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Citations sur Chroniques de la haine ordinaire (124)

Chez l'opticien. Je n'avais pas de raison de me méfier de cet homme. C'était un opticien moyen, avec une tête d'opticien moyen. Vous savez, une de ces têtes d'une banalité hors du commun, une tête oubliable au-delà du raisonnable, une tête outrageusement ordinaire. [...]
- Bonjour, docteur, est-ce que vous avez des lunettes ?
Peut-être mon entrée en matière a-t-elle heurté l'amour-propre de ce plat imbécile. À l'instar du vieux Prévert qui disait "tu" à tous ceux qu'il aimait, je dis "docteur" à tous les hommes en blanc... J'ai déjà remarqué que ça énervait les boulangers.
Faites l'expérience. Au lieu de vous emmerder l'après-midi dans vos bureaux insipides, à vendre des moissonneuses-batteuses hydrauliques par correspondance à des ploucs illettrés, ou à apprendre par cœur la Constitution de la IVe dans les chiottes de Sciences-pot, sortez dans la rue pomper le bon air hydrocarbotchernobylesque. Entrez dans une boulangerie, entre deux fournées, à l'heure où cet artisan blême et farineux s'exhume de son pétrin pour venir expectorer ses calembours rassis d'ex-mitron sous le nez des ménagères. (J'en ai subi un, pendant dix ans, qui ne savait pas vendre un bâtard sans hennir : "Et un enfant sans père, pour la p'tite dame." Quelle dérision !)
Bon. Quand votre tour arrive, regardez le boulanger au fond des yeux, et lancez-lui gaiement : "Bonjour, docteur. Est-ce que vous avez du pain ?" Le mien, la première fois, ça l'a tellement troublé qu'il s'est mis à ranger ses miches en serrant les baguettes au lieu de faire le contraire.
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onjour, madame Paletot. Bous j'avez dou avoir dé la peine pour lé pétit chat, no ? demanda la servante ibérique en prenant son service. Et, devant la mine ahurie de sa patronne:-Quand yé ou fini dé débarracher la couigine, lé pétit chat lui l'avait foutu lé camp. Yé bite bite fait lé tour dou yardin. Loui pas là. Yé bite bite régardé dans la route. Santa Maria ! lé pétit chat l'était écrajé par oune boitoure, qué l'avait complétamente écrabouilé. Ma, comme l'était pas abîmé, yé lé rapporté lé pétit chat dans la couigine. Et pouis, moi yé pas boulou déranyé la madame, alors yé chouis retournée dans ma maichon.
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Nous irons au Mexique pour voir trembler la terre quand les fêlés du ballon s'éjaculent des vestiaires.
Nous irons à Rio compter les enfants pauvres avant d'aller danser en bermuda résille.
Nous irons à Jérusalem comme à Berlin nous lamenter au pied du mur.
Nous irons au fond du désert compter les bouts d'hélicoptère oubliés cet hiver sous la poussière automobile.
Nous irons au fond des Carpates pour frissonner au loup-garou et voir s'enfiler les blattes dans le cimetière aux hiboux.
Nous irons à Tananarive, pour voir si ta nana revient.
Nous irons à Pekin pour bouffer chez Maxim's et pour voir si la Chine commence à s'habiller Cardin.
Nous irons au bout du monde ...
Nous n'irons plus au Liban, les cèdres sont coupé, les enfants que voilà ne savent plus chanter.

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Cet hiver, afin de m’épargner au maximum les assauts grotesques de ces enthousiasmes hypocrites, j’ai modifié légèrement le message de mon répondeur téléphonique. Au lieu de dire « Bonjour à tous», j’ai mis « Bonne année mon cul ». C’est net, c’est sobre, et ça vole suffisamment bas pour que les grossiers trouvent ça vulgaire.
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Depuis pas loin d'un siècle qu'une baderne autrichienne obsédée s'est mise en tête qu'œdipe voulait sauter sa mère, la psychanalyse a connu sous nos climats le même engouement que les bains de mer ou le pari mutuel urbain.

On a beau savoir pertinemment que la méthode d'investigation psychomerdique élucubrée par le pauvre Sigmund n'est pas plus une science exacte que la méthode du professeur Comédon pour perdre trente kilos par semaine tout en mangeant du cassoulet, ça ne fait rien, la psychanalyse, c'est comme la gauche ou la jupe à mi-cuisse, c'est ce qui se fait maintenant chez les gens de goût.

Ce scepticisme à l'égard de la psychanalyse, mais aussi de la psychologie et de la psychiatrie qui s'y réfèrent de plus en plus, me vient, selon mes docteurs, des données de base primaires d'un caractère brutal et non émotif qui me pousse à manger le pilon du poulet avec les doigts ou à chanter l'ouverture de Tannhâuser dans les moments orgasmiques.

Voici une histoire vécue, où le prestige des psy en prend plein le subconscient. Ma copine Betty Sartou, mère de famille à ses moments pas perdus pour tout le monde, a connu le malheur d'accoucher d'une espèce de surdoué qui s'appelle Grégoire, comme les moins cons des papes, mais c'est une coïncidence. A cinq ans et demi, ce monstre donnait des signes alarmants d'anormalité. Notamment, il préférait Haendel à Chantal Goya, il émettait des réserves sur la politique extérieure du Guatemala et, surtout, il savait lire malgré les techniques de pointe en vigueur à l'Éducation nationale.

Devant ce désastre, la maman et la maîtresse d'école estimèrent d'un commun accord que Grégoire était un mauvais exemple pour ses collègues de la maternelle, et qu'il serait bienséant de le jeter prématurément dans le cours préparatoire. Oui, mais à condition, dit l’Éducation nationale, que Grégoire subisse de la part d'un psychologue, par nous choisi, les tests en vigueur en pareille occasion. Au jour dit, mon amie Betty et son super minus se présentent au cabinet du psy, en l'occurrence une jeunesse binoclée de type « Touche pas à mon diplôme ». On prie la maman de rester dans la salle d'attente. Vingt-cinq minutes plus tard, la psychologue dont le front bouillonnant se barre d'un pli soucieux libère le gamin et accueille la mère.

- Votre fils Grégoire peut sauter une classe. Il en a la maturité. Il a parfaitement réussi les tests de latéralisation (en gros, cela signifie que si on lui présente une cuillère, il aura tendance à l'attraper plutôt avec sa main droite qu'avec son pied gauche). Malheureusement, je ne vous cacherai pas qu'il semble souffrir de troubles affectifs probablement dus à… un mauvais climat familial. Voyez le dessin qu'il vient de réaliser. Je lui avais demandé de dessiner papa et maman. C'est assez clair, non ?

L'enfant avait dessiné un père gigantesque, dont la silhouette occupait toute la hauteur de la page, alors que la mère lui arrivait à peine au plexus.

- Pour moi, c'est clair, soupira la psy. Cet enfant marque une tendance à la sublimation de l'image du père, tendance subconsciemment contrecarrée par une minimisation anormale de l'image et donc du rôle de la mère dans le contexte familial. Je ne vois malheureusement pas d'autre explication.

- Moi, j'en vois une, dit Betty. Mon mari mesure un mètre quatre-vingt-treize et moi un mètre quarante-sept.

68 – [Points Virgule n° V50, p. 85]
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J’en ai vu, dans le show-bizz, ramper de si peu dignes et si peu respectables qu’ils laissent dans leur sillage des rires de complaisance aussi visqueux que les mucosités qu’on impute aux limaces.
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Au voleur
6 mars 1986
......Je ne parle pas tant des voleurs professionnels, braqueurs de banque, perceurs de coffres, garagistes, épiciers, etc... qui, certes, s'emparent malhonnêtement du bien d'autrui, mais qui le font avec une conscience professionnelle sur laquelle bien des jeunes gens honnêtes seraient bienvenus de prendre exemple.
Non, je veux parler des voleurs amateurs qui volent n'importe quoi, n'importe où, n'importe comment, au petit bonheur des portes ouvertes, et qui repartent sans dire merci, en laissant les traces obscènes de leurs pieds boueux sur les draps brodés de grand-mère qu'ils ont jetés à terre pour y chercher l'improbable magot qui sommeille à la banque.
Rappelle-toi, résidu de gouape, reliquat freluquet de sous-truanderie, rappelle-toi cette nuit de printemps où tu es venu polluer ma maison de ton inopportune et minable équipée. Tristement encagoulé de gris, tu viens dans ma maison, la sueur froide sous le bas noir et la pétoire sous le bras. Infoutu de discerner un vase de Sèvres d'un cadeau Bonux, tu voles au ras des moquettes un vieux sac à main où l'enfant rangeait les billets de Monopoly et ses dents de lait pour la petite souris. Triste rat, tu voles bien bas.
La maison dort, sauf le vieux cocker tordu d'arthrite et à moitié aveugle qui rêvasse au salon sur son pouf. Il se lève doucement pour aller te lécher un peu, avec cette obstinée dévotion pour nous qui n'appartient qu'aux chiens. Alors toi, pauvre con, tu lui vides en plein gueule la moitié de ton chargeur de 11.43.
Et puis tu files éperdument, veule et cupide gangstérillon de gouttière, la trouille au ventre et chiant sous toi, piaillant aux étoiles les salacités vulgaires attrapées au ruisseau. La nuit résonne encore à mes oreilles du cliquetis métallique de ton sac de toile plein de vaisselle. Et moi je reste là, immobile, à te regarder filer. Parce que j'ai peur aussi. J'avoue. Je renâcle à risquer ma vie pour Arcopal et Duralex. Il y a si longtemps maintenant que j'attends mon cancer ; je ne vais quand même pas partir sans lui.
Où es-tu aujourd'hui, grêle terreur des chiens mourants ? Sans doute, courageusement abrité derrière ta quincaillerie militaire, es-tu en train de guetter une petite vieille au coin de sa chambre de bonne, pour lui casser la gueule avant de lui prendre sa carte orange et le cadre en inox avec la photo de ses enfants qui ne viennent plus la voir ?
Je ne te souhaite pas forcément la prison, c'est l'engrais où les âmes pustuleuses et les contaminées s'épanouissent en incurables bubons. Je ne te souhaite pas non plus quelque mort légale qui ferait de toi, infime et dérisoire épouvantail de terrain vague oublié, un héros de chevalerie zonarde pour progressistes illuminés, ou pire encore, une raison de se réjouir pour les nostalgiques des ordres noirs.
En réalité, je ne te souhaite ni ne te veux rien.
Je tiens seulement à ce que tu saches, Al Capone de poubelle, Mandrin de mes couilles à condition qu'on me les coupe, je veux seulement que tu saches que toute la famille se joint à moi pour te prier d'agréer l'expression de mon plus profond mépris.
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"Qu’est-ce que le premier janvier, sinon le jour honni entre tous où des brassés d’imbéciles joviaux se jettent sur leur téléphone pour vous rappeler l’inexorable progression de votre compte à rebours avant le départ vers le Père Lachaise…
Cet hiver, afin de m’épargner au maximum les assauts grotesques de ces enthousiasmes hypocrites, j’ai modifié légèrement le message de mon répondeur téléphonique. Au lieu de dire « Bonjour à tous», j’ai mis « Bonne année mon cul ». C’est net, c’est sobre, et ça vole suffisamment bas pour que les grossiers trouvent ça vulgaire."

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Quant au mois de mars, je le dis sans aucune arrière-pensée politique,
ça m’étonnerait qu’il passe l’hiver.
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Le type qui a inventé l'espèce de fil rouge autour des portions de crème de gruyère, on peut pas le tuer, quand même.
(...)
Peut être qu'il est dingue, ce type. Peut être qu'il est dingue de père en fils. Si ça se trouve, c'est une forme d'aliénation mentale plus ou moins héréditaire. Peut être que son père, c'est le type qui a inventé l'espèce de papier collant autour des petits-suisses ? Peut être que sa mère, c'est la pétasse qui a inventé le chocolat dur qui tient pas autour des esquimaux ? Peut être que son grand-père, c'est le fumier qui a inventé la clef qui casse le bout des petites languettes des couvercles de sardines, en complicité avec le pourri qui met de l'huile jusqu'à ras bord des boîtes ?
Peut être que sa grand-mère, c'est la salope qui a inventé le suffrage universel ?
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