Bien des gens pensent encore que les bédés, ce ne sont que des petits Mickeys, du divertissement pour les enfants, mais en aucun cas des lectures pour adultes.
Si vous saviez le nombre de gens qui m'ont seriné cela, durant ma vie d'adulte (dans ma vie réelle, pas sur le Net)…
Heureusement, certains comprennent un jour que non, les bédés ne sont pas que des trucs avec des dessins pour divertir, mais qu'elles peuvent aussi instruire, parler de choses on ne peut plus sérieuses, comme l'Histoire et quelques-unes de ses pages les plus sombres.
Ce premier tome du diptyque est horriblement sombre, non pas à cause de sa palette de couleurs (bien qu'aucune ne soit joyeuse), mais en raison du comportement inhumain de l'Homme.
L'histoire commence dans un train, un convoi de prisonniers, coincé entre Malines et Louvain (Leuven, pour parler correctement).
Ce train, muni de barbelés aux ouvertures d'aération, vient de quitter Bruxelles et sa direction est Auschwitz. le genre de voyage que personne ne voudrait faire. Hélas, la plupart des occupants ne savent pas ce qu'il va se passer. le lecteur le sait et le coeur se serre.
Ensuite, délaissant le train sur ses rails, le scénariste va faire quelques bons en arrière, remontant le fil du temps, donnant à ses lecteurs les quelques grandes lignes de ce qui eut lieu après 1933, revenant un bref instant sur la Première Guerre Mondiale, où bien des Allemands Juifs tombèrent pour la patrie et pour rien puisque ensuite, on effaça leur nom des monuments, on leur retira leurs droits de citoyens allemands, on les brima, on brisa leurs commerces, leurs familles, leurs vies…
L'antisémitisme monte chaque jour dans la population allemande, la répression devient de plus en plus terrible et la population allemande (non juive) a le droit de tout faire aux Juifs, rien n'est sanctionné.
L'État, lui, ne se privera pas de confisquer tous les biens, ainsi que l'argent, aux Juifs qu'il déporte. Comme l'Espagne l'avait déjà fait, du temps de Torquemada, s'appauvrissant de la sorte, puisqu'elle envoyait ailleurs des travailleurs, des commerçants, des gens prospères qui enrichissait le trésor de la royauté.
La population change très vite de comportement et ne se prive pas de participer aux pogroms, de vandaliser les établissements juifs, leurs maisons… L'effet de meute est présent et même un modéré comme Wilhem, l'ami d'Olya, frappera son père, à terre.
Les dessins des visages sont fort expressifs. le scénario prend déjà aux tripes, les dessins achèvent de nous les serrer.
Plusieurs personnages vont se croiser, dans ce premier tome, qu'ils soient juifs allemands, soldats ou sale type habillé de noir avec tête de mort sur le képi, ou gamin dans les jeunesses de qui vous savez.
Les destins se recoupent, se rejoignent, s'entremêlent et on se doute que dans le second album, nous connaîtrons le rôle que chacun jouera dans cette abjection génocidaire.
Un premier album qui m'a mise à terre. Et pourtant, je sais ce qu'il s'est passé, j'ai lu beaucoup, j'ai eu souvent mal au bide et malgré tout, ça me fait toujours le même effet : peine, tristesse, incompréhension.
Je respire un grand coup et je vais tout de suite lire le second…
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