pas, et sans regard je n'avais pas pris vie, je restais un pantin de bois, et c'était bien trop tard maintenant.
Il fallait sortir, il fallait de la lumière et des choses claires, u fallait se débarrasser de cet onirisme comme de la boue sur des chaussures et reprendre pied. Le trouble et l'abandon ne doivent pas être déposés dans tous les coeurs. Il n'y a personne pour vous en relever après. Dehors, la nuit était déjà là.
... l'enfant et moi étions chacun es morceaux d'un pont démoli, ce pont, il fallait le reconstituer pour que la poésie le traverse et que le spectacle continue.
Je crois qu'on devrait choisir chacun son nom et ne le dire à personne, libre aux autres ensuite de vous appeler comme ils l'entendent, de mettre ce qu'ils veulent dans les quelques syllabes dont ils usent à votre égard. Pourquoi les parents seraient-ils les seuls à donner un nom ? Pourquoi les parents auraient-ils le droit de limiter le champ infini des noms possibles, sans que l'on puisse protester.
Quand un évier est bouché, on dévisse la bonde et puis on essaie de sortir ce qui fait obstacle ; d’abord on tire quelques cheveux, des poils de caniche ou un bijou, et puis l’ensemble vient, une grosse liane de détritus noirâtres, interminable, ensuite l’eau coule à nouveau, claire et chantante. Eh bien, le neuvième jour, des mots se sont affolés dans ma bouche et en sont sortis en liane comme si je vomissais.