Phil Earle a su créer une palette de héros terriblement attachants. Certes, c'est loin d'être gagner pour Joseph qui est en rébellion contre le monde entier; colérique et impulsif, il faut faire preuve de patience pour apprivoiser cet enfant sauvage dont le passif explique le comportement. Miss Farrelly m'a particulièrement touchée : malgré son acte noble de recueillir Joseph, elle est fière, parfois dure et n'a pas du tout l'image d'une douce bienfaitrice. Néanmoins, elle est forte, indépendante et courageuse. Pour égayer ces deux aigris, il y a Syd, la voisine et camarade de classe. Et bien sûr, Adonis, le gorille.
Le risque, lorsqu'on a affaire à une amitié enfant/animal sauvage en jeunesse, c'est de tomber sur une relation idyllique avec une bête excessivement sociable. Il est appréciable de constater que ce n'est pas le cas ici. Même si Adonis peut interagir avec les autres, il n'en reste pas moins excessivement dangereux. Il n'est pas aussi présent que le laissent présager la couverture et le résumé. Cependant, il en impose à chaque apparition et fait naître une foule d'émotions chez les lecteurs.
Les héros, Adonis inclus, ont tous vécu quelque chose de difficile. J'ai été agréablement surprise de trouver dans ce roman historique une grande place pour évoquer la dyslexie, bien qu'elle ne soit jamais explicitement nommée. Si aujourd'hui elle est reconnue et facilement décelable, ce n'était pas le cas dans les années 40 et elle plonge la personne qui en est atteinte dans la détresse la plus totale : isolée et incomprise.
Mais la plus grande coupable de la détresse des personnages, c'est la guerre. Aucune scène de sang ou de violence n'est à notifier; on constate juste les ravages qu'elle laisse derrière elle… A l'instar du Réseau Phénix de
Peggy Boudeville, je trouve qu'on est face à un roman jeunesse qui prend le parti de ne pas édulcorer la réalité de la Seconde Guerre mondiale : les soldats qui partent au front et qui souvent ne reviennent pas, les civils qui vivent généralement dans une grande misère et qui ne sont pas épargnés par la mort non plus, etc. Au travers des déboires de Joseph, c'est un livre qui nous apprend plein de choses sur cette époque sombre, surtout quand on sait qu'il est inspiré d'une histoire vraie.
Je préfère en dire le moins possible sur le contenu des péripéties dans les chroniques que je vous fais : cette fois, je préfère préciser tout de même pour les jeunes lecteurs que l'histoire n'a pas de happy end. Attention donc aux âmes sensibles.
Quand le ciel gronde fait partie de ces lectures qui laissent une marque indélébile dans le coeur de ceux qui l'ont lu. Les héros nous touchent par leur côté profondément humain, si bien qu'il est impossible de ne pas s'émouvoir face à leur histoire. Merci à
Phil Earle pour ce splendide récit et aux éditions Auzou d'en avoir fait la retranscription.
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