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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
François-Henri Désérable est habitué à poursuivre des personnages dans ses livres, une fois Évariste Galois, une autre fois Mr Piekielny, anodine figure de Romain Gary désormais sortie de l'ombre lituanienne. Mais là où ces derniers l'engageaient surtout dans une voie d'archives et de documentation, celui sur lequel il souhaite ici mettre ses mots va l'inciter à risquer de sa personne, en y mettant aussi ses pas. Comment en effet rendre hommage à Nicolas Bouvier sans partir sur ses traces en devenant soi-même écrivain-voyageur... Voilà donc notre auteur embarqué pour Téhéran, juste au moment où un inconnu de la cellule de crise des Affaires étrangères l'appelle :« Il est formellement déconseillé, vous m'entendez, formellement déconseillé de se rendre en Iran.[...] Ceux (les français) qui y sont encore sont en train de rentrer, et ceux qui ne rentrent pas, c'est qu'ils sont en prison». On est fin 2022, Mahsa Amini est devenue l'étendard de la révolte iranienne dans un pays où l'on tabasse, viole, lapide, massacre, exécute pour des histoires de cheveux.

Il y a un sondage débusqué par des hackers sur un site des Gardiens de la Révolution, que les mollahs au pouvoir se gardent bien de divulguer : « 87% des iraniens sont favorables aux revendications des manifestants ». Autrement dit le peuple n'en peut plus et il y a de quoi, aux évènements connus de l'automne dernier s'ajouteront au fil de ce récit une litanie de petites barbaries en plus de massacres moins médiatisés comme le Friday Bloody, donnant à l'Iran l'image d'un pays en pleine déliquescence. le contexte sera bien sûr omniprésent, l'auteur saura le doser tout comme il nous préviendra de « l'effet de loupe » engendré par la médiatisation de certains évènements quand on les voit de l'extérieur, par le biais de lucarnes à pixels.
Car tout ne sera pas englué dans les soulèvements et les répressions, tout ne sera pas non plus complètement noir à la lecture de ce livre. On risque même d'y être surpris par des éclats de rire empreints de légèreté bienvenue. En prenant le parti d'un tel périple, François-Henri Désérable se met dans une situation pour le moins inconfortable et il saura en jouer sans en abuser. de plus en suivant les traces de Nicolas Bouvier il ira à la rencontre d'un peuple constater son hospitalité, à l'instar de son mentor dont il loue « la faculté inouïe de brosser en trois lignes des portraits qui nous touchent ». Nul doute que Nicolas Bouvier lui aurait retourné le compliment à la lecture de son récit, égrené de rencontres improbables, parfois incongrues ou pittoresques, drôles, tendres, poétiques et touchantes elles aussi. Depuis l'auberge à l'arrivée à Téhéran – « un royaume aux sujets éphémères » – jusqu'au trou de Zahedan au Baloutchistan (là où il ne faut pas aller selon les iraniens) ou à Saqqez au Kurdistan, Désérable croise sur sa route une poignée d'européen(ne)s, des afghans en transit, quantité d'iranien(ne)s dont un seul à « trouver des vertus à la mollahrchie absolue », mais aussi un garagiste-ostéopathe, un médecin opiomane, Niloofar adepte à sa façon de l'écho nocturne à Téhéran, Ali l'illettré avec ses cahiers remplis de mots par les touristes de passage. Sans oublier Firouzeh et ses poèmes appris par coeur tels «la part irréductible de son être », Firouzeh rencontrée dans l'ascension du mont Soffeh pour y réaliser une vidéo :
« – de moi, dit-elle. de moi au sommet du mont Soffeh, dédiant l'ascension à tous ceux qui manifestent contre ce régime corrompu. de moi criant Mort au dictateur ! Et Merde aux mollahs ! Et Femme, Vie, Liberté ! »

Ce récit de voyage pourrait ainsi se lire comme une chaîne humaine de révolte et de solidarité, une galerie foisonnante de personnages touchants qu'il m'a été difficile de quitter sans avoir de nouvelles dans un tel contexte, comme il m'a été difficile de descendre de cette lecture embarquée dans la prose sensible, instructive et teintée d'humour de son auteur.
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Je crois que je n'étais pas tout à fait préparé au choc qu'a constitué ce livre époustouflant et que j'ai lu d'une traite. J'avais entendu une interview un peu convenue sur France Inter, et puis j'ai acheté cet ouvrage dans un salon du livre des mains de l'auteur, modeste et sympathique au demeurant.
Et puis je me suis plongé dans la lecture de ce livre qui m'a scotché dès le début. Comment définir ce livre d'ailleurs ? On peut commencer par dire qu'il ne saurait pas du tout être réduit à un témoignage journalistique sur l'Iran actuel. Ce serait déjà d'ailleurs passionnant, car quoi de plus important que le combat de jeunes filles courageuses, immensément courageuses, contre un pouvoir particulièrement répressif.
Livre de voyage ? Alors dans le meilleur sens du terme, et le lien avec Bouvier se fait particulièrement net, non pas que François-Henri Dérérable imite son style. Mais parce que, comme Bouvier, tout ce qu'il écrit touche à l'essentiel. Des rencontres admirablement dessinées. Des portraits incroyables. Une image forte puissante du pays.
J'ai relevé des dizaines et des dizaines de phrases superbes, car le moins que l'on puisse dire c'est que le style de Désérable m'a vraiment impressionné. Faites l'expérience de lire les deux premières pages en librairie : vous finirez par acheter le livre.
Je retiendrai de ce livre les prénoms de jeunes iraniens incroyablement courageux, des images de villes subtilement évoquées, une traversée géographique et littéraire magnifique. Quatre écrivains sont nommés dans le livre : Stendhal, Loti, Kundera et Bouvier. C'est dire l'altitude à laquelle on se situe.
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C'était en 2014, à Ispahan. Trois jeunes filles, arborant fièrement leurs fokols, m'interpelaient : « Mademoiselle, quel bonheur de vous voir ici ! Dites à vos amis de venir en Iran. Il ne faut pas nous stigmatiser. Nous, on ne condamne pas les Français sur la base de leur président. En plus, vous avez la chance de pouvoir le choisir alors que nous… ».
Je l'avoue, j'avais un a priori favorable. Ça n'enlève rien à la qualité du récit de François-Henri Désérable qui, sur les traces de Nicolas Bouvier, part à la rencontre des Iraniens, révoltés contre un régime vicié, irréformable (p33).
Il n'est pas allé en Iran avec l'intention de confirmer des idées préconçues du fond de sa chambre d'hôtel (comme beaucoup de journalistes) mais avec la conviction que « Rien n'est jamais ni tout blanc, ni tout noir » et que « Si l'on voyage, ça n'est pas tant pour s'émerveiller d'autres lieux : c'est pour en revenir avec des yeux différents ».
En suivant les pas de l'auteur, vous comprendrez un peu mieux ce qui se joue depuis l'assassinat de Mahsa Amini. Et vous découvrirez aussi les règles de politesse non écrites du Ta'ârof (p43), l'étonnant laxisme du mariage temporaire, le sigheh (p86) ou encore, le massacre oublié de Zahedan dans le Baloutchistan sunnite (p116).
J'ai également apprécié le questionnement de Dieu résumé par le jeune Amir (p127) ainsi que la critique assénée à une certaine catégorie de touristes (p76).
Je conseille vivement ce récit à ceux qui veulent mieux connaître l'Iran contemporain au côtés (outre les excellents auteurs cités par François-Henri Désérable) de Delphine Minoui, Terence Ward et Gabriel Malika.
Bilan : 🌹🌹🌹
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Pessimistes enthousiastes ou Optimistes désenchantés ?

Voilà comment on pourrait résumer les iraniens qui ont jalonné le voyage de François Henri Désérable sur le trace de Nicolas Bouvier.
En 1963 ce dernier fait paraître "l'usage du monde" , livre qui raconte son périple qui commence en juin 1953, à l'âge de 24 ans, et qui pendant un an et demi, le mènera dans un voyage à travers la Yougoslavie, la Turquie, l'Iran et jusqu'en Afghanistan en Fiat Topolino avec son ami Thierry Vernet.
Dix ans plus tard, il publie ce livre à compte d'auteur, sans beaucoup d'audience. Elle arrive vers la fin de sa vie - il meurt en 1998. Aujourd'hui, cet ouvrage est considéré comme un des grands classiques du récit de voyage.

Le second publie "l'usure d'un monde"
Une syllabe qui change tout, une locution qui change tout.
L'usure d'un monde : l'usure du monde de la République islamique, de ce régime des mollahs et des gardiens de la révolution
Chaque livre à une histoire, une anecdote, un élément déclencheur, pour François-Henri Désérable :
"L'Usage du monde était devenu ma Bible. L'Évangile de la route selon saint Nicolas. Un après-midi de printemps, à Cologny, en banlieue de Genève, dans une maison blanche aux volets verts, je rencontrai Manuel, son fils cadet. Il me dit comment Nicolas écrivait de la main gauche au feutre noir en écoutant Debussy ; il me montra ses globes, sa bibliothèque, l'exemplaire de L'Usage du monde, « cette vieille histoire triste et gaie », dédicacé par la main de son père. Puis nous étions allés sur sa tombe, la tombe de saint Nicolas : pas de dalle, une plaque minuscule (Nicolas Bouvier, 1929-1998), quatre lattes en bois qui formaient un rectangle recouvert de graviers, une Fiat Topolino miniature en fer-blanc laissée par une main anonyme, en même temps qu'un galet sur lequel on pouvait lire : « Et maintenant, Nicolas, enseigne-nous l'usage du ciel. » C'était le 16 mai 2019, et je m'étais juré qu'un an plus tard je partirais sur ses traces. J'irais en Iran."

Et au gré des aléas de ces dernières années, c'est décidé ce sera fin 2022....sauf que entre temps
" une jeune fille iranienne originaire du Kurdistan rend visite à son frère, qui vit à Téhéran. Son voile ne couvre pas assez bien ses cheveux, en tout cas aux yeux des deux agents de la police des moeurs qui patrouillaient dans le coin, et qui la font monter à l'arrière d'un fourgon. Motif : « port de vêtement inapproprié ». Son frère et son cousin protestent, mais les agents les rassurent : c'est l'affaire d'une heure tout au plus, le temps de lui rappeler le code vestimentaire en vigueur. Un peu plus tard, on retrouve la jeune fille à l'hôpital, dans le coma. Les autorités prétendent qu'on ne lui a rien fait, qu'on ne l'a pas touchée, qu'elle s'est effondrée d'elle-même comme se fane une rose, c'est si courant chez les jeunes filles de vingt-deux ans. Un scanner cérébral montre une fracture osseuse, une hémorragie et un oedème – tout laisse à penser qu'on lui a porté des coups répétés à la tête. Et puis ses codétenues sont formelles : à bord du fourgon, les agents l'insultaient, et en garde à vue ils l'ont si bien tabassée qu'elle a perdu connaissance. Quelques jours plus tard, à Saqqez, au Kurdistan iranien, les funérailles de la jeune fille donnent lieu à une manifestation que disperse la police. Mais le nom de Mahsa Amini passe de lèvres en lèvres et bientôt tout le pays le murmure, puis le gueule à pleins poumons dans les rues, sur les places, dans les universités de Téhéran, d'Ispahan, de Mahabad ou de Tabriz"

Et l'auteur decide de partir quand même, et nous livre "son récit de voyage".

Car ce livre va bien plus loin
Ce livre c'est un son,
ou plutôt un cri qui devient un écho

repris par tout un pays
"Elle a pris une grande inspiration, a mis ses mains en cornet, et, aussi fort qu'elle le pouvait, elle a crié : Marg bar dictator ! – « Mort au dictateur ! » Pendant une seconde, pas plus – mais c'était l'une de ces secondes qui s'étirent, une seconde élastique –, je suis resté interdit, stupéfait par son audace, et, plutôt que de joindre ma voix à la sienne, de passer un bras fraternel autour d'elle, de mettre un poing en l'air et de crier à mon tour, instinctivement, presque sans réfléchir, j'ai fait un pas de côté. Je me suis tu, et j'ai fait comme si je n'étais pas avec elle. La rue était presque vide, il n'y avait que deux hommes un peu plus loin devant la porte d'un immeuble, pourtant j'ai pris peur. J'ai eu peur que ces deux hommes ne soient des agents du régime, ou que des agents du régime n'arrivent en trombe sur leur moto, peur de me faire tabasser, et de me faire arrêter, et de finir en prison, et d'y rester pour longtemps. Cela n'a duré qu'un instant, je ne suis même pas sûr que Niloofar s'en soit aperçue, mais moi, cette petite lâcheté, cette démission du courage m'a fait honte, oui, j'ai éprouvé de la honte à m'être écarté de cette fille à côté de qui un instant plus tôt je marchais, avec qui je parlais, et qui, de la manière la plus éclatante, venait de me démontrer ce que c'était vraiment, en avoir.Au troisième étage d'un immeuble, quelqu'un a ouvert sa fenêtre et a crié : « Mort au dictateur ! » Puis les deux hommes un peu plus loin dans la rue ont crié : « Mort au dictateur ! » Puis une voiture qui passait a klaxonné, et son chauffeur a baissé la vitre pour crier : « Mort au dictateur ! » Puis on a entendu des « Mort au dictateur ! » qui venaient d'une rue parallèle : c'était l'écho amplifié, prolongé, répété du cri de Niloofar, qui se propageait dans les rues de la ville. C'était le merveilleux écho de Téhéran. C'était la nuit, traversée d'un éclair."

Il y fait des rencontres marquantes, au delà d'une cartographie du pays c'est une cartographie de son peuple, il tord le coup un un certain nombre d'idées reçues. On a pu entendre dire que la peur avait changé de camp, mais l'on s'en faut, elle s'est peut-être juste instilée à minima dans le camp des dirigeants. Mais la peur reste présente au point que les filles de vingt ans ont moins peur de la mort que de la prison.
42 jours de périple qui nous livrent un témoignage fort, vivant empreint du courage de la population, qui inscrit « Zan, Zendegui, Azadi » (Femme, Vie, Liberté) sur les murs de la ville
La force de l'écriture de l'auteur c'est de nous livrer des scènes décrites avec beaucoup de simplicité, et qui se révèlent des situations graves et émouvantes, et qui font sentir et ressentir au lecteur toute la souffrance de ce peuple auquel rien n'est épargné depuis plus de quarante ans. Mais la force de ce récit, c'est l'alternance entre ces passages éprouvants, et d'autres bien plus légers, voire pour certains drôles.

L'auteur en profite également pour y glisser une pointe de cynisme
" Chez nous, en Europe, on voyait des influenceuses lifestyle apporter leur soutien au peuple iranien dans des stories Instagram, pour nous vanter, dans les suivantes, les mérites d'un rouge à lèvres ou d'une crème hydratante, code promotionnel à l'appui. Celles-là, Firouzeh et moi étions d'accord : on les conchiait. Et puis il y avait celles qui se coupaient une mèche de cheveux en solidarité avec les femmes iraniennes. Investissement minimal, pensait Firouzeh, pour rendement maximal : ça demandait peu de temps, ça ne présentait aucun risque, ça rapportait des likes et ça donnait bonne conscience. Elle, tout ceci l'écoeurait ; moi, je ne savais qu'en penser. Un jour, j'étais de ceux qui croyaient possible – et pas seulement possible : préférable – d'être révolté par les malheurs du monde sans en faire l'étalage, et je me disais qu'il y avait quelque chose de vulgaire et d'indécent à se parer publiquement d'indignation vertueuse"

Un image peut tout résumer celle qui s'intitule" Ispahan, sortie de métro. Le passé de l'Iran, deux pas derrière son futur.". A défaut de lire ce livre ce qui serait à mon sens erreur, feuilletez-le et cherchez cette photo vous aurez sous les yeux l'Iran.
Et cette phrase qui revient comme un leitmotiv : " derrière chaque personne qui meurt battent mille autres coeurs."
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Femme - Vie - Liberté

Être français, se rendre en Iran pour faire du tourisme (ou écrire un livre), tout en connaissant la tension permanente qui règne dans le pays : c'est fou ou courageux, je ne sais pas. En tout les cas, à ce français, on ne lui souhaite pas de se retrouver nez à nez avec un Pasdaran, un gardien de la révolution islamique qui potentiellement ressemble à un banquier de la BNP.

FH Deserable l'a fait : parcourir l'Iran, motivé par une forme d'hommage à sa « Bible » qui a pour titre « l'usage du monde » de Nicolas Bouvier dont il nous offre des extraits régulièrement dans l'usure d'un monde. Et il l'a fait après la mort de Masha Amini dont le voile ne couvrait pas correctement ses cheveux, les autorités ont jugé nécessaire de lui donner une correction mortelle pour « port de vêtement non inapproprié ». Ça donne le ton, d'emblée, à se demander comment FH Deserable va faire honneur à l'épigraphie de son livre « Ici, où tout va de travers, nous avons trouvé plus d'hospitalité, de bienveillance, de délicatesse et de concours que deux Persans en voyage n'en pourraient attendre de ma ville où pourtant tout marche bien. » (Nicolas Bouvier, of course).

Mais il l'a fait, rendre hommage à cette épigraphe en nous immergeant dans ses rencontres non pas chaleureuses mais plutôt accueillantes avec un sens du service pour certains. L'auteur nous dépeint les nuits et les paysages de Chiraz, Yazd, Teheran ou Kerman avec poésie et envie.

Alors oui cette épigraphe est prouvée néanmoins la « Mollahrchie absolue » qui déprécie la femme violemment a coup de mots et de coup tout court, un régime politique qui fait dominer la peur mais n'enlève en rien le courage au peuple d'élever la voix et de crier, au risque d'une vie, « mort au dictateur », sont affligeants et alarmants.

Courage et audace sont réunis dans l'usure d'un monde où j'ai tant appris sur l'Iran, où j'ai aussi ris puissamment grâce à l'humour connu de FH Deserable, une arme infaillible. A lire.

Femme - Vie - Liberté
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Entre la mer Caspienne, les golfes d'Oman et Persique, aux frontières du Turkménistan, de l'Afghanistan, du Pakistan et de l'Irak, se cache un des berceaux civilisationnels du monde. La Perse. Ou l'Iran, comme on l'appelle aujourd'hui.

Fin 2022, François-Henri Désérable, ex-hockeyeur professionnel et écrivain français (dont le dernier roman parle d'une passion adultère) décide de partir Iran. Il y restera six semaines avant d'être sommé de quitter le territoire. « Because you cannot trust people here. »

Six semaines au sein de ce pays aux multiples facettes, entre répression et aspiration, révolte et rêve, courage et héroïsme.

Six semaines à traverser l'Iran. Ce pays aux contours magnifiques, aux noms qui font rêver (rien que le nom d'Ispahan nous fait voyager). Ce pays vicié, réprimé, abîmé, qui assassine de sang froid une jeune fille dont les mèches de cheveux ne sont pas correctement cachées, qui bâillonne la jeunesse et étouffe les femmes.

Ce pays usé. Usé par la république islamique.

Mais l'espoir n'est pas mort. Et dans ce désert gronde une révolte qui ne se taira pas.

J'ai lu ce récit d'une traite, passant par toutes les émotions. de l'émerveillement à la colère, du désespoir à l'espoir.

Femme - Vie - Liberté

François-Henri Désérable m'a fait voyager. Il m'a fait rire aussi, parce que ces digressions sont nécessaires et jamais impertinentes. Tout est juste. Les photos sont également magnifiques.

Ce récit a fait battre mon coeur très fort. Il sort le 4 mai, réservez votre journée, vous allez voyager en Iran.

Un grand merci aux Éditions Gallimard pour l'envoi de ce roman, qui m'a soufflée!
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Il avait lu Bouvier, il avait adoré, il était parti. Où ça ? En Iran ! Non ? Si ! Mais il est complètement cinglé ! Il est jeune.
Alors là franchement, moi, la trouillarde qui rêve de traverser le monde, j'ai lu ce texte complètement éberluée par la candeur, l'insouciance, l'irresponsabilité de ce jeune gars aux allures de dandy, traversant un territoire où tu as quasiment cent pour cent de risques de te faire arrêter, mettre en taule et de ne jamais revoir le jour (il part fin 2022, donc peu de temps après la mort de Mahsa Amini!)… Ben, lui, pas de problème, il y va, discute avec les uns, les autres, fait des photos, des vidéos (bon d'accord, il les envoie aux copains français et les supprime sur son portable mais pas toujours à temps...), rencontre une multitude d'opposants au régime (faut dire, c'est à peu près la totalité de la population.) C'est incroyable. Quel courage quand même ! J'ai lu ce texte en tremblant pour lui. Et dire qu'il a vu des paysages qu'on ne verra certainement jamais. Un peu comme ces grands voyageurs du XVIe siècle qui décrivaient des terres que personne ne connaîtrait. Des lieux somptueux. Je passais mon temps à aller voir sur Google Map à quoi ressemblaient des villes comme Ispahan (ce nom me fait rêver), Keshit ou Kashan… Je me suis fait mon petit voyage moi aussi… Bien tranquille dans mon lit, j'ai traversé le désert (oh l'évocation de ce routard paumé en plein désert sans une goutte d'eau…), j'ai été éblouie par le bleu des mosaïques d'Ispahan, j'ai traîné la nuit dans les rues vides de Yazd… Mais surtout, surtout, à travers le récit de Désérable, j'ai découvert des gens, des gens courageux, prêts à mourir pour la liberté : c'est Firouzeh qui crie « Femme, Vie, Liberté ! », « A bas le dictateur ! », « Khamenei assassin ! », c'est toujours Firouzeh qui apprend des poèmes au cas où elle serait arrêtée et privée de tout. Au moins, elle aurait ses poèmes et personne ne pourrait les lui enlever. Ce sont ces femmes qui laissent flotter leurs cheveux au vent tout en sachant ce qu'elles risquent. Sur Internet, je suis allée voir Khodanur Lojei danser. Comme il est beau quand il danse… Et bien sûr, Mahsa Amini, dans tous les esprits, dans tous les coeurs… Je me souviendrai toujours du cri de Niloofar dans la nuit de Téhéran : « Mort au dictateur » et de l'écho, ce bel écho qui traverse la ville. Et toutes ces voix qui n'en peuvent plus de vivre cette terrible dictature où l'on n'hésite pas à tirer sur la foule pour faire taire ceux qui veulent parler.
Et notre François-Henri, qui sans jamais se départir de son humour (bon je sais bien, il l'a écrit après, le bouquin, mais quand même ) (la fin du récit est complètement sidérante…) va d'une ville à l'autre en bus, en stop, en train, regarde, écoute, analyse… Tel un Candide des temps modernes, il s'étonne, pose des questions, se documente, raconte. Il n'est pas un spécialiste de l'Iran et c'est tant mieux. On apprend avec lui, il nous embarque comme un copain avec qui on se marre bien (c'est vrai, il a toujours le mot pour rire même dans les pires situations et un immense sens de l'observation...)
Bon, il est revenu, c'est le principal (je parle comme si j'étais sa mère !) et il nous offre là un texte incroyable, tellement riche ! Un vrai voyage ! J'ai vraiment l'impression d'avoir découvert un pays et son peuple… Surtout, ne vous en privez pas !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Plongée captivante dans l'Iran d'origine, ce récit est celui du voyage de l'auteur en Iran fin 2022, sur les traces d'un autre avant lui, Nicolas Bouvier, qui a traversé l'Iran en Fiat Topolino dans les années cinquante avec un ami dessinateur et en a rapporté l'ouvrage qui a inspiré celui-ci, L'usage du Monde.
François-Henri Désérable signe ici un récit de voyage passionnant, authentique qui traduit un regard à la fois tendre et lucide sur ce pays et son peuple, un peuple qui souffre de la répression imposée par la République islamique mais un peuple qui se révolte et fait preuve de courage. Un très beau récit qui met l'accent sur les richesses du pays, sa culture de la poésie, ses coutumes inhabituelles qui font sourire et l'hospitalité chaleureuse que l'auteur a rencontré. Je vous le recommande
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Un témoignage incroyable de l'Iran d'aujourd'hui. Quel courage d'y être allé. Courage, oui, car il en faut dans ce pays où la liberté n'est pas. Courage surtout du peuple iranien qui ose se rebeller contre le régime autoritaire. J'ai aimé ce voyage qui nous permet de mieux voir la teneur des manifestations suite à la mort de Mahsa Amini mais aussi de mieux connaître la culture iranienne, les Iraniens, les différentes régions et leurs spécificités. Ce qui est fort, c'est d'y avoir aussi inséré des pointes d'humour qui allègent la lourdeur des drames quotidiens qui se jouent dans ce pays. Un témoignage fort, un peu court, mais vous comprendrez pourquoi à la fin.
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J'aime beaucoup l'écriture de F.-H. Désérable ; le mélange fluide de classicisme élégant et d'une langue accessible et intelligente.
En exergue de ce très beau récit de voyage, sous-titré « Une traversée de l'Iran », il y a cet hommage : « Aux Iraniennes, vent debout, cheveux au vent ».
Le clin d'oeil à « L'Usage du monde » de Nicolas Bouvier, grand classique de la littérature de voyage, sert de fil rouge à ce périple dans l'Iran d'aujourd'hui, celle des mollahs, de l'islam intégriste et de la terreur.
La culture millénaire de la Perse, et l'Iran des années cinquante sont bien loin. Car si le Shah est tombé, la dictature théocratique, qui lui a succédée depuis 1979, maintient sa population dans une soumission liberticide, inhumaine et sanguinaire. Pourtant depuis la mort atroce de # Mahsa Amini # la peur s'efface lentement mais sûrement, pour être remplacée par l'incroyable courage de ce peuple, et en particulier de ses femmes, qui sont les premières victimes de cette dictature.
L'actualité nous montre que le pire n'est pas qu'ailleurs ; alors vigilance et lucidité sont de mise. Sans doute, suis-je en colère, pardon ; en colère contre les haineux et leurs sbires qui ne s'attaquent qu'aux plus faibles, aux désarmés, aux innocents, à la vie, pour uniquement maintenir leur pouvoir inique et mortifère avec leur interprétation sans spiritualité, sans humanité, sans élévation, sans dialogue, de cette religion qui sans eux ne vaut pas moins qu'une autre ... pour la seule domination de barbus manipulateurs, arriérés, incapables ...
Je précise que ce livre vaut mieux que la colère ... il nous montre surtout le courage* du peuple iranien, et c'est aussi un soutien aux femmes de ce pays.
J'ai aimé aussi le discernement de l'auteur ; « Par goût de l'aventure, par goût de l'imprévu, par peur aussi de me retrouver un jour dans un Ehpad à me demander ce que j'ai foutu de ma vie, à songer qu'en fait de vie, je me suis seulement contenté d'exister, il m'arrive de faire preuve d'une audace imprudente. Si on est complaisant, on pourrait la qualifier de hardiesse ; sinon de connerie. Quoi qu'il en soit, ça n'est pas du courage* : mes réserves en la matière sont assez limitées ... »
Allez, salut.
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