En première ligne

En tant qu'ex-enseignante du primaire, je n'ai pu qu'être attirée par la couverture de ce livre, ces tables de classe d'une époque que je n'ai connue qu'enfants.
Charlie, le héros de ce roman, même si le mot roman n'est peut-être pas de mise, est prof de langue dans un lycée professionnel, ces postes que l'on ne choisit pas volontairement, là où les jeunes ne sont pas vraiment des amoureux des études. Ce n'est pas le job qu'il aurait choisi, mais il faut bien remplir la marmite ! Charlie est fonctionnaire avec l'étiquette « sécurité de l'emploi. ». Charlie s'ennuie dans son travail jusqu'à cette rentrée où il doit collaborer avec Assia.D, une enseignante vraiment séduisante.
Dans ce roman acide, l'auteur pointe du doigt les dysfonctionnements bien réels d'une institution à la dérive, jonglant avec des programmes changeant sans cesse, des limites, tel un mur contre lequel se heure Charlie.
Je ne vais pas raconter tout le livre, juste que j'ai pris un véritable plaisir à le lire, souriant à chaque fois que je tombais sur un des fichus sigles de cette EN : ULIS, AVS, CPE, DDFPT… des symboles que seuls les initiés peuvent comprendre, un peu comme s'il y avait une appartenance à une sorte de secte, les retours « pas de vagues » des dits gradés, les journées de l'inspection qui ressemblent à nos animations pédagogiques en élémentaire …
Le côté romancé derrière cet essai teinté d'érotisme est fort agréable et bien construit même s'il reste très court, le contenu majoritaire du livre étant basé sur « le travail » de Charlie, et on ne peut que l'applaudir pour son obstination à continuer à croire en une pédagogie meilleure même dans les zones d'éducation prioritaire ou sensibles.

Certains diraient que ce livre est trop caricatural, pour moi qui ai fait partie de la grande maison, ayant travaillé toute ma carrière en zone sensible, ce n'est que la réalité vraie, écrite avec les mots du coeur, un plaidoyer fort, qui aurait sa place entre les mains de nombreux inspecteurs …
Un livre que je conseille fortement pour ouvrir les yeux avec douceur sur une institution méconnue, volontairement peut-être …

Entre essai littéraire et chronique sociale, un pamphlet polémiste sur les affres du métier d'enseignant dans le milieu de l'éducation "prioritaire". Confronté à la misère sociale et intellectuelle, à la montée du séparatisme ethnique, culturel et religieux, à sa propre impuissance ainsi qu'à celle de ses pairs, Charlie Daniello oscille régulièrement entre enthousiasme et résignation, entre idéalisme et abattement. Ici, pas de moralisme bienpensant ni d'idéologie manichéenne: une "simple" immersion dans le quotidien d'un prof lambda qui fait ce qu'il peut pour vivre le mieux possible, si possible avec l'amour comme horizon...

Charlie, hussard grisâtre de l'éducation
Charlie est un professeur de langues dans un lycée professionnel, mollement motivé par son métier, guidé par la paresse plus que par l'ambition, sans grandes espérances, mais plutôt sympathique et apprécié par ses élèves – lorsque ceux-ci sont présents en classe. Charlie chronique sa vie sur un mode acide, pleinement conscient de ses manques, des manques de la société et de l'éducation nationale. Il s'échauffe quelquefois, lorsque sa libido le taraude ou qu'il se mêle de questions politiques. Heureusement, il garde un sens de l'humour intact, même s'il n'est pas apprécié par tous ses collègues. Via Charlie, l'auteur mène une réflexion sur les dérives du système éducatif, les petites et les grandes lâchetés qui gangrènent son fonctionnement, les communautarismes... Ses conclusions sont souvent rudes et déprimantes, mais argumentées, qu'on les partage ou pas. Caustique, drôle et informatif.