Je crispais les poings de rage quand la très mamelue vieille fille qui nous serinait le "caté" nous assenait ces sornettes médiévales en riboulant des yeux.
Le but de la vie c'est la vie, il n'y a rien de mieux, c'est formidable, il n'y a que ça. faut-il parler de but ? Dans la vie le but ne compte pas, qui est la mort. Ce n'est pas l'arrivée le but du voyage, c'est le voyage. (p.37)
Deux êtres se rencontrent et une musique s'élève. C'est cette musique-là qui compte.
Toute cette humanité bedonnante (il y a une façon de bedonner de la cervelle) qui dégobille les slogans, les formules dont on l'a gavée comme on gave une oie de bouillie, et elle a le culot de baptiser pensée ce renvoi.
Ces intermittences de la solitude, je réussis à me les aménager loin de mes arbres et de ma rivière, en société. Ce congé invisible que je prends en laissant derrière moi mon corps, les gens l'appellent distraction. (p.22)
Ce sont les gens qui m'attirent. Et, dans les gens, ce qui pèse, ce qui dépose, ce qui s'accumule au fond.
Un public que les grandes idées ne touchent que lorsqu'elles deviennent spectacles.
Dans l'arrière-pharmacie, un soir : "Qui ou quoi que tu sois, n'aie pas peur. Si tu ne fais de tort à personne, tu n'as pas à en rougir. Regarde-toi bien en face, c'est le principal. Il se peut que le parti que tu prennes, en accord avec ce que tu sauras que tu es, te rende la vie difficile. Bon courage. Si tu as des ennuis, viens me les dire. Si je peux t'aider, je le ferai. Mais j'en doute. Ne compte que sur toi. L'expérience ne vaut que pour soi - et encore. Celle des autres est nulle et non avenue."
L'admirable dans ce métier, c'est de faire lever le jour dans ces visages. Petit-fils d'instituteur, fils d'institutrice, j'appartiens à une famille d'éclaireurs de visages. (p.100)
Je me méfie des "valeurs"-on les cote trop facilement en Bourse.