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Critique de Franz


Maupassant introduit le roman de Benoît Duteurtre, Les pieds dans l'eau, avec une description d'Etretat mise en exergue. Il souffle aussi à l'auteur le titre de son 1er chapitre, Sur l'eau mais l'histoire de Benoît Duteurtre démarre au début des années soixante et retourne volontiers en arrière, lors de l'acquisition de la « Villa Cheu Nous » rebaptisée « La Ramée » par son arrière-grand-père René Coty, en 1948. Par petites touches discrètes et dans un style fluide, l'auteur retrace ses villégiatures à Etretat et dépeint les us et coutumes d'une bourgade aux rituels indéboulonnables. L'ancienneté de l'implantation de l'estivant lui procure des lettres de noblesse au sein d'un cénacle à cheval sur ses principes : « A l'ombre des falaises normandes, chaque sortie à la plage ressemble à une lutte, recouvrant une infinité de plaisirs cachés. Imperceptibles au premier abord, ces plaisirs minuscules sont l'un des attraits de l'existence du Parisien à Etretat. […] mettre les pieds dans l'eau glacée, prendre un bain de soleil sur les cailloux, résister à la bise du nord en plein mois d'août, se baigner sous la pluie, accomplir inlassablement la même promenade entre deux pans de falaise. » Il suffit de relire la chronique De Maupassant, « Etretat », rédigée en 1880 pour le journal le Gaulois. On y retrouve des rituels identiques à ceux décrits par Benoît Duteurtre. le monde pourrait s'être figé pour toujours dans la station balnéaire normande mais il n'en est rien. L'auteur parle de menues choses qui s'évanouissent définitivement. Quand on les a connues, on peut les regretter. Il y avait un vrai bonheur à goûter aux délicieux Brésiliens meringués, nimbés de « Béné » de la pâtisserie fine Lecoeur, rue Alphonse Karr, à Etretat, juste avant d'entreprendre la balade des falaises d'aval en suivant les indications données par Maupassant dans sa correspondance avec Flaubert. Lecoeur a fermé. L'itinéraire a perdu en sauvagerie ce qu'il a gagné en aménagements. Par son écriture déliée, Benoît Duteurtre réveille des souvenirs pâlis, ravive des regards embrumés, rallume des sensations enfouies, tout cela avec beaucoup de délicatesse. Il y a de la bonté d'âme dans cette écriture, une manière naturelle d'être à la bonne distance du sujet, sans pathos, sans mépris, avec une réelle compassion : « Je ne trouvais pas le passé préférable en soi ; mais je le trouvais irrésistible au moment de disparaître, quand il se réduisait à quelques personnes, quelques conversations, quelques souvenirs ». Les pieds dans l'eau est un bon titre et un bon livre.
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