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Critique de Subtropiko


Eh oui, encore cinq étoiles… non par complaisance, juste parce que je chronique le plus souvent des livres qui m'emballent ! Et comment résister à Gioconda Belli ? Poétesse, romancière, révolutionnaire, féministe cosmopolite, séductrice…

Elle est titulaire de plusieurs prix littéraires, ses oeuvres sont traduites de l'espagnol vers l'anglais, vers l'allemand… mais personne n'avait encore traduit en français « La République des femmes » ! YOVANA vient de publier une belle traduction, fluide et savoureuse ; il était temps.

Si « Dans les coulisses du musée », de Kate Atkinson (1995) faisait visiter au lecteur le fantomatique « placard aux souvenirs », où étaient entreposés des objets – pendule de l'ancêtre, photos de famille, patte de lapin, médaillon – qui l'embarquaient pour une remontée du temps à travers plusieurs générations, « La République des femmes », de Gioconda Belli (2010) joue ce jeu à l'échelle d'une vie : celle de la présidente d'un pays « petit et pauvre » d'Amérique centrale (le Faguas) qui, plongée dans le coma après un attentat, explore ses souvenirs à partir d'objets signifiants. La voici retrouvant ses lunettes de soleil, une machine à café, une collection de parapluies perdus, un presse-papiers, de petites cigales en feuilles de palmier.

Un autre point commun entre l'oeuvre, de la Britannique et celle de la Nicaraguayenne, c'est que la gent masculine n'y apparaît pas toujours à son avantage. (Un autre serait que les dédicaces ne s'adressent qu'à des femmes). Ah, pauvres machos habitant la république de Faguas ! Une éruption volcanique a fait chuter brusquement leur taux de testostérone et a facilité la prise de pouvoir du Parti de la Gauche Érotique, composé de femmes. Ces dernières réforment à la fois avec tendresse et en fanfare ! Élimination de l'armée traditionnelle au profit d'équipes chargées d'empêcher les préadolescents de tomber dans la drogue ou les gangs… Fin de la dichotomie famille-travail (création de crèches dans tous les lieux publics)… réforme du système fiscal (adieu à la corruption)… suspension pour six mois (avec salaire) de tous les fonctionnaires de sexe mâle, qui rénoveront les quartiers et s'initieront aux travaux du foyer…

Quelle énergie et quel humour chez Gioconda Belli ! Mais ce programme s'appuie, après tout, sur certaines démarches mises en pratique dans la réalité : « lorsqu'on faisait confiance aux femmes, les résultats étaient surprenants. C'est ce qui s'était produit avec le microcrédit dans tous les pays du monde ». le système des « mères volontaires » (qui peuvent être des pères) rappelle celui en vigueur dans les kibboutz des pionniers. Et l'auteure elle-même a créé, au début de sa carrière, un groupe de femmes semblable à celui de son roman, solidaires et efficaces.

Côté érotisme, la scène où les ébats, joyeux et brûlants, avec un amant rencontré dans l'avion, sont entrecoupés de questions-réponses concernant le futur parti, son financement et son action constitue une page d'anthologie ! Qui pourrait encore prétendre que les féministes sont des mal baisées ?!

L'auteure, qui ne manque jamais de toupet (tant mieux), se cite elle-même : « C'était un tee-shirt blanc sur lequel on pouvait lire un vers extrait d'un poème de Gioconda Belli, une poétesse nicaraguayenne, qui disait simplement : JE BÉNIS MON SEXE ». Bénissons-le, bénissons-la !
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