« Avec ton métier d'embaumeur, ta vie n'est qu'une histoire de trous. »
J'ai découvert
Isabelle Duquesnoy, grâce à une amie lectrice et à son roman La Pâqueline, qui serait la suite de
L'embaumeur. L'inversion des lectures n'est en rien gênante, car c'est la réponse du berger à la bergère ou vice versa.
Le plaisir de lecture est intact et trouble car le lecteur se délecte d'horreurs d'un réalisme absolue.
C'est dû à une plume lettrée et cultivée, accompagnée d'un esprit farceur, l'auteur joue avec nous avec brio.
Il s'appelle Victor Renard, il est sur le banc des accusés et pendant onze jours il va essayer d'échapper à la guillotine, le pourquoi vous ne le savez pas d'emblée et cela a peu d'importance finalement.
Il est même dépouillé de son prénom.
« On me surnomme Victordu, à cause de ma tête penchée sur le côté. Un torticolis congénital m'inflige cette posture que vous pourriez prendre pour une pitrerie. Je ne ressemble pas à ma mère, autrefois admirée tant pour sa beauté que pour sa tournure naturelle bien qu'elle fût de fort petite taille. Je suis laid, ramassé, et toujours atteint d'une acné dont j'ai passé l'âge. »
Sa mère, la Pâqueline dit de lui :
« Brave Victordu, bon à rien mais prêt à tout. »
A la naissance, ils étaient double, mais Isidore fût étranglé par le cordon de Victor, alors a paré le mort de toutes les qualités et le vivant de tous les défauts.
Le père meurt lorsque l'enfant est tout jeune, alors la veuve place Victor en pension.
A la fin du premier trimestre, la Pâqueline attend Victor à la sortie de la pension.
« Au regard d'autrui, elle était une bonne mère puisqu'elle chérissait son grand dadais. Qui pouvait deviner les moisissures du pain qu'elle me faisait avaler ? »
Alors pendant les onze jours de son procès, Victor Renard va se raconter, non pas se répandre, même s'il joue avec son auditoire, de plus en plus nombreux au fil des jours.
Il va être factuel et vous faire vivre sa vie.
Un règlement de comptes avec sa génitrice ?
Pour commencer sa vie d'homme, elle lui offre ce viatique :
« La grossesse, m'avait-elle révélé, le plus gros bide de ma carrière ! Une malédiction ! Une excroissance de chair qui pendouille ! Mon talent foudroyé en plein vol ! »
Un duo fils-mère inoubliable ! Un pugilat jouissif et désopilant.
Un roman-fresque inclassable, un langage cru sous une plume débridée, une odieuse confession ? A vous de juger, mais une chose est certaine, vous serez vite envoûtés par cette lecture addictive et vous en redemanderez.
©Chantal Lafon
Lien :
https://jai2motsavousdire.wo..