Pauvres, voilà bien ce que nous sommes devenus. Pièce par pièce, nous avons dispersé l’héritage de l’humanité, nous avons dû laisser ce trésor au mont de piété, souvent pour un centième de sa valeur, en échange de la piécette de l’ « actuel ».
Que serait selon vous une vie qui, en un moment crucial, se laisserait guider par la dernière rengaine à la mode ?
[Proust] est pénétré de cette vérité que les vrais drames de l’existence qui nous est destinée, nous n’avons pas le temps de les vivre. C’est cela qui nous fait vieillir. Rien d’autre. Les rides et les plis du visage sont les marques des grandes passions, des vices, des prises de conscience qui sont venus nous trouver –mais nous, les maîtres du logis, nous étions absents.
Le décisif n’est pas la progression de connaissance en connaissance, mais la fêlure à l’intérieur de chacune d’elles.
Dans la tragédie, l’homme païen se rend bien compte qu’il est meilleur que ses dieux, mais ce savoir lui noue la langue, il reste étouffé.
Kraus voit fondre sur lui toute l’histoire universelle à travers les énormités d’un seul fait divers local, d’une seule phrase, d’une seule petite annonce.
Le caractère destructeur n'a pas le sentiment que la vie vaut la peine d'être vécue, mais que le suicide ne vaut pas la peine d'être commis.
Morale –telle serait la définition de Hebel- est l’action dont la maxime est invisible.
N’a-t-on pas constaté que les gens revenaient muets du champs de bataille ? Non pas plus riches, mais plus pauvres en expérience communicable.
Le langage serait le degré le plus élevé du comportement mimétique et la plus parfaite archive de la ressemblance non sensible : un médium dans lequel ont intégralement migré les anciennes forces de création et de perception mimétique, au point de liquider les pouvoirs de la magie.