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Critique de BazaR


J'aurai laissé passer trois ans et demi entre le tome 2 – dont la conclusion me poussait à l'époque à attaquer rapidement la suite – et la fin de la trilogie. Cherchez pas, je comprends pas moi-même pourquoi.
Parce que j'ai à nouveau passé de très bons moments avec cet étonnant récit bâti par deux grands de la Hard SF anglaise : Arthur C. Clarke et Stephen Baxter. L'immersion dans leur univers après tant de temps passé loin de lui n'a pas posé de problème, et tant pis si j'ai oublié quelques personnages secondaires au passage.
J'ai un ressenti cependant un peu moins enthousiaste – je crois qu'on n'est jamais pleinement satisfait par la conclusion d'une série qu'on a aimée, ne serait-ce que parce qu'elle se termine, justement. Mais pour l'essentiel je suis bien satisfait par les voyages proposés par les auteurs.

Ce tome 3 est une sorte de mélange des deux premiers, si différents au niveau des ambiances. La première partie est proche du tome 2, très hard SF, centrée sur la nouvelle menace que les Premiers-Nés ont conçue pour achever l'humanité, après la tempête solaire. Je suis impressionné par l'utilisation pratique que font les auteurs des dernières théories à la mode sur les constituants de l'univers – l'énergie sombre surtout. L'évocation de cette bombe Qt m'a enthousiasmé par son originalité. Il faut que Clarke et Baxter connaissent bien leur physique pour inventer un truc pareil. Ils le prouvent d'ailleurs dans la postface qui recense les articles scientifiques qui viennent en arc-boutant de leur trilogie.
Cette partie ressemble quand même à un gros prétexte – un peu trop étendu à mon avis par rapport au coeur de l'intrigue – pour décrire les technologies chères à Clarke d'une humanité plus avancée que la nôtre dans l'expansion spatiale : l'ascenseur spatial revu et corrigé depuis Les Fontaines du Paradis, les stations spatiales équipées de super télescopes (on parle d'Hubble en tant que gaillarde antiquité) et surtout les débuts de la colonisation de la planète Mars. Cette dernière a droit à des descriptions détaillées et est l'un des théâtres essentiels de l'action, ce qui fait que ce roman peut être casé aux côtés des classiques comme Chroniques Martiennes de Ray Bradbury ou la Trilogie de Mars de Kim Stanley Robinson. On retrouve aussi le point de convergence de nombreux auteurs : l'opposition immédiate qui apparaît entre les habitants de la Terre et les hommes qui vivent plutôt dans l'espace. Une expression de la révolte mécanique inévitable du fils contre le père, une autre forme de Frankenstein ou d'Oedipe.

La deuxième partie change complètement le décor, beaucoup plus exotique et riche en « sense of wonder » puisqu'elle nous ramène sur Mir, cette planète patchwork construite à partir de morceaux de la Terre empruntés à diverses époques. On retrouve l'ambiance du tome 1, avec ces Anglais coloniaux du 19ème siècle côtoyant les Macédoniens d'Alexandre et des esclaves de Néandertal. Ici aussi on voyage beaucoup, jusqu'à une Chicago engoncée dans un environnement de période glaciaire. C'est je crois ma partie préférée.

La suite met tout ça en communication et se recentre sur l'intrigue principale. Encore une fois je suis impressionné par l'imagination des auteurs. En revanche je suis un peu déçu que les personnages passent un peu au second plan. L'héroïne principale Bisesa agit peu au final. Elle est brinquebalée à droite à gauche et sert plus de contacteur que d'acteur. La multiplicité des points de vue oblige les auteurs à ne faire souvent qu'effleurer la psychologie. Myra, la fille de Bisesa, a droit à cet égard à un traitement de faveur.
Un peu déçu aussi par le flop que représente selon moi l'être appelé Témoin. La fin du tome 2, en forme de cliffhanger qui l'annonçait, laissait vraiment espérer une exploitation plus développée.
D'un autre côté j'ai bien apprécié que l'on présente aussi le point de vue des Premiers-Nés, qui les éloigne de l'idée vulgaire de barbares de l'espace amateurs de génocide gratuit.

La toute fin est ouverte, étrange, donne envie d'en savoir plus, tout à fait comme la fin de 2001, l'Odyssée de l'Espace.
Malheureusement (ou heureusement, il faut bien s'arrêter un jour) il n'y aura pas de suite. On n'est pas loin du chant du cygne d'Arthur C. Clarke qui mourait un an après ce roman. Jusqu'à la fin il nous aura donné une vision optimiste du devenir de l'humanité, tout en oblitérant pas ses capacités d'autodestruction.
Un grand monsieur.
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