S'il est une chose que vous enseignent les camps, à part le fait que vous êtes forcément coupable de quelque chose, c'est que quoi que vous ayez vu, vous n'avez encore rien vu.
Les rats ne craignent rien car ils ne pensent ni au passé ni à l'avenir. Les hommes n'ont pas cette chance.
-Je n'ai jamais vu autant de gens pleurer.
-Ils sont en vie.
-Quoi?
-Les gens qui pleurent. Au moins, ils sont en vie.
La vie n'est pas le contraire de la mort. Le contraire de la mort est la naissance. Ce qui se passe entre les deux, voilà ce qu'est la vie. Et ce qui se passe peut être pire. Que la mort.
-Tu sais, lui glisse-t-elle sur le ton d'une prophétesse, on est peut-être convaincus qu'on va gagner, mais les Allemands le sont aussi.
L'humilité, a dit un écrivain (Voltaire?), c'est la sensation de l'imperfection de notre être.
-Bizarre. Et si on lit un journal de droite alors qu'on est à gauche?
Denise remonte la couverture sous son menton.
-Je ne vois pas l'intérêt.
-L'intérêt, hasarde Simone, ça pourrait être de comprendre ceux qui sont de droite. Parce que si on n'écoute que les gens qui pensent comme nous, eh bien, on pense toujours pareil.
Je les aime : je ne peux pas m'en empêcher. Aimer les gens, c'est accepter de souffrir, c'est accepter l'inacceptable : tout ce qui n'est pas soi.
"J'ai commencé ma vie dans l'horreur, a-t-elle déclaré à la presse, je la termine dans le désespoir."
- Je n’ai jamais vu autant de gens pleurer.
- Ils sont en vie.
- Quoi?
- Les gens qui pleurent. Au moins, ils sont en vie.