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Critique de Bellonzo


Chose rarissime, j'ai relu un livre. Un peu forcé d'ailleurs. Ayant imprudemment accepté de faire une communication sur Dino Buzzati j'ai entrepris de relire quelques nouvelles et Un amour, 1963, dernier roman de l'homme du Désert. Retrouver les préoccupations de Buzzati fut un très beau retour aux sources de ma grande attirance pour cet auteur à qui je dois beaucoup. Je lui dois beaucoup, à commencer par l'inquiétude. J'avais quelques prédispositions pour l'nquiétude mais lire Dino les a décuplées.

On s'accorde à penser, et Dino n'a pas vraiment contredit, ni confirmé d'ailleurs, que l'architecte Dorigo (le nom est bien proche du lieutenant Drogo...) a bien des points communs avec Buzzati, célibataire jusqu'à 60 ans. Questionné là-dessus, Je désirerais ne pas répondre fut sa seule réplique. Ca ne vous rappelle pas le Bartleby de Melville, pas si éloigné. Je ne sais si Dino a jamais évoqué ce rapprochement. Peu importe mais évitons de citer Kafka à propos des écrits de Buzzati. Je crois savoir qu'il détestait ça.

Antonio Dorigo, notable milanais quinquagénaire, rencontre des call-girls régulièrement. C'est net, c'est propre. R.A.S. Mais avec Laïde, dix-huit ans, c'est plus qu'une intrusion dans la vie bien ordonnée de ce bourgeois bardé de certitudes. Agité, criant, pleurant, parfois pitoyable, et diablement humain, l'architecte bien sous tous rapports. Laïde, dans la vie de Dorigo, c'est à la fois naïveté et mensonge, attirance et refus, des fossés d'incompréhension. Ces deux là n'ont rien en commun. On pense aussi à Heinrich Mann et au professeur de L'Ange Bleu, qui s'offre aux coups de son bourreau. Mais Dorigo lui ne cherche pas la rédemption de Laïde. Jusqu'où ira l'architecte? Et si l'accomplissement ne se parachevait que dans l'échec? La bataille perdue, comme celle du lieutenant Drogo, devenu indésirable, malade, n'a-t-elle pas malgré tout donné à sa vie un tout autre sens. Peut-être Antonio Dorigo ne sera-t-il pas passé complètement de l'essentiel.

Un amour est à mon sens presque aussi important que le Désert des Tartares. Sans en atteindre la dimension mythique, y compris chez des gens n'ayant jamais lu Buzzati, le héros d'Un amour est en grande partie son auteur , avec peut-être une bonne part de nous. Oui,de nous.



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