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Critique de jeranjou


Un roman atypique sur la folie des hommes

Grand classique de Truman Capote publié en 1966 dont l'adaptation de Richard Brooks a été un succès au cinéma un an plus tard, je me suis plongé dans « de sang-froid » trônant dans ma bibliothèque depuis des années.

Pour résumer le contexte à l'époque, Capote découvre dans le New York Times du 16 novembre 1959 le quadruple meurtre d'une famille de fermiers à Holcomb dans le Kansas. Il pense alors en faire un roman-réalité et réussit à convaincre le New Yorker d'enquêter lui-même sur l'affaire. Des années après avoir écrit ce roman, sa rencontre avec un des assassins Perry Smith, fou de littérature, le hantera à jamais et Capote tombera dans la dépression, l'alcoolisme et la drogue. Comme vous pourrez le constater à la lecture de cet ouvrage, on ne ressort pas indemne d'un tel récit.

Ainsi, en 1959, à Holcomb, petite bourgade du Kansas, deux jeunes, Perry et Dick, tuent, sans mobile apparent, quatre membres d'une même famille, les Clutter.
Très étonnant ! L'auteur commence par décrire Holcomb, puis tous les protagonistes de l'affaire dont les quatre victimes en leur annonçant leur mort prochaine, ce qui est pour le moins inhabituel dans un roman. La lecture s'avère quelque peu déroutante au départ car rien n'est caché jusqu'au moment du meurtre.
Par la suite, plutôt que de décrire le crime en détail, Capote préfère sauter le fait principal et suivre les deux hommes dans leur course poursuite vers l'inconnu en disséquant leurs moindres faits et gestes. On se doute qu'ils se feront attraper mais on ne sait pas où, comment et surtout quand ?

Personnellement, les moments les touchants de ce roman furent les différentes lettres écrites par des tiers ou les protagonistes eux-mêmes :
La soeur de Perry qui écrit à son frère en prison pour des faits antérieurs au meurtre,
L'analyse de cette même lettre, rédigée avec une écriture magnifique, par un compagnon de cellule de Perry,
Les différents échanges de lettre entre Perry et son frère d'arme, Perry ayant servi sous les drapeaux un moment,
Les témoignages écrits de Perry et Dick durant le procès.
Les témoignages écrits ou imaginés des médecins durant le procès.

Par ailleurs, Capote s'intéresse fortement à la psychologie des deux jeunes meurtriers et fait état à de leur passé pour dresser un portrait à la fois terrifiant et attendrissant des deux compagnons d'infortune (au sens propre du mot), surtout pour le personnage de Perry. Jusqu'à la fin du récit, l'auteur, obnubilé par les soucis du détail, analyse en profondeur le comportement de tous les acteurs, quels qu'il soient, qui rencontreront Perry et Dick. Je pense notamment à Mrs Meir pour le riz espagnol et aux lunettes d'Andy avant la sentence suprême.

En terminant le livre, on comprend mieux pourquoi Truman Capote a choisi délibérement le titre « de sang-froid » pour décrire à la fois le comportement des deux tueurs et plus particulièrement celui de Perry au moment des faits mais également le système procédurier insoutenable et implacable de la peine de mort en vigueur aux Etats-Unis.

Pour conclure, un bon roman très atypique à apprécier très lentement comme le bon vin, que je rapprocherais de « L'assassin qui est en moi » de Jim Thompson, forçant le lecteur à plonger tête baissée dans l'univers effroyable d'un psychopathe. de nature différente, «De sang froid» est un roman-réalité dont on devine la fin alors que «L'assassin qui est en moi» ou encore sous l'ancienne appellation «Le démon dans ma peau» est pourrait-on dire un vrai polar dont le suspense reste entier jusqu'au bout. A lire absolument… dans les deux cas de figure, même si je suis très, très fan du deuxième étant amateur de polar noir.
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