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Critiques filtrées sur 2 étoiles  
Dans un pays fictif d'Amérique centrale, le Parti de la Gauche Erotique* a pris le pouvoir. A part ce nom accrocheur, qu'a-t-il donc de particulier, ce parti ? Figurez-vous qu'il a été créé à partir d'un groupe de femmes, cinq amies ("des femmes belles et passionnées"), qui en ont eu assez des inégalités et des violences de genre, du patriarcat et de la corruption. Elles ont alors établi un programme et des slogans qui prennent tous ces maux à contre-pied, et se sont lancées dans la bataille des élections présidentielles avec Viviana, leur meneuse. Nettoyer le pays et en prendre soin comme d'un enfant, instaurer une réelle égalité, valoriser les compétences et le rôle des femmes, voilà leurs grands objectifs.

Le roman démarre alors que Viviana, Présidente depuis quelques semaines, est victime d'un attentat. Plongée dans le coma, elle erre dans les limbes et revit les épisodes de son passé qui l'ont conduite à la tête du pays. En alternance, on suit les différents membres de son entourage dans leurs actions et réactions à cet attentat et à la nécessité de gérer la vacance du pouvoir, face à l'opposition qui réclame de nouvelles élections.

Bon alors, comment dire... Tout cela ne m'a pas convaincue:

Instaurer un état gynocratique dans lequel tous les postes à responsabilités seraient occupés par des femmes, tandis que les hommes sont renvoyés (certes seulement six mois) à la maison pour se rendre compte de l'ampleur des tâches domestiques et parce que "les femmes avaient besoin de gouverner seules pendant quelque temps" pour pouvoir s'affirmer en toute liberté et prendre conscience de leurs capacités : moui... j'ai du mal à y faire coller le concept de parité ou d'égalité, mais si c'est temporaire et à des fins "éducatives" pour ces messieurs, à la limite...

L'idée de "vouloir être comme des mères pour les nécessiteux, de nettoyer le pays de fond en comble comme on le fait pour une maison mal entretenue, de donner un grand coup de balai", bref de fonder un parti "maternel", voilà qui renvoie à la femme dans ses rôles de femme au foyer et de mère, et qui en donne une image (un cliché?) maternelle, attentionnée, sensible, solidaire avec ses pairs, responsable. Comme si toutes les femmes n'étaient que ça, et comme si tous les hommes n'étaient que le contraire, ne s'intéressant "qu'aux seins et aux fesses des femmes mais pas à leurs idées" et craignant leur intelligence.

Les femmes du PIE doivent en partie leur victoire électorale à une éruption volcanique dont les émanations toxiques ont provoqué pendant plusieurs mois une baisse du niveau de testostérone des hommes, les laissant "abattus, incapables de réagir". Perso, je n'en serais pas très fière. A vaincre sans péril...

Croire qu'on va résoudre les inégalités de genre et le plafond de verre en multipliant les crèches, pour que les femmes n'aient plus à choisir entre carrière et famille, euh... vraiment ?

Et le pompon, à propos de la dépénalisation de l'avortement : "on s'occupera tellement bien d'elles [des femmes qui veulent avorter] qu'elles verront la grossesse comme un épanouissement personnel, un accès à des avantages sociaux et non pas comme quelque chose qui les obligera à vivre dans la pauvreté ou à renoncer à leurs projets d'avenir. Pour abolir l'avortement, il ne faut pas l'interdire, mais arrêter de pénaliser la maternité". Comme si toutes les femmes rêvaient d'être mères (et de bénéficier des avantage sociaux qui vont avec). Les bras m'en tombent.

Le meilleur pour la fin, peut-être : comment financer les dépenses de ce programme ? En faisant du pays le premier exportateur mondial de fleurs coupées. Parce que "quoi de plus féminin que les fleurs ?" Et on ne parle évidemment pas de l'impact carbone des avions cargos réfrigérés pour distribuer ces fleurs aux quatre coins de la planète.

Bon allez, je me calme, et je conclus en disant que je suis donc fort déçue par ce roman-fable qui, malgré quelques idées intéressantes et louables, est trop simpliste, réducteur, donc difficile à prendre au sérieux et pas vraiment drôle. Ecrit en 2010, il donne une vision décalée (dépassée?) du féminisme, et pour moi ça ne fonctionne pas.

En partenariat avec les Editions Yovana.

*en espagnol Partido de la Izquierda Erotica, PIE, qui signifie aussi pied, d'où le logo aux ongles vernis en rouge, et tous les jeux de mots qui en découlent dans le roman.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Franchement, je ne suis pas trop rentrée dans ce roman. Il me semble que le but de ce livre est de faire passer des idées féministes. Je pense que j'aurais préféré un essai assumé, qui présente bien clairement ce que pourrait être une société féministe utopique. Mais emballer tout ça dans la forme du roman pour faire passer la pilule, justement avec moi, ça ne passe pas.
Un aspect qui m'a dérangée est que le roman m'a semblé manichéen. Il y a du côté des gentilles le parti PIE, dont les fondatrices sont toutes "belles et passionnées". Puis le côté des méchants, avec le candidat au pouvoir déçu et sa femme un peu sorcière. Je me vois pas le monde comme ça, à mes yeux chaque personne a des aspects plus agréables et intéressants et d'autres moins. J'aurais aimé plus de finesse dans la présentation des personnages.
Je n'ai pas non plus aimé le côté paternaliste (et oui...) du parti, ou maternaliste disons, qui se retrouve notamment dans leur ambition d'être "comme des mères pour les nécessiteux". En bonne anarchiste, je préfère qu'on donne le pouvoir à tout le monde, et donc notamment aux nécessiteux, plutôt que de considérer qu'ils ont besoins de mères. Pour moins il y a du mépris dans cette démarche, et non un pas vers une réelle égalité entre humains.
Le procédé narratif des flash-back de Viviana qui se retrouve dans l'anti-chambre de la mort devant des étagères avec tous les objets qu'elle a perdu au court de sa vie m'a semblé très lourd. Au lieu d'être captivée par le fil du récit comme j'aurais aimé l'être, je me disais “Ho non, encore un objet de son passé...”
Je reviens sur ce "belles et passionnées" qui décidément m'est resté en travers de la gorge... Est-ce que le féminisme n'est pas l'espace par excellence dans lequel on peut lâcher l'injonction à la beauté ?! Pourquoi encore des héroïnes belles et pulpeuses ?! Quitte à inventer cette histoire rocambolesque d'éruption volcanique, ne peut-on pas imaginer une femme grosse, édentée, âgée et sans aucun charisme devenir présidente ? Ouf, l'une d'elles est queer, mais pour moi ce roman ne va pas assez loin.
Pour conclure, même si ce roman ne m'a pas plu plus que ça, il me permet, par effet miroir, de prendre conscience de manière toujours plus précise de ce qu'est mon utopie féministe à moi. Cela dit, quitte à lire sur les utopies, je préfère me replonger dans le municipalisme libertaire de Murray Bookchin par exemple, qui m'inspire bien plus.
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