AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Le jour des corneilles (89)

Ma naissance terminée, mère commença à mourir sur la paillasse, car je lui avais donné ample fil à retordre avant d'aboutir ici-bas. Père, cependant, avait attendu à l'extérieur de la cabane que mère mette bas, profitant des bonnes heures du jour pour éviscérer un chevrillard achevé par haut matin. Tandis que, né, je hurlai, père entra, me saisit entre ses bras muscleux et me mena bien vite devant l'âtre crépitant. Mère, de son côté, nous quittait si silencieusement que père ne s'avisa de rien. Ce n'est que lorsqu'il me ramena sur paillasse enaccoutré de ma défroque nouvelle et qu'il se tourna finalement vers sa compagne qu'il nota : mère, qu'il adorait telle une pierrette rarissime, avait rendu l'âme.
Commenter  J’apprécie          493
J'ambitionnais de retrouver père. D'où me venait que, malgré ses cruels mouvements à mon endroit, je le chérissais plus que l'existence même ? Était-ce là l'effet puissant et impénétrable de la lignée ? Le sang qui course dans nos veines est-il à ce point porteur de sentiment ? Mystère de nos jours ! Diablerie de la naissance, de la souche et de la famille !
Commenter  J’apprécie          410
" Peut-être, ton grand âge te bouche-t-il désormais l'esgourde par trop d'époques accumulées en sa machinerie. " Son rétorque fut prompt, et viril : " Ânetés, naïveries ! Mon esgourde traduit encore toutes choses bruiteuses sur terre ! "
Commenter  J’apprécie          400
Sa voix fut rude et commandeuse : " Parnoir ! Fils ! J'ai faim ! Sers-moi donc sur l'heure de cette viande-là ! " Mon rétorque fut à peu près ainsi : " Mais, Père, c'est que je mijotai cette pitance pour mon usage personnel, sans songer que tu y poserais la lippe.Aussi y mis-je quantité d'assaison d'herbe-aux-rats, que je goûte fort, mais qui d'ordinaire te fait venir, à toi, pustules et boutons variés ! Mais si tel est ton souhait d'avaler un peu de chair, laisse-moi assomer de mon godillot quelques-unes des souricelles qui circulent en notre cabane. Je te les embrocherai vitement et te les grillerai à ta satisfaction. "
Commenter  J’apprécie          367
Pour bien satisfaire père j'avale tout et racle même l'écuelle, non sans grimaces. Père étant exaucé, je file par suite finir le jour et entamer le soir sous le grand hêtre, allongé et gémissant, me grippant les tripes.
Commenter  J’apprécie          320
Père possédait la science des sourciers et savait, par simple maniement de sa badine de bois, faire avouer à la terre où se dissimulaient ses liquides les plus aprofonds.
Commenter  J’apprécie          250
Beauté est seule grammaire qui vaille. (p. 110).
Commenter  J’apprécie          240
Parvenu avec lui à notre logement, je dus procéder à la plus détestable composition culinaire de mon existence. Père m'ordonna en effet de poser sur le feu la grosse marmite, puis d'y fourrer les ingrédients que voici : quantité d'eau de la barrique, une couleuvre, les tripes d'un garenne, un godillot, abondances de petits cailloux, une poignée de fourmis, une hotte complète de dalibarde, une famille de lombrics et toutes humeurs extraites d'un chipmonque : sang, flegme, sève, bile et atrabile. J'avais été soumis, déjà, à avalement d'autres sordides repas : crevard de mouffeton, troublé de bif, répugnant de poularde ou piteux de fétuque. mais le rata que me fit apprêter père ce jour-là outrepassa, en infamie, toute empifrade d'avant.
Une fois mes ingrédients jetés dans la marmite, père s'assied devant l'âtre. [...] Puis il prend la louche, brasse un brin, et gorge de cette affreuse mixture nos écuelles à soupiasse. Entamant la sienne, il dit : " Avale, Fils ! " D'un bond, je me répands à son genou, pleurniche presque et rouspète : " Mais pourquoi ? Pourquoi me faire avaler ce tord-bedain ? " Seulement, nul discours ne traverse sa lippe. Plutôt, il ingère sa méprisable bouillade goulûment, lèche sa cuillère. " Pourquoi ? Pourquoi ? ", serinais-je, toujours à son genou, tandis qu'il se servait déjà une nouvelle portion. À la fin, il se dresse brusquement, pointe son doigt menaçant vers moi et relance avec courroux : " Avale, Fils ! " Résigné, je rebrousse sur taboureau et commence à m'enfourner cette chose. Je manque vomir encore aujourd'hui rien que de l'évoquer.
Commenter  J’apprécie          224
Il était terrifié par le trépas. Le seul penser qu'il allait un jour rendre l'âme lui inspirait frissons et saisissements extraordinaires. Aussi père usait-il d'un étrange manège pour retarder le moment de sa transformation en cadavre : il dévorait chaque jour quantité de viandes grasses et de lard nouveau.
" Il faut que le corps s'engraisse, Fils ! Parnoir ! Le trépas s'intéresse-t-il aux mangeurs et pansus ? Jamais ! "
Tel était son entendement.
Commenter  J’apprécie          220
J'incline à croire qu'il me fallait, pour mieux vivre, entrevoir la destination des choses, et ainsi imprimer signification à tout ce qui précédait cette conclusion, un peu à la manière de la fourmi qui rapporte en sa fourmilière la goutte de miel assurant la survie de ses sœurs insectes. M'était besoin de savoir que m'attendait quelque part une fourmilière, et que ce que j'y promettais en mon trajet lui était nécessaire. Et peut-être étais-je moi-même une sorte d'insecte rapporteur, cherchant en ce monde à se lier à sa société de semblables afin de lui fournir contribution. Quelle contribution ? Je n'avais en vérité que peu de choses à offrir, hormis la besogne de mon cœur, mon ouvrage de sentiment.
Commenter  J’apprécie          200






    Lecteurs (544) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Famille je vous [h]aime

    Complétez le titre du roman de Roy Lewis : Pourquoi j'ai mangé mon _ _ _

    chien
    père
    papy
    bébé

    10 questions
    1429 lecteurs ont répondu
    Thèmes : enfants , familles , familleCréer un quiz sur ce livre

    {* *}