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Citations sur Aventures dans l'irrealité immédiate, suivi de Coeurs cic.. (8)

J’enviais les autres hermétiquement enfermés dans leurs habits, loin de la tyrannie des objets. Ils vivaient prisonniers sous leur pardessus et manteau. Aucun élément extérieur ne pouvait les terroriser et les vaincre, et rien ne pénétrait leur prison merveilleuse. Alors qu’entre moi et le monde, il n’existait aucune séparation. Tout ce qui m’entourait m’envahissait de la tête aux pieds, comme si ma peau avait été criblée de trous. L’attention, très distraite d’ailleurs, avec laquelle je regardais les choses n’était pas le simple fruit de ma volonté : le monde prolongeait naturellement en moi ses tentacules ; j’étais traversé de but en blanc par les mille bras de l’hydre. Force m’était de constater que le monde était tel que je le voyais, jusqu’à l’exaspération, et que je ne pouvais rien y changer.
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J’observais en eux des éléments nouveaux, comme on découvre des détails inédits sur des objets quotidiens. La chambre conservait un vague souvenir du cataclysme, telle une odeur de soufre persistant après une explosion. Je regardais les livres reliés dans l’armoire et décelais dans leur immobilité un air perfide de dissimulation complice. Autour de moi, les objets ne renonçaient jamais à leur attitude secrète, farouchement entretenue par leur impassibilité sévère.
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Lorsque je regarde longtemps un point fixe sur le mur, il m’arrive parfois de ne plus savoir qui je suis, ni où je me trouve. De loin, je ressens alors l’absence de mon identité, comme si, le temps d’un instant, j’étais devenu une personne totalement étrangère. Ce personnage abstrait et ma personne réelle se disputent ma conviction à forces égales.
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La sensation d’éloignement et de solitude ressentie dans les moments où ma personne quotidienne se dissout dans l’inconsistance est unique. Quand elle dure plus longtemps, elle devient une peur, une angoisse de ne plus jamais pouvoir me retrouver. Au loin, il subsiste de moi une silhouette incertaine, entourée d’un halo de lumière, comme un objet discerné dans le brouillard. La terrible question « qui suis-je au juste ? » m’habite alors comme un corps étranger qui aurait poussé en moi-même et dont la peau et les organes me sont totalement inconnus. Sa réponse exige une lucidité plus profonde et plus essentielle que celle de mon cerveau. Tout ce qui est en mesure de s’agiter dans mon corps s’agite, se débat et se révolte d’une manière plus forte et plus élémentaire que dans la vie quotidienne. Tout implore une solution.
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Depuis quelques minutes, Emanuel se sentait accablé par le poids du plâtre. Exactement depuis le moment où l’idée qu’elle pouvait être son amante lui avait traversé l’esprit.
La limpide désinvolture de Solange le torturait tout autant que le poids du corset. Il aurait aimé lui dire des mots simples et sans détour, mais, face à sa présence élémentaire, toutes ces ébauches de phrases s’évanouissaient aussitôt.
Ils discutèrent amicalement pendant quelque temps.
Solange lui raconta les menus incidents du voyage et lui présenta son patron comme un « financier dont la vocation avait longtemps oscillé entre bourreau et équarrisseur ».
Emanuel était torturé par l’envie de prendre sa main dans la sienne. Allait-elle s’y opposer ? Allait-elle retirer sa main ? La main de Solange reposait, indifférente, sur le cadre en fer du lit.
Il était surtout paralysé par la précision de son imagination : il se représentait en pensée leur idylle depuis longtemps consommée, il observait les attitudes exactes de leur amour qui n’avaient jamais existé, il se souvenait soudain de choses qui n’avaient pas eu lieu ; des scènes vivantes qui dérobaient passionnément son attention et enveloppaient le présent dans la placidité des événements révolus…
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En rejoignant la caisse sur laquelle étaient posés ses vêtements, les gestes d’Emanuel étaient tout aussi prudents et silencieux que ceux de la souris se traînant sur le plancher. Lui aussi se traînait maintenant plus qu’il ne marchait. Il s’identifiait à la souris jusque dans ses moindres attitudes. Il déambulait tout aussi effrayé, tout aussi confus.
Le médecin entra à nouveau dans la cabine. L’idée lui vint subitement de se suicider, de se pendre avec la ceinture de son pantalon à l’une de ces barres métalliques. Mais cette pensée était si faible, si inopérante, qu’elle ne contenait aucune énergie, même pas celle nécessaire pour lever un doigt. C’était, bien sûr, un excellent projet, tout aussi remarquable que l’intention de la souris de regagner son trou, mais tout aussi vague et dénué de réalité.
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Seuls les timides on besoin de courage pour accomplir leurs actions, les hommes normaux, les forts, n'ont ni courage ni lâcheté, ils ouvrent les portes simplement, comme ça…
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C’est dans de petits objets sans importance : une plume d’oiseau noire, un petit livre banal, une vielle photo aux personnages fragiles et inactuels, qui semblent souffrir de quelque grave maladie intérieure, un délicat cendrier en faïence verte, en forme de feuille de chêne, sentant toujours le tabac froid, dans le simple souvenir des lunettes aux verres épais du vieux Samuel Weber, dans ces menus ornements et objets domestiques, que je retrouve toute la mélancolie de mon enfance et cette nostalgie essentielle de l’inutilité du monde qui m’enveloppait de toute part, comme une eau aux vagues pétrifiées. La matière brute, dans ces masses profondes et lourdes – de terre, de pierre, de ciel ou d’eau –, ou dans ces formes les plus incompréhensibles – les fleurs en papier, les miroirs, les billes de verre avec leurs énigmatiques spirales ou les statues colorées –, m’a toujours gardé prisonnier entre ses murs, auxquels je me heurtais douloureusement, m’astreignant à poursuivre cette aventure bizarre et insensée : être un homme.
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