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EAN : 9782246409915
334 pages
Grasset (24/08/1988)
4.07/5   34 notes
Résumé :
Entre 1939 et 1945, la Martinique fut coupée de la métropole et du monde extérieur. L'amiral Robert, envoyé plénipotentiaire du maréchal Pétain, y fit régner une manière de tyrannie vichyste. C'est dans cette atmosphère coloniale tragi-comique que Raphaël Confiant a choisi de tisser les destins de ces personnages hauts en couleur que sont Rigobert et Philomène, nègres du bidonville du Morne Pichevin, d'Alcide, l'instituteur sorti du rang, d'Amédée Mauville, l'intell... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Martinique durant la seconde guerre mondiale. Fort-de-France, quartier du Morne Pichevin. Sous les tropiques, l'île est comme la métropole touchée et soumise au régime de Vichy et ses accointances avec l'Allemagne nazie. La preuve les sous-marins nazis rodent dans la baie et soumettent les habitants à la peur et aux rumeurs les plus folles de débarquement imminent des troupes ennemies. Ici au Morne Pichevin on continue tant bien que mal à vivre décemment malgré les restrictions alimentaires. Une véritable galerie de personnages en tout genre et haut en couleurs font la vie de ce quartier et nous emporte là-bas au gré des pages. La routine est ici sublimée, chacun donnant vie à cette partie de Fort-de-France. Mention spécial pour Rigobert, connu de tous, rejeté et pourtant apprécié car faisant partie d'un tout, lui l'idiot non éduqué et allant de petit boulot en petit boulot pour pimenter un peu sa misère.

Les premières pages nous plongent directement dans l'atmosphère caribéenne de cette île ne serait-ce que par la description et le caractère des personnages. Tout est méticuleusement retranscrit, d'une part l'ambiance de Fort-de-France et d'autre part la domination des Békés, blancs ayant fait fortune au temps de l'esclavagisme et étant à la tête d'une grande partie des entreprises martiniquaises, encore aujourd'hui. L'écriture est quant à elle très poétique et imagée, il n'en fallait pas plus pour être transportée.

Hâte de découvrir les autres romans de cet auteur qui me semble hélas assez méconnu du moins en métropole.
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Le récit commence à la fin des années 30 du siècle dernier. Nous sommes à Fort de France, en Martinique. Nous avons devant les yeux une galerie haute en couleurs de personnages, en particulier de quelques habitants du bidonville du Morne Pichevin : Rigobert, Philomène, et les autres. Et quelques Martiniquais, en particulier métis qui ont fait des études et sont devenus instituteurs ou professeurs : Alcide, Amédée. Tous ce petit monde vit tant bien que mal, en s'adaptant. Mais les choses deviennent plus difficiles avec l'arrivée de la seconde guerre mondiale, qui n'épargne pas la lointaine colonie de la France. Un amiral prend le pouvoir, l'effort de guerre est demandé à tout le monde. le petit monde de tous nos protagonistes bascule, ils font des choix dont ils ne comprennent pas forcement les enjeux. Certains iront se battre en Europe, dont tous ne reviendront pas. A la fin du conflit, nous les retrouvons dans leurs quartiers, changés jusqu'à un certain point.

La première chose qui m'a frappée dans ce livre, est l'écriture de Raphaël Confiant, chaude, dansante, très séduisante. Des mots créoles sont présents, mais sans rendre la compréhension difficile, juste ce qu'il faut. Les personnages sont très bien rendus, j'ai eu le sentiment de les voir devant moi en chair et en os. le contexte de l'époque est très intéressant, je ne savais rien de la Martinique pendant la seconde guerre mondiale, je ne me suis sans doute posée aucune question à ce sujet.

Le livre pêche un peu quand à la construction romanesque, l'évolution de nos différents héros n'est pas toujours complètement convaincante, par moments cela se déroule d'une façon prenante, à d'autre c'est plus heurté, voir incohérent, on saute de coq à l'âne.
Mais tel quel, c'est un bon livre, et comme c'est le premier écrit par l'auteur en Français, pas cité comme son plus remarquable, j'ai envie d'en lire d'autres, en espérant que l'auteur a su mieux gérer la trame du récit dans les opus suivants, tout en gardant ce qui faisait l'intérêt de celui-ci : l'écriture et les personnages.
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Le nègre et l'amiral est d'une construction un peu inhabituelle: le début du roman rappelle un peu Rabelais ou bien Baudolino, de U. ECo. C'est peut-être ce qu'on qualifie de roman picaresque. C'est exagéré, un peu invraisemblable mais amusant. Et puis peu à peu, on glisse vers le roman historique, sérieux, très documenté, sur la vie et la société en Martinique sous le régime de Vichy.
Mais le véritable but du livre, qui ne m'est apparu que vers la fin (ben oui !), semble être une réflexion sur le sens de nos vies: la vieillesse atteinte, sommes nous toujours les mêmes hommes et femmes ? Pourquoi avons nous tant changé ? Que cherchions nous sans le savoir ? Intéressant, non, quand on a comme moi, atteint l'âge de 150 ans ?

La langue de Raphaël Confiant me rappelle beaucoup le style d'autres écrivains antillais: un français superbe, très châtié, très académique truffé de créolismes, d'inventions lexicales plus poétiques les unes que les autres. On peut s'en agacer.. Moi, j'ai aimé et je vous ai mis 3 extraits plus loin.
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Raphael Confiant est un des grands noms de la littérature martinicaise et initiateur du mouvement de la créolité au côté de son ami Patrick Chamoiseau. Ce mouvement fait la promotion de la langue créole et remet en question l'héritage de la négritude. Confiant soutient qu'il n'y a et n'y aura plus de "nègres" (authentiques noirs) en Martinique tant le métissage de la population est important, et que l'antillais doit revendiquer cette nouvelle identité "bâtarde" plutôt que de rechercher un ancêtre lointain en Afrique.

Un peu dans le style du "Texaco" de Chamoiseau, le roman offre une description pittoresque des us et coutumes des locaux de la Martinique.
L'histoire se déroule pendant la Seconde Guerre Mondiale quand l'île est aux ordres de l'Amiral Robert sous le régime de Vichy. On y décrit une ère de privation pour une majeure partie de la population et on y retrace les péripéties d'une multitude de personnages aux différentes origines ethniques et sociales.

Le roman sort du lot par sa grande pertinence historique et la vivacité du français teinté de créole. Un Excellent roman pour explorer les relations complexes entre la France et ses anciennes colonies. J'ai aimé les commérages amusants des habitants empreints tantôt de magie noire, tantôt de bigoterie chrétienne ou d'un patriotisme indéfinissable. Confiant fait l'éloge de la résilience de ces Créoles dont l'histoire mérite d'être racontée.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Sur ce bateau de rapatriement, qui voguait vers la Martinique, Vidrassamy reconnut que le Pondichérien avait contribué, sans même le savoir, à le sauver de la folie. La simple vacuité personnelle du sergent avait désacralisé l’Inde à ses yeux. Il comprit que le pays de ses parents était un pays comme les autres, ni plus beau ni plus grand, et que ses habitants participaient, aussi grands soient leurs dieux et leurs déesses, de l’humaine condition. Arrivé aux portes de l’Orient, dans cette Algérie qu’il n’était pas parvenu à pénétrer, il abandonna son vieux projet de visiter la terre des ancêtres. Il avait maintenant claire conscience qu’elle demeurerait à jamais un rêve, un pur phantasme, qu’il n’aurait même plus le ressort d’inculquer à ses enfants comme l’avaient fait ses propres parents. Au midi sonnant du dix-septième jour en mer, lorsque les mamelles vertes des pitons du Carbet dessinèrent, dans un ciel inhabituellement dépourvu de nuages, leur galbe parfait, il eut les larmes aux yeux et ne put s’empêcher de murmurer :
« Martinique… Matinik »
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Au mitan de Fort-de-France/…/ les crieurs étaient les hommes liges des Syriens qui tenaient tous magasins de toile. Ils se mettaient sur le pas de leurs portes et rameutaient le client à grandes envolées lyriques qui transformaient la simple popeline en un duvet soyeux digne des reines d’Éthiopie ou le méchant kaki des chemises de nègres d’habitation en un robuste drap d’écru. Le chef des crieurs était le sieur Julien Dorival dit Lapin Echaudé à cause de la blancheur exagérée de sa peau de chabin et la multitude de taches de rousseur qui lui picotaient les deux côtés de la figure. Il était le crieur attitré du plus prestigieux des Syriens, Doumit, dont il se révéla beaucoup plus tard qu’il n’était qu’un simple va-nu-pieds d’Italien ou, pire encore, de Sicilien. Le monde se pressait à l’entrée du magasin exprès pour jouir de la belleté de son dire.
« Doum-doum-doum Doumit ! Venez-venez-venez, venez mesdames et messieurs les élégants pleins de gamme et de prestance qui recherchez la meilleure, la plus rutilante, la plus fine toile d’Orient. C’est chez Doumit qu’on la trouve. »
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Toujours est-il qu’Alcide retrouva un mordant de coq-calabraille le soir même et ne débanda plus. Philomène, désireuse d’un résultat immédiat, avait forcé sur la dose d’aphrodisiaque. Alcide ne put se rendre à son école le vendredi. Il demeurait allongé les larmes aux yeux, un drap blanc masquant son sexe monstrueusement dressé. Toute la nuit sa compagne avait essayé d’user la bande mais elle n’avait réussi qu’à s’abîmer les reins et les bords de sa cocotte et s’était avachie d’épuisement sur la descente de lit. Le samedi passa, le dimanche fit de même et notre bougre ne débandait pas. Philomène alla quérir Mérilise et Ginette, les cheftaines majorines des femmes de tout le monde de la cour Fruit-à-Pain, qui décrétèrent qu’une seule et unique solution s’imposait : inviter toutes les coreligionnaires à enfourcher le sexe d’Alcide jusqu’à ce qu’il ramollisse.
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