Livre retrouvé au hasard de ma bibliothèque, lu à l'adolescence, à l'âge où Héloïse et Abélard comme Anna Karénine me faisaient rêver! Beauté des vers de Ronsard à l'adresse de la Belle Cassandre à savourer!
- D'un baiser humide, ores
Les lèvres pressez-moi,
Donnez-m'en mille encore,
Amour n'a point de loi,
A sa grande déité
Convient l'infinité.
Page 86
- Si ma main, malgré moi, quelque fois
De l'amour chaste outrepasse les lois
Dans votre sein cherchant ce qui m'embraise,
Punissez-la du foudre de vos yeux,
Et la brûlez : car j'aime beaucoup mieux
Vivre sans main, que ma main vous déplaise.
Page 152
Pierre et ses compagnons ont démontré de façon éclatante combien la lutte écrite pouvait avoir de poids dans un conflit religieux ou politique, et qu'en définitive les armes de l'esprit surpassent le fer et le feu.
Qui dira l'émoi d'une jeune femme mal mariée, mal aimée, en découvrant la preuve d'une fidélité proclamée avec une telle intensité par un homme dont l'éloignement ne semblait en rien avoir diminué l'attachement ?
Je me baignai dans ces vers comme dans une onde rafraîchissante dont le contact, pourtant, me brûlait.
... En vous je vis, je m'anime et respire,
Mon tout, mon coeur, mon sang et tout mon bien.
Y avait-il au monde une autre voix que celle de Pierre pour me parler ainsi ? Y avait-il un autre homme pour me vouer un tel amour au bout de tant d'années de vaines espérances? Y aurait-il jamais un autre poète pour me chanter comme celui-là savait le faire ?
Amour me brûle, et l'hiver froidureux.
Qui gèle tout, de mon feu chaleureux
Ne gèle point l'ardeur qui toujours dure.
Ronsard
C'est au mois d'avril que nous nous sommes revus. Toujours ce début de printemps qui a eu tant d'importance dans nos destinées, tant de résonances dans l'oeuvre de Ronsard ! Ce temps était nôtre. Nous le considérions comme un allié...
Je la vis,
J'en fus fou...
Ronsard.
_ Voici notre second printemps, Cassandre. Ne le laissez pas s'évaporer ainsi que le premier. Le temps coule comme la Loire. Il nous emporte. Nous nous voyons si peu que l'instant qui passe en devient encore plus précieux. Vous allez sur vos seize ans...
Carnaval et carnage pourrait être la devise des deux derniers règnes. On y passa allègrement du massacre au bal et des tueries aux festins comme si c'était tout naturel. Et cela continue...
Ronsard était double, triple... il était légion !
Ainsi qu'un navire dans la tempête, il tanguait, il roulait, d'un bord à l'autre, d'une extrémité à l'autre, d'une vague à la suivante !