dans les grands périls, les cœurs dévoués se cherchent
La femme est sacrée ; la femme qu’on aime est sainte.
Une maîtresse, mon cher comte, cela se quitte, mais une femme, peste ! c’est autre chose, cela se garde éternellement
- Ah ! monsieur ! s'écria la comtesse, quelle terrible vengeance pour une faute que la fatalité m'a fait commettre ! Car la coupable, c'est moi, Edmond, et si vous avez à vous venger de quelqu'un, c'est de moi, qui ai manqué de force contre votre absence et mon isolement.
- Mais, s'écria Monte-Cristo, pourquoi étais je absent ? pourquoi étiez vous isolée ?
- Parce qu'on vous a arrêté, Edmond, parce que vous étiez prisonnier ?
Si endurcis au danger que soient les hommes, si bien prévenus qu'ils soient du péril, ils comprennent toujours, au frémissement de leur cœur et au frissonnement de leur chair, la différence énorme qui existe entre le rêve et la réalité, entre le projet et l'exécution.
Il n'y a ni bonheur ni malheur en ce monde, il y a la comparaison d'un état à un autre, voilà tout. Celui-là seul qui a éprouvé l'extrême infortune est apte à ressentir l'extrême félicité. Il faut avoir voulu mourir, Maximilien, pour savoir combien il est bon de vivre.
À peine les chevaux du comte avaient-ils tourné l’angle du boulevard, qu’Albert se retourna vers le comte en éclatant d’un rire trop bruyant pour ne pas être un peu forcé.
« Eh bien, lui dit-il, je vous demanderai, comme le roi Charles IX demandait à Catherine de Médicis après la Saint-Barthélemy : Comment trouvez-vous quej’ai joué mon petit rôle ? »
– À quel propos ? demanda Monte-Cristo.
– Mais à propos de l’installation de mon rival chez M. Danglars…
– Quel rival ?
– Parbleu ! quel rival ? votre protégé, M. Andrea Cavalcanti !
– Oh ! pas de mauvaises plaisanteries,vicomte ; je ne protège nullement M. Andrea, du moins près de M. Danglars.
– Et c’est le reproche que je vous ferais si le jeune homme avait besoin de protection. Mais, heureusement pour moi, il peut s’en passer.
– Comment ! vous croyez qu’il fait sa cour ?
– Je vous en réponds : il roule des yeux de soupirant et module des sons d’amoureux ; il aspire à la main de la fière Eugénie. Tiens, je viens de faire un vers !Parole d’honneur, ce n’est pas de ma faute. N’importe, je le répète : il aspire à la main de la fière Eugénie.
– Qu’importe, si l’on ne pense qu’à vous ?
– Ne dites pas cela, mon cher comte ; on me rudoie des deux côtés.
– Comment, des deux côtés ?