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sur 665 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
°°° Rentrée littéraire 2019 #25 °°°

Rouch, je suis soufflée et très impressionnée par l'audace dont fait montre cette jeune auteure argentine qui ose un premier roman au postulat de départ complètement dingue : le cannibalisme légal.

Dans un monde d'anticipation qui ressemble furieusement au nôtre, les animaux ont été décimés par une pandémie, la GGB ( Grande Guerre Bactériologique ), rendant la consommation de leur chair impossible. Les autorités du gouvernement de type totalitaire ont convaincu la population de manger de la viande humaine.

Cela fait très longtemps que je n'avais pas lu des pages au bord d'un malaise quasi nauséeux ( depuis certaines scènes des Bienveillantes, je pense ) et j'ai la couenne plutôt coriace en général. Mais là, dès les premiers mots «  Demi-carcasse. Etourdisseur. Ligne d'abattage. Tunnel de désingection. », uppercut direct, pas de préliminaires lubrifiants ton esprit pour le préparer au choc. le descriptif minutieux, clinique, du développement industriel de la consommation de chair humaine, de l'élevage à l'abattage, est insoutenable.
L'écriture d'Agustina Bazterrica est polysensorielle, au fil des mots, des visions, des odeurs surgissent, des sons aussi, tu as beau les refouler, ils sont bien présents, et tenaces. Oui. Tous les lecteurs ne pourront pas supporter ou n'auront pas envie de s'y plonger. Normal.

Normal, mais j'ai pourtant dévoré ( ha ha ) ce roman en quelques heures. Pas par masochisme mais parce que derrière l'atroce, il y a du fond. L'horreur n'est pas gratuite juste pour jouir de son caractère quelque peu fascinant.
Agustina Bazterrica décrypte avec pertinence les ressorts du totalitarisme comme la propension du quidam à croire un discours officiel et à accepter de faire des choses inimaginables sans se poser plus de questions de cela sur la propagande déversée qui présente cela comme une solution à la pauvreté ou la surpopulation. La novlangue de ce cannibalisme institutionnalisé censure des mots perçus comme aussi subversifs que le fait d'avoir des relations sexuelles avec un de ces êtres humains élevés pour être manger : on ne peut plus dire « homme » mais «  tête », on parle de «  viande spéciale », d'"extrémité supérieure » pour éviter le mot « main » etc.

Derrière cette façade totalitaire, on peut également lire une critique sans concession de notre société de consommation tout court, bien évidemment de la consommation de viande et des méthodes actuelles d'élevage et d'abattage des animaux, même si le pamphlet vegan va bien au-delà de ce simple point.

Tout est dérangeant dans ce roman, mais ce qui est évident, c'est le talent de cette auteure pour construire avec brio un récit glaçant, pour nous faire accepter comme réel un postulat ignoble et dingue. La montée vers l'horreur finale est d'autant bien maitrisée qu'elle s'appuie sur un personnage principal à laquelle notre empathie s'accroche comme une bouée lumineuse dans le chaos. On a tellement envie de voir en lui un peu d'humanité que la fin nous cueille, terrible.
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"Après tout depuis que le monde est monde, nous nous mangeons les uns les autres. Quand ce n'est pas symboliquement, nous nous dévorons littéralement."

Cannibalisme : comportement qui consiste à manger les individus de sa propre espèce (nous ferons ici la différence avec l'anthropophagie).

Et si tel était notre devenir : consommer notre propre chair. le cannibalisme ne serait-il pas le prix à payer pour toutes nos années de carnivorisme effréné, toutes ces années passées à dévorer et à nous régaler de la chair carnée des animaux de notre écosystème ?

"Si tous les abattoirs avaient des murs en verre, tout le monde serait végétarien". Cette citation postée récemment par Snail11 sensibilise à l'urgence de prendre soin de notre planète et de l'espèce animale, elle fait funestement écho à la réflexion qui émane de ce tout premier roman d'Agustina Bazterrica.
Bien évidemment, il n'y a pas de murs en verre sur l'un des nombreux abattoirs dans lequel travaille Marcos Tejo, le personnage principal de ce roman, et le monde est loin, très loin même, d'être devenu végétarien, oh que non, il mange sa propre chair, la chair de ses semblables !

Comment le monde que nous décrit Agustina Bazterrica a-t-il pu en arriver à une telle extrémité ?
Des humains triés, sélectionnés et élevés pour remplacer les animaux comestibles qui ont tous été décimés par un virus après la GGB (la Grande Guerre Bactériologique) ; des humains prêts à être consommés (comme nos poulets de batterie ou label rouge) sous l'appellation certifiée conforme de "viande spéciale", "bavette spéciale", "côtelettes spéciales" car oui, tout est bon chez l'humain quand il arrive pour être traité et subir l'ignoble processus de transformation sur les lignes d'abattage de la société KRIEG, située quelque part en Argentine ou ailleurs, pour laquelle Marcos Tejo officie en tant que bras droit de son dirigeant.

Chaque jour qui passe, il supervise, il sélectionne ces hommes, ces femmes, pour n'en garder que le meilleur : la femelle PGP (Première Génération Pure), élevée en captivité sans avoir subi aucune modification génétique (cela ne vous rappelle rien ?). Puis il y a les autres, les laitières, les gestantes, les non-gestantes, les mâles excitateurs, les obèses (gavés comme des oies, vendus à des abattoirs spécialisés dans le traitement de la graisse), certaines "têtes" comme il les appelle, seront quant à elles destinées à l'élevage pour la transplantation d'organes ou pour la fabrication de sacs et de chaussures pour madame.

Marcos Tejo est un homme sombre, taciturne, il porte sa douleur et son histoire familiale comme on porte un fardeau. Il n'attend plus rien de la vie. Comment pourrait-il en être autrement quand on a perdu un enfant et que l'on ordonne chaque jour qui se lève la mise à mort de son semblable et que l'on porte en permanence sur soi l'odeur âcre du sang, l'odeur de la mort.
Mais la vie de Marcos Tejo va prendre une tournure des plus inattendues : en recevant pour cadeau une femelle PGP, il va commettre l'impensable car finalement ne lui offre t'on pas là le moyen de pouvoir réparer le passé ?

La vision de l'autrice est brillante, son récit fascine comme il répulse. L'écriture est incisive et dissèque sans le moindre détour l'inconcevable, l'indicible. Car qui pourrait supporter de vivre dans un monde où l'on peut élever une "tête" à sa guise, chez-soi, et la consommer petit bout par petit bout alors qu'elle est encore vivante ? Un monde dans lequel les chasses à l'homme sont autorisées et même très prisées des gens de la haute, un monde laissant libre cours à l'hypocrisie et aux pires formes de déviances qui soient...

En nous livrant cette dystopie remarquable Agustina Bazterrica pointe du doigt le carnivore qui est en nous. Les atrocités qu'endurent les humains tout au long de son récit ne sont que le reflet de ce que nous faisons subir aujourd'hui aux animaux que nous consommons. Elle nous rend la monnaie de notre pièce, elle nous confronte à nos propres crimes et pour cela elle nous sert directement sur un plateau le châtiment sur mesure qui sonne comme un retour à l'envoyeur. Et cerise sur le gâteau, elle nous offre un final inattendu. Bravo !

* Je remercie HundredDreams grâce à qui j'ai découvert l'autrice.
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Un roman aussi magistral qu'atroce, voilà comment je résumerais cette histoire qui nous met une sacrée boule au ventre, du début à la fin.
Magistral parce que l'écriture est somptueuse, parfois froide, presque clinique, à l'image des techniques d'abattage pratiquées dans le roman.
Et parfois empreinte d'une touche de poésie et d'une immense humanité.
Atroce, parce que l'homme est capable du pire, surtout quand il croit que tout se justifie, quand il fait en sorte que les mots et la terminologie se mettent au service de la barbarie.
Je l'ai lu d'une traite, parce que le récit est fascinant et aussi pour en finir vite, car bien que profondément addictif, ce roman met aussi extrêmement mal à l'aise.
L'histoire est assez simple, un virus a anéanti tous les animaux et une nouvelle race de bétail est donc désormais élevée en vue de nourrir la population du monde entier. Mais ces animaux d'un genre particulier ne sont autre que des humains, des hommes, des femmes et des enfants qu'on a fait naître et qu'on a élevés pour être mangés voire pire.
Ce roman nous met face à nos comportements les pires, à ce que l'homme a été capable d'infliger à ses semblables au cours de l'histoire pour des raisons idéologiques et à ce qu'il serait tout à fait capable de refaire si les conditions étaient réunies pour qu'il se sente légitime à le refaire.
Un immense merci à Babelio et aux éditions Flammarion pour cet envoi.
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J avais un peu hésité avant de lire ce roman. J avais peur de ne pas tenir le choc mais une critique d une amie m a fait sauter le pas.
Oui j ai adoré cette histoire. J aime beaucoup les dystopies. J ai trouvé l histoire proposée par Agustina Bazterrica très audacieuse et en même temps cohérente et plausible. Mon côté bisounours ne m empêche pas de voir que l homme peut être cruel ( je connais pas d espèce animale qui torture par exemple). En cas de grosse famine, je pense que certains pourraient franchir la ligne blanche et finirent pas bouffer leur voisin.
Apres la grande guerre bacteriologique, les animaux ont été atteints par un virus mortel transmissible à l homme . Il fallut donc tuer tous les animaux y compris les chiens et chats. Puis une nouvelle race de "viande comestible" fut créée à partir de génomes humains. On suit tout le processus de cette viande avec Marcos tejo qui travaille dans un abattoir. Lui ne mange pas de viande. Mais son père est devenu sénile et pour payer les frais de la maison de retraite, il faut ce travail qu il déteste. Sa femme s est réfugiée chez sa mère suite au décès de leur nourrisson. C est donc un homme brisé auquel on s attache parce qu il semble avoir gardé une part d humanité en lui. On suit ses pas dans sa journée de travail et on découvre l horreur mais racontée avec distance, froidement, sans trop en faire. On rit jaune devant tant d hypocrisie. On ne parle plus de mains mais de membres supérieurs . On ne parle pas de femme enceinte mais de femelle gestante.
Dans sa vie compliquée, va se rajouter un problème épineux. Un cadeau pour le moins surprenant : une femelle de premier choix. Que va t il bien pouvoir en faire?
Ce n est pas une lecture facile mais j ai dévoré ce livre. En espérant que cela reste de la pure fiction et pas de l anticipation.
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Lire ce 'Cadavre exquis' revient à regarder jusqu'au bout une vidéo de L214, sans baisser les yeux. En transposant un tout petit peu : les animaux entassés, détenus en cage et abattus ici ne sont ni des porcs, ni des volailles, mais des hommes, des femmes, des enfants humains.
On les appelle des 'têtes' et on leur a coupé les cordes vocales, histoire de vaincre les résistances des consommateurs les plus sensibles :
« Certains mots dissimulent le monde. Il y a des mots convenables, hygiéniques. Légaux. »

Dans cette histoire de cannibalisme organisé, l'exploitation de l'homme par l'homme, poussée à son paroxysme, perturbe à plus d'un titre.
D'abord parce qu'elle pose la question de la hiérarchisation entre humains - qui existe déjà (cf. organisation du travail à l'échelle mondiale, prostitution, sort des plus précaires…).
Ensuite parce que toutes les pratiques relatées ici ne sont que la transposition du sort subi par les animaux, pour la recherche, les loisirs et évidemment la consommation de viande (le nec plus ultra étant la chair vivante ou celle de 'petit'). Cet aspect montre d'ailleurs à quel point la bouffe qu'on nous vend est malsaine et trafiquée - mais ça, ça serait presque un détail tant le reste du propos interpelle.

D'abord parasitée par les ressemblances entre cet ouvrage et 'Dîner secret' (Raphael Montes), j'ai de plus en plus admiré la plume de l'auteur, son talent pour nous plonger dans ce portrait immonde d'une société en dérive et nous rendre le personnage central terriblement touchant dans ses ambivalences.

« Après tout, depuis que le monde est monde, nous nous mangeons les uns les autres. Quand ce n'est pas symboliquement, nous nous dévorons littéralement. La Transition nous a offert l'opportunité d'être moins hypocrites. »

Merci Babelio, merci Flammarion pour cette découverte en avant-première !
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Voilà un livre glaçant qui peut faire penser sur certains points au superbe roman « la route » de Cormac McCarthy.
Ce livre dénonce avec beaucoup de violence les « mangeurs de viande » et est sans doute censé nous faire réfléchir sur nos pratiques alimentaires.
Après l'hécatombe des animaux suite à l‘arrivée d'un virus mortel , l'anthropophagie se met en place pour faire face à cette pénurie de viande animale. Des règle s'instaurent , s'affinent et s'affichent au grand jour avec l'accord de l'Etat. La critique acerbe de notre système capitaliste est excellente, je me suis régalée, si je puis dire !!!...
Alors, oui, certaines scènes sont gores, mais elles sont décrites avec froideur et un tel détachement qu'on arrive à les lire avec un certain recul sans être complètement affecté par cette barbarie . Cela n'empêche aucunement d'être saisi par l'horreur de notre société de consommation prête à tout pour assouvir son goût pour la viande.
Bien que non spécialiste, j'ai été fascinée par cette dystopie qui fait froid dans le dos car crédible.
Je suis bien contente d'avoir prévu une soupe de légumes pour ce soir ;-), et non, non non, pas un petit morceau de viande va venir agrémenter cette soupe !!!...
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La viande... Vous la préférez saignante ou à point ?
La viande animale penserez-vous automatiquement... Que nenni ! Ici, il est question de viande humaine !

Il n'est plus question de manger des animaux, car ils ont contracté un virus mortel pour les humains.
N'étant plus consommables, tous les animaux de la planète sont donc exterminés, même les animaux domestiques.
Ne sachant pas se passer de viande, le cannibalisme a été mis en place avec les mêmes procédés :
Élevages d'humains, abattage, ect..
À ces humains, les cordes vocales leur sont enlevées. Parce que personne ne veut qu'elles parlent... Car la viande ne parle pas.
Il est nécessaire de les rendre animales pour éviter d'entendre leur cri lorsque la mort se présente à eux.
Et puis ici ils ne parlent pas de viande humaine, mais plutôt de "viande spéciale". Il ne faut surtout pas donner de nom humain à cette viande...
Ça ne vous rappelle pas quelque chose que l'on connaît déjà actuellement ? La dissociation de la viande à l'animal ? (viande de porc au lieu de cochon par exemple)

Le mot cadavre du titre de l'ouvrage correspond selon moi aux deux êtres vivants. Humains et non humains. Parce que oui, ce sont bien des morceaux de cadavre.
(Définition du mot cadavre : c'est ce qui reste du corps d'un organisme vivant humain ou animal dans la période qui suit la mort).

Dans cet ouvrage, nous suivons Marcos, chargé de vérifier la qualité des produits commandés par l'abattoir pour lequel il travaille.

Comme pour les animaux, ici, il est question d'abattoirs, d'élevages, de chasse, de laboratoires, d'humains domestiques, etc.
Ce livre reflète parfaitement le quotidien des milliers d'animaux.
Ici, il est question d'humains, donc des êtres comme vous et moi. L'empathie va donc de soi.
Mais lorsque l'on parle d'animaux, notre empathie diminue parce que dans la conscience collective, ils ne sont pas comme nous.
Certains disent que les animaux sont "faits pour ça". Ici, dans cet ouvrage, certains humains sont "fait pour ça" également…
Ok, je digresse, mais je me dois d'en parler.

Les âmes sensibles seront prévenues, dès les premiers mots des pages tournées, nous sommes embarqués dans un cauchemar...

L'auteure n'avait pas pour but principal que cet ouvrage soit moralisateur. Elle dépeint un monde plein de cruauté dans lequel on retrouve toutes les dérives et perversions d'aujourd'hui.

Ce livre a comme thème SF uniquement parce que les animaux sont remplacés par des êtres humains. Hormis ça, ce livre reflète la réalité pour les êtres non-humains.

En espérant que cet ouvrage donne au steak de ses lecteurs un goût amer.
Sur ce... Bon appétit !
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Challenge plumes féminines 2021 – n°8

A peine acheté, aussitôt lu (ou presque). Il n'aura patienté que 15 jours dans ma pal tant son titre et son résumé m'intriguait. J'ai découvert ce roman en furetant dans une librairie, je ne pense pas avoir vu passer des critiques sur Babelio. Ce sera donc une totale découverte.

Le synopsis est très original et macabre. Lors d'une guerre bactériologique, un virus mortel pour l'homme a infecté tous les animaux, leur interdisant d'en manger de nouveau. Qu'à cela ne tienne, une nouvelle espèce a été créée en laboratoire pour que de la viande soit quand même disponible dans les assiettes de la population, bizarrement ils ressemblent à des êtres humains. Pour moi, cette dystopie ressemble plus à une satyre de notre monde actuel. Qu'arrivera-t-il quand les animaux « mangeables » seront en voie d'extinction ? Il faudra faire correspondre l'offre à la demande. Certains mots sont durs de la part de notre narrateur mais on n'y pense jamais quand on parle réellement d'animaux… On suit donc notre narrateur dans son quotidien de visites à différents organismes de transformation de la viande et de la peau de ces nouveaux « animaux ». L'auteure alterne des chapitres courts avec des plus longs suivant l'activité du moment du narrateur. Son style est direct et très fluide malgré le thème de son roman. L'histoire nous est racontée à la 3ème personne du singulier, c'est étrange mais je trouve que cela dépersonnalise complètement certains éléments du récit. Par contre, il n'y a que le narrateur qu'on connaisse vraiment et encore, il ne nous délivre pas toutes ses pensées. Les autres personnages sont seulement survolés. L'auteure a centré sa dystopie uniquement sur l'histoire et son environnement direct. La seconde partie tranche avec la première mais j'avais hâte de voir où l'auteure voulait nous amener dans cette logique. Ou comment le monde peut changer quand le cannibalisme devient la norme pour survivre… Elle nous montre également l'envers du décor de la médecine tel que le voit le narrateur. La fin est étrange mais dans la suite logique de l'évolution émotionnelle de son narrateur. le moins que l'on puisse dire, c'est que l'auteure ne fait pas forcément dans la finesse. Malgré le thème de cette dystopie, je me suis laissée porter par l'histoire sans chercher à imaginer quelle fin l'auteure allait lui donner.

Comme vous l'aurez compris, ça a été une excellente découverte pour cette nouvelle auteure à suivre et son imaginaire très différent. J'aime beaucoup les dystopies différentes des grands succès et qui, en peu de pages, nous font réfléchir sur notre avenir possible. Je ne suis pourtant pas une amatrice de films d'horreur mais ce roman a été lu sans le moindre souci. Si vous êtes amateurs de dystopies originales et courtes, je vous conseille très fortement de découvrir ce roman et son auteure argentine. Pour une fois, je trouve le message du Monde tout à fait en accord avec ma lecture. Pour ma part, il s'agit d'une nouvelle auteure dont je vais suivre les prochaines publications.

Sur ce, bonnes lectures à vous :-)
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Cela faisait un moment que j'avais repéré ce roman. La couverture, très belle, et le titre m'avaient interpellée. Mais les commentaires glaçants avaient repoussé ma lecture. C'est maintenant chose faite, et je me souviendrai pendant très longtemps de cet effroyable histoire. En un mot, une lecture très éprouvante, que j'ai dû morceler et alterner avec d'autres romans pour arriver jusqu'à la fin.

*
Après une guerre bactériologique, un virus a quasiment décimé la totalité des espèces animales de la surface de la Terre. Les animaux qui ont survécu sont porteurs d'une maladie mortelle pour l'homme, ils sont exterminés. Pour lutter contre le manque de nourriture animale, un régime totalitariste légalise le cannibalisme.
En créant de grandes fermes d'élevage, l'homme devient du bétail.

« Après tout, la viande reste de la viande, qu'importe d'où elle vient ».

Pour bien faire accepter l'anthropophagie, le gouvernement interdit certains mots.

« La viande humaine s'appelle désormais viande spéciale. Elle a cessé d'être seulement de la viande pour devenir « bavette spéciale », « côtelette spéciale », « rognon spécial » ».

Une société bien hypocrite, individualiste et égoïste.
Cette viande humaine est très chère et beaucoup ne peuvent pas se l'offrir… S'est donc développé un marché noir où l'on peut acheter de la viande moins chère, illégale, de la viande chassée après le couvre-feu, de la viande "avec un nom et un prénom".
Pour les plus aisés, posséder une tête domestique chez soi est un signe extérieur de richesse et la viande est tellement plus fraîche et tendre lorsqu'elle est prélevée directement sur un corps vivant.

*
C'est dans ce contexte que nous faisons la connaissance de Marcos Tejo. Il est responsable d'un des meilleurs abattoirs du pays. Il ne nous épargne donc rien du cycle de la viande humaine, de l'élevage à la dégustation, en passant par les laboratoires pharmaceutiques, la recherche de cobayes humains, ou des domaines de chasse qui organisent des chasses d'un tout nouveau genre !!

Lorsqu'il reçoit en cadeau une femelle, son regard humain va l'amadouer et malgré tous les interdits, il va s'éprendre d'elle. L'intrigue monte en puissance et on sent que la situation est risquée, puis explosive.
J'ai été totalement surprise par la fin, je ne m'y attendais pas du tout.

*
Augustina Bazterrica a imaginé un monde dystopique dérangeant qui dénonce l'élevage industriel, la surconsommation et le mode d'abattage et qui nous interroge sur notre propre consommation.

L'autrice argentine a signé un très bon roman d'anticipation révoltant, choquant, percutant et affreusement cynique pour lequel elle a remporté le prestigieux prix Clarin en 2017. Très sensibilisée à la cause animale, ce roman m'a fait froid dans le dos. J'ai ressenti du dégoût et même la nausée à la lecture de ce roman. C'est tout dire du talent d'Augustina Bazterrica.
Ame sensible, s'abstenir.
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Il y avait le monde d'avant, tel que nous le connaissons.
Puis survint le Virus, qui rendit les animaux mortels pour l'Homme, notamment par la consommation de leur chair.
La 'Transition' occasionna l'avènement d'une nouvelle civilisation : la viande animale y est remplacée par de la chair humaine, prélevée sur des individus spécifiquement sélectionnés et élevés pour servir de nourriture aux autres. Surpopulation humaine et ressources alimentaires semblent ainsi facilement régulées !

Marcos Tejo travaille dans un abattoir. Bras droit de Grieg, le patron, il gère à sa place les relations avec le personnel et celles avec quelques clients importants. Son travail et sa vie sont devenus pesants pour lui. Il lui devient en effet difficile d'organiser l'abattage d'êtres qu'il voit de plus en plus comme des semblables…
-
Ce livre m'a fait penser au remarquable Dîner secret de Raphaël Montes, dans lequel des copains organisent la dégustation de plats à base de chair humaine pour quelques fortunés en quête de sensations.
Mais le ton est ici sérieux du début à la fin, avec une réflexion profonde sur la manière dont les individus intègrent les valeurs de la société dans laquelle ils vivent, et sur la nature humaine. L'écriture rend tout à fait crédible l'histoire racontée ici, aussi décalée soit-elle. On ne peut pas rester indifférent, et l'on s'interroge nécessairement.

Dès les premières pages du roman vous saurez si vous l'appréciez ou non : la couleur et la tonalité y sont en effet annoncés dès le début. J'ai été accroché immédiatement, et la suite ne m'a pas déçu, jusqu'au dénouement choc.

Je remercie Babelio et les éditions Flammarion pour la découverte en avant première.
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