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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
UN REGAL !
Ainsi comme ainsi, j'ai besoin de m'acasser dans le fauteuil le plus proche pour arriver de trou ou de brou à démêler les pensées et contre-pensées de ma cocuce, ne sachant quelle pièce coudre pour entamer cette critique.

Pas la peine de touiller autour du buisson, je vais m'y lancer à toute éreinte et l'écrire sans détarder. J'espère que vous avez compris chat sans que je dise minon sinon je devrai ritouler alors que j'ai la gargate nouée.

Première lecture d'Andrea Camilleri, écrivain italien qui joue de la langue et de la syntaxe comme Mozart du piano et du violon. Toutes les expressions, siciliennes, italiennes ou espagnoles, sont comprises aisément grâce au contexte. C'est surprenant, très vivant et imagé et, surtout, totalement différent de ce que je lis habituellement. Bravo à la traductrice, Dominique Vittoz, dont le rendu fait oublier la traduction.

L'histoire est une partie de l'Histoire de la Sicile, alors sous occupation espagnole. A la fin du 17e s., le vice-roi vient de défunter et a désigné son épouse pour lui succéder. Celle-ci, que personne n'a jamais vue, prend la charge à coeur et décide de combattre la corruption et la luxure de ses conseillers. D'une intelligence redoutable, donna Eleonora, "sans prendre merle pour renard", s'entoure de conseillers intègres, civils, militaires et ecclésiastiques. Elle dénoue un à un les fils de la malhonnêteté des uns et des autres et condamne sans remords, en toute légalité, les princes du sang et le prince de l'Eglise.

Son règne ne dura que 27 jours et elle eut le temps
- d'édicter une loi pour que chaque corporation désigne et délègue un représentant placé sous l'autorité d'un prévôt qui jugerait les différends comme le ferait un tribunal,
- de faire baisser le prix du pain de moitié,
- de faire rouvrir un hospice pour les "vierges en danger" et un autre pour les prostituées âgées,
- d'exonérer d'impôts les "pères surchargés" de huit enfants au lieu de douze,
- de constituer une dot sur les deniers attribués au vice-roi pour les jeunes filles nécessiteuses, etc.

L'évêque de Palerme ne voulant perdre aucune de ses prérogatives ni suivre la voie de la destitution et de la ruine comme ses anciens camarades, écrivit au pape qu'il était impossible qu'une femme revête la dignité de légat-né de Sa Sainteté alors que cette fonction était indissociable de celle de vice-roi.

De fil en aiguille, le roi d'Espagne et de Sicile, Charles II, fit savoir à son vice-roi, donna Eleonora, que ses fonctions prendraient fin le 1 octobre 1677 mais que tous ses actes et décisions resteraient en vigueur et ne pourraient être annulés.

Lecture époustouflante qui m'a laissée bauchée en place comme pique-plante et que je vous recommande allègrement.

Un tout grand merci à Szramowo qui m'a conseillé cet auteur que je vais continuer à lire pour la couleur de ses mots et pour la vibration de son style.




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N° 1558 - Juillet 2021

La révolution de la luneAndrea Camilleri – Fayard.
Traduit de l'italien par Dominique Vittoz.

En 1677 la Sicile, alors sous domination espagnole, est gouvernée par un poussah, le vice-roi Angel de Guzmàn qui vient de mourir, ce qui, pour les nobles est une aubaine, sauf que, par testament, il désigne pour lui succéder son épouse Eleonora di Mora, une femme d'une sublime beauté et d'une intelligence redoutable mais qui, jusque là, était restée dans l'ombre. La nouvelle fit grand bruit parmi les conseillers qui, la stupeur passée, se multiplièrent en courbettes et autres marques de flagorneries, partagés qu'ils étaient entre l'admiration de sa grande beauté et la volonté de conserver leur place et prérogatives. Cette entrée d'une femme en politique fut une révolution mais Eleonora profita bientôt de cette opportunité pour réformer le pays en en éliminant la corruption, en portant son attention sur les plus démunis, aux femmes et à leur condition inférieure, aux mendiants, ce qui lui valut la bienveillance de ses sujets restés intègres et l'amour du peuple. Cela ne se fit pas sans mal, le jeu politique reprit ses droits et l'appétit de pouvoir des hommes en place autant que leur volonté de conserver leurs privilèges et leurs fonctions ne manqua pas de se manifester. On était loin de la galanterie et de l'amour courtois du Moyen-âge ! On fit des difficultés et bien entendu on assista à des bassesses, des délations, des trahisons, ce qui est l'ordinaire de l'espèce humaine, face à la volonté d'une femme qui entendait bien marquer son temps dans le registre de la sauvegarde des plus déshérités.

Ce court règne qui ne dura que 27 jours, soit la période d'un cycle lunaire, est authentique et c'est un homme qui y mit fin légalement, mais avec l'assurance que ses décisions seraient maintenues après son départ. Je note qu'elle ne chercha pas à se maintenir au pouvoir, ce qu'aurait sans doute fait un homme à sa place. Cet épisode est l'illustration si souvent proclamée, mais bien peu souvent mise en oeuvre, que le pouvoir politique confié à une femme peut êtres synonyme de paix, d'une prise en compte plus complète des problèmes de l'humanité, d'une plus grande justice sociale... et ce fut le cas, malheureusement cette expérience fut contrecarrée par les hommes. A la fin de son règne les choses allaient donc pouvoir redevenir comme avant, de nouvelles injustices se faire jour, la corruption se développer, les malversations se multiplier, les hommes d'Église cultiver leur hypocrisie, les guerres se dérouler pour le plus grand plaisir des puissants qui eux n'y participaient pas... En laissant aller les choses on finirait sûrement par détourner et sans doute oublier tout ce que cette reine éphémère avait fait pour améliorer le sort des plus défavorisés.

La langue de Camilleri est toujours aussi foisonnante mais j'ai été quelque peu déconcerté par le style qui mélange les expressions siciliennes, italiennes et espagnoles. Je ne suis pas contre le principe qui est finalement une belle innovation, mais j'imagine le travail du traducteur qui a dû s'adapter à cette manière originale de s'exprimer de l'auteur, sans pour autant le trahir. Il n'empêche que si Camilleri aime à s'exprimer de cette manière quelque peu humoristique, et c'est bien son droit, mais la lecture n'en est pas pour autant facilitée, même si on peut y voir, en plus de l'humour qu'il affectionne et qu'il manie si joliment, l'occasion de la création de mots qui est la manifestation même de l'évolution d'une langue et fait qu'elle est bien vivante.

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Entre réalité historique et invention, ce roman m'a fortement réjouie.
La langue unique de Camilleri est un régal toujours renouvelé, agrémenté cette fois de phrases en espagnol.
Ses images sont des trouvailles, comme :" les jambes en tiges de violettes" qu'il nous avait déjà servi. Dans "Le grelot" si je ne me trompe.
Côté Histoire : en 1677, à Palerme sous domination du roi d'Espagne, le vice-roi décède et, par testament, sa jeune épouse lui succède, au grand dam des membres du Conseil, tous faiseurs de "magouilles, faveurs, abus de pouvoir et injustices.". le plus retors et dangereux étant l'évêque. (Coup de griffe anti-clérical)
" Ce royaume ne reconnaît ni Dieu, ni Votre Majesté", avait écrit le duc d'Ossuna.
Camilleri dénonce avec force et avec humour les abominations des puissants : nobles, bourgeois, riches malhonnêtes.
Et, enfin, voici la Femme : la vice-reine, d'une beauté "envoûtante".
Elle rétablira la justice, le temps d'une révolution de lune : 27 jours.
Ce roman est aussi un hommage vibrant rendu aus femmes.
Un coup de coeur.
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Dans les chronologies des vices-rois d'Espagne en Sicile, en l'an 1677, meurt à Palerme Don Angel de Guzman qui désigne pour successeur sa veuve...

Camilleri se base sur ce fait historique pour raconter un épisode de l'histoire de la Sicile avec sa verve coutumière. C'est un très bon cru dans la liste de ses romans historiques, aussi drôle que le Roi Zozimo, celui qui m'a fait découvrir Camilleri et qui reste mon préféré.

L'Espagne gouvernait de loin la Sicile .Les nobles siciliens et les princes de l'église profitaient de chaque vacance du pouvoir pour mettre les richesses en coupe réglée. le talent de Camilleri est de raconter cette histoire sur un ton burlesque. Son style inimitable s'enrichit d'un nouvel idiome : l'Espagnol. La noble marquise récemment débarquée de son Espagne natale s'exprime en Espagnol qui se mêle au sicilien, à l'Italien de façon tout à fait comique.

Impôts détournés et corruptions, mais aussi corruptions des moeurs, La Protection des vierges en danger, oeuvre de bienfaisance est une farce qui cache un bordel. Les manigances de l'évêque et ses inventions diaboliques n'en sont pas moins drôles..On rit beaucoup dans cette révolution!
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Quel personnage que cette Donna Eleonora di Mora ! Et un grand merci à l'auteur de la remettre sur le devant de la scène!
Car une femme au pouvoir en Sicile au XVII ème, ce n'est pas rien!

Un règne éphémère, certes, mais un intérim marquant, 27 jours , et une quantité impressionnante de réformes, une lutte pour la justice et contre la corruption... qui ne serait pas sans donner de leçons à nos dirigeants actuels...

Elle décide de la baisse du prix du pain, modifie le mode de représentation des corporations, ré-ouvre ou crée des hospices pour venir en aide aux femmes, orphelines ou encore aux prostituées âgées, elle abaisse à 8 le nombre d'enfants pour bénéficier des aides aux familles nombreuses, sans parler des nobles ou évêques aux agissements répréhensibles qui se retrouvent devant la justice[...]
Lien : http://lecture-spectacle.blo..
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