Alpha Flight Classic, tome 2

Ce tome fait suite à Alpha Flight Classic 1 (épisode 1 à 8). Il contient les épisodes 9 à 19 d'Alpha Flight parus en 1984/1985, ainsi que l'épisode 109 d'Uncanny X-Men paru en 1978.

Épisode 9 & 10- Walter Langowski est appelé en renfort dans une base du grand nord car d'étranges ondes perturbent la région. Il va devoir affronter un personnage bien connu qui revient des confins de l'espace. James McDonald s'installe à New York car il vient d'être engagé par l'entreprise pétrolière Roxxon. En fin de chaque épisode, le lecteur découvre la première rencontre entre Anne-Marie et Jean-Paul Beaubier et leur enrôlement dans la division Alpha. Épisodes 11 & 12 - Heather et James MacDonald Hudson découvrent qu'ils sont tombés dans un piège à New York pour attenter à leur vie, dans le cadre d'une vengeance terrible. Un membre de la Division Alpha périt dans la bataille. le lecteur découvre également les origines de Sasquatch.

Épisode 13 - le temps est venu de l'enterrement et du point d'étape. Épisodes 14 à 16 - le Maître du Monde (Master of the World) est de retour. D'étranges disparitions ont lieu sur les rives du lac Ontario. Puck demande l'aide de Marrina qui plonge pour parcourir le fond de cette mer intérieure. Namor n'est pas très loin derrière elle.

Épisode 17 - Logan rend visite à Heather à l'hôpital et ils se remémorent la fois où James McDonald a dû aller chercher Wolverine à Westchester (épisode 109 des Uncanny X-Men). Épisodes 18 & 19 - Sur un site de fouilles archéologiques près de Calgary, Elizabeth Twoyoungmen a assisté à une manifestation d'une entité surnaturelle malveillante. Elle a demandé l'aide son père : Shaman. Leur enquête va les confronter à l'une des Great Beasts et les obliger à remonter le temps, 100 ans dans le passé. le tome s'achève avec la reproduction de l'épisode 109 de Uncanny X-Men qui permet d'avoir le pendant de la scène de l'épisode 17.

John Byrne continue de développer les personnages d'Alpha Flight en évitant le plus possible schéma traditionnel des équipes de superhéros. Pour commencer, il est très rare, voire ça n'arrive jamais, que tous les membres d'Alpha Flight se retrouvent ensemble pour lutter contre une menace. Même dans l'épisode 12, Marrina manque à l'appel car elle est en train de compter fleurette à Namor et elle n'a pas entendu le signal d'appel. Il privilégie les duos : alternativement Sasquatch & Aurora, Puck & Heather, Puck & Marrina, Puck & Namor, et pour finir 4 ensemble (Puck, Shaman, Talisman et Snowbird).

Ensuite, il insère plusieurs éléments pour faire couleur locale. La géographie du Canada, ainsi que ses principales villes, ne sont pas matraquées à longueur de page. Mais d'épisode en épisode, il rappelle l'étendue de chaque province, la population totale comparée à celle des États-Unis, les différents climats, etc. Il y a donc une légère fragrance de tourisme. Et puis au moins quand une scène se déroule dans le grand nord, les personnes sont vêtues en conséquence.

Enfin, Byrne s'attache vraiment à ses personnages. D'un coté il fait preuve d'une incroyable cruauté mentale pour chacun d'eux. Car pour chaque membre d'Alpha Flight, le désastre est toujours ce qu'il y a de plus certain. Langowski contrôle de moins en moins la bête qui sommeille en lui. Shaman est accablé par sa culpabilité. Marrina se révèle être une horreur tératologique d'une ampleur insoupçonnée. Puck souffre physiquement depuis des décennies de sa condition. Snowbird perd son humanité. Jean Paul Beaubier n'a rien en commun avec les autres. Quant à Jeanne-Marie, elle est déjà irrécupérable. Aucun membre d'Alpha Flight ne profite de ses pouvoirs et n'a d'espoir de réchapper à un destin funeste. Même Talisman et Box ont déjà en eux la marque de l'échec dès leur première apparition. Et je préfère ne pas évoquer le cas des membres d'Omega Flight qui ne sont pas mieux lotis.

Heureusement Byrne compense ce destin implacable par l'humanité de Heather McDonald et d'Eugene Judd. Heather qui n'a pas de superpouvoir est un individu normal, avec un profil psychologique constructif et sain. Au travers des bulles de pensées, le lecteur découvre quelqu'un qui a une vision structurée et claire de ce qu'elle souhaite faire de sa vie. Elle aborde les événements avec un regard positif de l'individu qui refuse le rôle de victime. À travers elle, il aborde des questions inattendues sur la vie. Par exemple en quittant définitivement son appartement canadien, elle se remémore quelques moments marquants dont celui où James et elle ont décidé de ne pas avoir d'enfants. Tout d'un coup Heather s'incarne au-delà de ses simples actions. de même le lecteur profite de la chaleur humaine des échanges entre Logan et Eugene Judd qui se connaissent de longue date.

Le deuxième aspect de la narration qui compense le pessimisme ambiant est la sensation d'aventure. Une fois passés les 4 premiers épisodes, Byrne se reconcentre sur le Canada et l'exploration de mystères nouveaux. Il développe le personnage de Marrina, puis celui de Talisman. Les aventures sont pleines de suspense, intrigantes et nouvelles. John Byrne fait briller ses talents de conteur.

John Byrne réalise les dessins et il s'encre lui-même sur les épisodes 9 à 14 et 17. Bob Wiacek encre les épisodes 15, 16 et 18. Keith Williams encre l'épisode 19. Comme d'habitude, l'encrage par un tiers met en évidence que Byrne en s'encrant lui-même rajoute des textures et lisse les courbes pour les rendre plus agréables à l'oeil, ce que les autres encreurs ne font pas. Ce qui est également intéressant, c'est de pouvoir comparer ses illustrations de 1985, à celles de 1978 (l'épisode d'Uncanny X-Men). En 7 ans, il a fortement progressé en termes de justesse de l'anatomie, et en composition de ses cases, plus lisibles, plus fluides. Il y a en particulier la séquence muette de l'enterrement (11 pages, épisode 13) qui constitue un exemple parfait de narration séquentielle.

D'une manière générale, Byrne est encore très investi dans les illustrations. Il conçoit des décors spécifiques et particuliers dans lesquels le lecteur peut s'immerger. Chaque nouveau personnage bénéficie d'une conception graphique mémorable et intéressante. Et le langage corporel des personnages est toujours expressif.

J'ai pris plus de plaisir à lire les épisodes à partir du numéro 13 que ceux précédant et amenant au décès de l'un des superhéros. Ils sont centrés sur les individus, plus que les superpouvoirs, avec un souffle de grande aventure. Mais pourquoi John Byrne s'est-il montré si cruel et sadique envers les membres d'Alpha Flight ? Cela reste un mystère.