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Critique de medsine


L'adversaire est un livre qu'il m'est difficile d'évaluer. Il faut bien dire que l'histoire, ou pour être plus précis, que le fait d'hiver est fascinant. Il a d'ailleurs sans doute été adapté au cinéma par Nicole Garcia parce qu'il exerce réellement une fascination morbide pour les lecteurs / spectateurs.

Jean Claude Romand a bâti toute sa vie sur un mensonge. Apparemment un simple mensonge d'étudiant en médecine mais qui n'a fait que l'enfoncer chaque jour dans une double vie fictive, devenant de plus en plus impossible à tenir, le conduisant à assassiner sa famille entière, sa femme, ses enfants, ses parents.

Deux choses frappent particulièrement l'auteur et le lecteur dans cette histoire.

C'est d'abord l'impossibilité de comprendre comment ce mensonge a pu tenir aussi longtemps. Comment des personnes vivant sous le même toit et se voyant chaque jour, comment des amis ont pu à ce point être trompés par un homme qui leur affirmait travailler à l'OMS, être un chercheur réputé et ayant des responsabilités extrêmement importantes alors qu'il ne faisait rien de ses journées et qu'il ne gagnait même pas sa vie ? L'aveuglement ne touche pas ici une seule personne qui serait liée intimement à Romand mais l'ensemble de son entourage proche et moins proche. Est-ce parce que le personnage est trop insignifiant pour qu'on se préoccupe vraiment de lui et qu'on ne cherche finalement jamais à creuser ? Est-ce un trait humain que de croire ce que nous dit l'autre dès les premiers échanges. D'être ensuite incapable de sortir de ce schéma qui se serait imprimé de manière tout à fait indélébile dans notre esprit ?

C'est ensuite l'impossibilité de comprendre la compassion des gens vis-à-vis de Jean Claude Romand. Bien que ses actes aient été monstrueux, bien que les gens qui le fréquentent les connaissent, personne n'arrive véritablement à le rejeter. Pire certains lui pardonnent, certains souffrent pour lui. La fin du livre est particulièrement édifiante lorsqu'on apprend que l'ancienne maitresse d'école de son fils assassiné noue une liaison amoureuse avec lui…

Ces deux thèmes, l'aveuglement et le pardon, sont omniprésents mais ils restent sans réponse. Ils obsèdent l'auteur mais le problème est qu'il les invoque trop froidement, avec une distance presque juridico-administrative. Comme souvent Emmanuel Carrère s'inscrit dans le récit et parle de lui à travers son sujet. Si j'avais été plutôt enthousiaste à la lecture de Un Roman Russe et D'autres vies que la mienne, je trouve ici qu'il y a une certaine dissonance. Peut-être est-ce dû au fait que dans les deux autres livres précités, l'auteur aimait réellement ses personnages. Peut-être qu'il faut aimer ses personnages pour écrire un bon livre.

21 août 2012
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