Revue_Charles_-_Daniel_Cohn-Bendit.jpgDans un grand entretien publié dans le numéro 11 de la revue Charles, le leader de Mai 68 raconte son parcours idéologique et militant, des communautés alternatives de Francfort jusqu’à Europe Écologie Les Verts. Jeune retraité de la vie publique, c’est en vieux sage qu’il commente pour Charles les vicissitudes de ses anciens petits camarades (enfin, pas tous) ainsi que la politique environnementale du président de la République. Extraits.
Par Arthur Nazaret
Portrait : Tom Buisseret
Pour 2017, êtes-vous favorable à une grande primaire de la gauche ?
Je suis pour que les Verts participent à la primaire de la gauche. Il faut une primaire socialiste radicale et écolo.
Vous n’en serez pas ?
Non. Je ne suis pas Français.
Nous arrivons à l’expérience gouvernementale. Quel jugement portez-vous sur Duflot ministre ?
Avec Pascal Canfin, ils ont fait ce qu’ils ont pu. Ils ont fait du bon boulot. C’était difficile. Quand il y a eu Valls, leur erreur a été de ne pas prendre le ministère de l’Écologie avec la transition écologique.
Mais fallait-il, au nom de cela, cautionner une politique économique globale que les écolos dénonçaient par ailleurs ?
Duflot aurait pu rester. Elle prenait la transition écologique, elle faisait voter la proportionnelle qui est la condition de survie des Verts, elle faisait arrêter Notre-Dame-des-Landes et surtout elle commençait un bras de fer public sur le thème : « On veut que le prochain commissaire français soit d’Europe Écologie. » Même si elle ne l’avait pas obtenu, c’était un vrai combat politique, elle pouvait faire la campagne des européennes là-dessus.
Quand il était au gouvernement, Canfin avait l’habitude de dire qu’il fallait mieux être sur le terrain pour marquer des buts...
Oui. Leur présence au gouvernement était une expérience positive, il fallait continuer. Moi, je ne suis pas contre le pacte de responsabilité, ça dépend comment on le fait. Dire qu’une politique de l’offre est complètement idiote, c’est faux. Regardez : croissance française zéro, croissance allemande 0,8. Il y a des raisons à cela. Pendant longtemps, l’Allemagne a fait le choix de ne pas avoir de SMIC et d’avoir des salaires de précarité mais ils ont réduit le chômage de moitié. La France a fait le choix du chômage. Elle n’était pas obligée. Ce qui a sorti l’Allemagne de la crise, c’est la politique de flexibilité du marché du travail. L’Allemagne n’a pas été assez loin dans la flexi-sécurité. Et ce qui porte l’Allemagne c’est les PME. Ce sont des millions d’emplois. En France, on ne pense qu’aux grands groupes, à Airbus, Alstom, au nucléaire... Le patriotisme économique, c’est idiot. Il faut un projet européen énergétique, un projet européen des transports. Il faut un vrai pilier européen, et non pas national.
En 2013, Arnaud Montebourg s’est présenté aux journées d’été des socialistes comme l’autre ministre de l’Écologie…
Tu parles ! Il est pour le gaz de schiste et le nucléaire. J’ai rencontré Montebourg après 2009, à l’automne. Montebourg me disait : « J’en ai marre, je veux quitter le PS. Faisons ensemble un grand parti de l’écologie, etc. » Il peut changer chaque jour, ce mec.
Comment qualifiez-vous le bilan de Hollande, en termes d’écologie ?
Rien. Il ne comprend rien.
C’est-à-dire? Vous avez déjà parlé d’écologie avec
Hollande ? Oui, mais il ne comprend quand même pas. Il est trop magouilleur.