Le voyage est une fiction tatouée dans la chair.
Organisée en vue de l'intérêt général, la société se voit le plus souvent décrite comme un mode de vie propre à l'homme et à certains autres animaux. Elle serait divisée en classes hiérarchiques plus ou moins évidentes, plus ou moins compatibles, sources de tensions à l'origine de mouvements ascendants et descendants. Il s'agirait donc d'une simple addition, ou plutôt d'un plus petit dénominateur commun, une nodosité. Voire encore d'un modèle imposé par les plus forts aux plus faibles. Mais, représentée sous forme d'objet fractal, elle changerait radicalement de nature. Elle deviendrait le reflet protéiforme, fluctuant, de chacune des individualités qu'elle englobe. Une abstraction référentielle où se rejoignent les milliards de rêves et de cauchemars qui la peuplent, tous distincts mais interconnectés. Un train de nuages dans un ciel inimaginable. Cristallisant les différences quand nous nous éloignons, agrégeant les aspirations quand nous nous rejoignons.
Ecoute un homme à la fois. Ecoute-le-bien. Parce que tu ne pourras jamais entendre tous les hommes. Le bruit du chaos.
Trop de temps a passé, se dit-il. Le temps, lisse et trompeur comme une croûte de glace sur un lac au moment du redoux.