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Citations sur L'indifférence des étoiles (6)

Dans le soleil déclinant qui dorait la pelouse, des myriades d'insectes dérivaient lentement, brillants comme de minuscules particules d'argent, et l'idée furtive me traversa que, dans cinquante ans, des étrangers seraient assis à notre place, parlant de tout et de rien, et qu'il n'y aurait peut-être personne pour se souvenir de nous. Nous ouvririons nos mâchoires démesurément dans l'obscurité d'un caveau, car tous les morts bâillent d'ennui d'un bout à l'autre de la terre, tandis qu'une espèce finalement sans lendemain continuerait à se perpétuer dans un présent éternel qui était déjà le notre puisque j'y pensais, persuadée qu'elle a quelque chose à dire ou à faire, qu'elle choisit d'être ceci ou cela, de pratiquer la médecine ou de mettre un pays à feu et à sang, de prendre fait et cause pour une idée plutôt qu'une autre, de tuer ses semblables ou de les aider à survivre, alors qu'elle ne dispose en fait que d'une alternative: jouer le jeu ou se tirer une balle dans la tête. Mais à bien y réfléchir, cela revenait au même, et le suicide était une duperie, la pire de toutes sans aucun doute, car encore eût-il fallu pouvoir profiter du fait de s'être débarrassé de la vie, fléau coriace, et divertissement encore plus opiniâtre, en étant conscient d'être mort. Oui, le suicide était une duperie puisque, jusqu'au dernier moment, on continuait à supporter le poids insupportable de l'existence, et une fois mort, on n'avait même pas le bénéfice, jusqu'à preuve du contraire, de savoir qu'on l'était, en sorte que la fatalité avait le dernier mot quoi qu'on fît.
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Le temps continuait à passer, imperturbable, partout et nulle part, présent et toujours absent, invisible, muet comme une tombe dont il était le fournisseur exclusif, monstre tapi dans le moindre grain de poussière, les bourgeons innocents, une note de musique, les astres disparus dont on recevait encore la lumière, laminoir sournois, menteur et hypocrite, parfois aussi doux qu'une caresse qui dissimulait ses griffes meurtrières, les étés se faisaient de plus en plus courts, il suffisait que deux ou trois orages éclatent ou que des nuages inopportuns naviguent dans le ciel en cachant le soleil par intermittence pour qu'ils parussent déjà liés à l'automne avant que juillet n'ait eu le temps de s'épanouir dans sa gloire éphémère, les automnes paraissaient de plus en plus interminables et le printemps n'était que le prolongement imprudent de l'hiver.
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Il n'avait pas encore l'âge de redouter l'automne et ses pluies éternelles, ses tapis de feuilles pourries, ses relents mortifères, comme si son esprit affamé de chaleur et de lumière filtrait les saisons pour ne laisser la place qu'à un été sans fin.
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S'il avait lu l'Evangile comme on lit le compte rendu des nouvelles dans un journal, il aurait fait une dépression nerveuse. Les principes religieux dans lesquels il avait été élevé avait vidé de son contenu l'essentiel du message évangélique, et à l'exigence d'agir sur le monde s'étaient substitués la prière du soir, la messe dominicale, la communion le jour de Pâques et le respect du credo catholique.
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Mais il savait que souvent les dieux se vengent en exauçant nos vœux, sans doute parce que nos vœux n'expriment que nos faiblesses. (330)
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Mais son instinct lui disait que ces affranchis, si bien rompus aux ruses de la vie sociale dont le collège était un microcosme, ne connaîtraient jamais le goût naturel de l'existence. (35)
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