Églantine, à l’école, faisait de rapides progrès et cela sans se donner la moindre peine. Jamais on ne la voyait étudier. Elle lisait sa leçon une fois et ne l’oubliait plus. Elle comprenait avant qu’on ait fini de lui expliquer, mais il lui fallait toujours aller au fond des choses. Et s’il lui arrivait de lire ou d’entendre un mot qu’elle ne comprenait pas, elle le tournait et retournait dans sa tête jusqu’à ce qu’elle en ait trouvé la signification.
Cet amour a poussé ses racines dans ton cœur trop jeune, trop tendre ; elles sont maintenant fortes et vivaces, et rien ne peut les déraciner. Et comment donc feraient d’autres racines pour s’insinuer dans ton cœur ? Celles-ci ont pris toute la place.
L’impossibilité de faire de la musique, jointe à la perte d’une société aimable, est une peine qui s’appuie à l’ancienne pour l’augmenter et faire, d’une jeune fille intelligente et tendre, une créature solitaire et ne vivant que de mauvais souvenirs.
Ils l’aiment, cette clairière dont tous les arbres leur sont familiers. Il n’en est pas un sur lequel ils n’aient grimpé autrefois. Peut-être, dans leur léger sommeil, rêvent-ils qu’ils sont redevenus enfants et qu’ils jouent à cache-cache dans les plus hautes branches.
Mais ce qu’elle aime surtout c’est son jardin secret. Un jardin où elle peut entrer de jour comme de nuit, ainsi que fêtes et dimanches, sans risquer, jamais, d’y rencontrer personne. Un jardin de souffrances dans lequel elle se plaît à cultiver des larmes chaudes, des regrets amers, des appels éperdus et des désespoirs sans limite. Elle y cultive encore une pensée active qui s’égare jusqu’à l’angoisse, un cœur tout broyé qui ne veut pas cesser de battre, et une âme désolée qui rôde et crie miséricorde.
"Marc Lumière, mort à vingt-deux ans."
"Églantine, sa femme, morte à dix-neuf ans."
Le cadre bien essuyé et remis en place, elle regardait encore son père et sa mère. Elle ne savait quelle ombre les enveloppait et les séparait d’elle, comme s’ils avaient voulu vivre et mourir pour eux deux seulement.
Le trois mai, au matin les coqs ont chanté sa naissance, et au soir tombant la cloche de l’église a sonné le glas pour son père et sa mère.
Les glaces m’ennuient. On y voit trop ses défauts.
Autrefois j’étais un être perdu dans le monde. Mes plaintes n’éveillaient aucun écho. Maintenant toutes mes pensées vont frapper à votre cœur. Je sens que là est la source de ma vie, et j’ai besoin d’y puiser souvent.
Que ce soient chants de douleur ou chants de triomphe, à la longue cela devient un métier que l’on fait sans y penser.