Citations sur L'infidèle (12)
La plus grande preuve d’amour, dit l’Écriture, est de donner sa vie pour ses amis.
Après tout, il devait être possible de vivre ensemble sans amour. Il suffisait d’avoir l’un pour l’autre beaucoup d’estime, de la sympathie, même un peu d’affection, que fortifierait l’habitude. Ils pourraient avec cela se trouver très heureux, en comparaison de tant d’autres ménages où l’amour avait si vite fait place à la désunion, et quelquefois à la haine.
Quand on aime, on s’aveugle volontairement, pendant un temps plus ou moins long. Et puis on voit plus clair un jour. Les illusions tombent. On remarque moins les qualités de l’être cher, et beaucoup plus ses défauts. Il arrive aussi qu’avec l’âge mûr, on aimerait un peu de calme, on souhaiterait jouir de son foyer.
[...] ... Après cela, elle s'assit à côté de sa sœur et toutes deux travaillèrent en causant d'autres sujets. Mais Ginevra avait été péniblement impressionnée. Silvio s'en aperçut, quand il vint un peu plus tard chercher sa femme à l'heure du thé. Il lui demanda, tandis qu'ils revenaient à la villa :
- "Êtes-vous souffrante ? ... ou plus fatiguée ?"
Elle répondit négativement et lui raconta ce qui motivait son émotion. Il l'écoutait pensivement, en regardant Cecca qui s'avançait à quelque devant eux, en compagnie du chien de Ginevra ...
- "Cette enfant réfléchit trop, beaucoup trop. L'esprit use l'enveloppe."
Ginevra demanda avec angoisse :
- "Silvio, croyez-vous qu'on ne puisse la sauver ?
- Mais j'espère que si, au contraire, ma chère amie ! Nous ferons tout pour cela, d'ailleurs. Allons, ne vous inquiétez pas ainsi, je vous en prie ! C'est une idée surgie dans cette petite tête d'enfant, et dont elle ne se souviendra plus tout à l'heure.
- Cecca a toujours des idées sérieuses, et longuement mûries. Elle doit penser très souvent à la mort depuis qu'elle se sent plus malade. Mais elle ne paraît pas la craindre."
Elle se tut un instant et ajouta :
- "Elle a raison ... Je voudrais être comme elle. Mais moi, j'en ai peur." ... [...]
[...] ... Ginevra sut trouver des mots justes et charmants pour exprimer à son futur beau-père l'admiration que lui inspiraient les jardins d'où elle venait. Don Paolo la considérait avec une visible sympathie. Il la fit asseoir près de lui, pendant la collation servie peu après, et s'entretint plus particulièrement avec elle, tandis que son fils réussissait à rendre le chevalier [Campestri] presque loquace en lui parlant de ses chères études.
L'automobile ramena les Campestri à leur logis. Silvio les y accompagna. Au retour, il alla rejoindre son père sur la terrasse.
Don Paolo dit vivement :
- "Ton choix est parfait, mon enfant. Cette jeune fille me plaît beaucoup.
- Eh bien, tant mieux, mon cher père !
- Et à toi, Silvio ? ... à toi ? ..."
Silvio dit froidement :
- "Elle est ce que je désirais : distinguée, suffisamment intelligente, et bonne, je le crois.
- Jolie aussi, très jolie, vraiment.
- C'est incontestable. Enfin, je suis heureux qu'elle vous soit sympathique, mon père.
- Je te le répète, elle me plaît infiniment. Je crois qu'elle sera pour toi une compagne charmante, Silvio."
Le jeune homme ne releva pas cette parole. ... [...]
...la morte qu’il avait sincèrement, passionnément aimée, dont il conservait un souvenir attendri, mais qu’il ne pleurait plus, parce que la vie avait parlé en lui plus haut que cet amour pour un souvenir et qu’il appartenait tout entier à Ginevra.
La fidélité perpétuelle au souvenir n’existe décidément pas.
Donna Teresa était une jeune femme rousse et de belle taille, pas jolie, mais très élégante et très lancée. On vantait son esprit, qui consistait à faire, par petites phrases sèches et impitoyables, la satire des faiblesses d’autrui.
Une vie qui fatiguerait un homme robuste et que mènent intrépidement des jeunes femmes délicates, qui souvent reculent devant les devoirs de la maternité.
C’est une femme charmante, comme relation mondaine. Mais comme épouse, comme mère, il lui manque l’aptitude au dévouement, le goût de répandre la joie autour d’elle, et toutes les petites vertus qui nous attachent, qui nous retiennent, nous autres hommes, après que se sont évanouies les illusions de l’amour.