Cassandra Palmer, tome 5 : L'Emprise de la Lune

Un autre vamp est entré, un portable à la main.
-C'est pour vous, m'a-t-il dit.
Il a aussitôt commencé à me reluquer.
-Si quelqu'un ne m'a pas encore vue toute nue, c'est le moment d'en profiter! ai-je déclaré en lui arrachant le téléphone des mains, non sans tirer sur le drap.
-Vous plaisantez, j'espère, Cassandra.
J'ai poussé un soupir tout en laissant retomber mon front sur la surface molletonnée de la table de massage. Je devinais toujours l'humeur de Mircea à la façon dont il m'appelait.
Quand il était de bon poil, j'avais droit à "dulceatã", un petit nom roumain qu'on pouvait traduire grossièrement par "ma douce" ou "ma chérie". Quand il était un peu moins bien luné, il passait au bon vieux "Cassie". Et quand il avait carrément les nerfs en boule, mais ne s'abaissait pas à le montrer parce qu'il était quand même le prince Mircea Basarab, membre du tout-puissant Sénat des Vampires d'Amérique du Nord -donc pas le genre à péter un câble- il optait pour "Cassandra".
Quand j'entendais "Cassandra", je m'attendais au pire.
Pourtant, ce n'était pas ma faute. Pour une fois.

Pritkin était agaçant, têtu, perso, impatient et brusque. Il avait le tact d'un chef de camp militaire et il était sympathique comme une porte de prison. Même quand il ne faisait rien, j'avais souvent envie de le gifler. Et tout le monde voulait le buter. Je crois que je n'avais jamais hurlé autant contre quelqu'un de toute ma vie, et je le connaissais depuis deux mois à peine.

- Et votre serviteur fantôme? Il n'a rien vu non plus?
Je n'ai pas compris tout de suite qu'il parlait de Billy Joe.
Pritkin était persuadé que Billy Joe était pour moi l'équivalent d'un démon asservi par un mage: une sorte d'esclave compétent et obéissant qui affrontait l'adversité sans protester.
En réalité, c'était tout l'inverse. Dès que le chaos s'était calmé, Billy s'était réfugié dans son collier et n'avait pas émergé depuis.
Je l'ai secoué un peu, histoire de, mais il m'a gratifié d'un doigt astral.
- Billy ne sait rien, ai-je traduit.
- En êtes-vous bien sûre?
-Dis-lui qu'il aille se faire mettre, a lancé Billy mentalement.
- Absolument certaine, ai-je préféré répondre.