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Citations sur La scène à paillettes (7)

[...] ... Ces paroles-là, non pour une effet "solennel" mais parce que c'étaient ces paroles-là qu'on pouvait ressentir dans son corps, qui étaient d'une certaine manière déjà là, déposées en vous, et quand on les entendait, ces paroles, ça se ranimait : quelque chose de grand, un scintillement qui est le temps, pas dans le sens habituel mais comme une archéologie en vous, et pareil chez les autres, chez les êtres humains en général. Un instant ressentir aussi cela : cette participation. Que, d'une certaine façon, nous sommes tous les mêmes, que nous portons en nous le même paysage - et le même temps. Qu'il existe, a existé, un autre temps. Du temps qui n'est pas secondes minutes jours années décennies, ni ma vie, ni l'histoire de ma famille - mais du temps comme dans "les générations suivent le destin des générations." Un temps plus vaste, un paysage, le temps de tous.

Marcher en Dieu dans le temps, dans un paysage que nous partageons : nous faisons partie les uns des autres et parfois nous pouvons en avoir l'intuition fugitive. Une femme découpant des vêtements au-dessus d'un seau, longues bandelettes, soie velours guenille chiffon -

Dans cette langue-là, il y avait de la place. Pour tout. Je ne suis pas sans espace.

Et alors, dans ce temps-là, un instant, un fragment, voir sa propre vie. Un fragment dans un paysage avec des fragments d'autres paysages en soi, les paysages des autres. Par-delà toutes les limites. Par-delà les étroites frontières familiales, bien sûr : papa maman enfant, un héritage par-delà ces héritages-là, mais comprenant aussi ceux-là. Et avec quelle évidence il y avait aussi de la place dans ce paysage-là pour LA JOURNEE DU DESIR. Une vieillerie qui n'est pas toi mais qui est née en toi. La Putain Joyeuse, la Fille de Bornéo, whatever ; ce sont, n'étaient, que des appellations. Tout comme la Raclure, ainsi que ça s'était appelé un temps après l'enfance, l'enfance où il y avait eu un sens intuitif inné pour ce qui était soi et pourtant tellement plus grand que soi. Mais la Raclure alors, ainsi nommée par Tom Maalamaa, son altesse royale adossée à Gustav Mahler. La princesse du presbytère qui était l'héritière des mots, mais les mots soudain étaient là pour lui, il en avait fait sa propriété, et cette petite amie pathétique qui levait les yeux au ciel en silence à ses côtés. Parlant, acquiesçant, comme sur commande. En même temps, bien sûr, c'était plus facile : être d'accord, ça ne demandait pas de résistance. Etre dans son paysage à lui, qui se fortifiait plus il parlait, acquérait un cadre, le cadre de ses mots à lui, jusqu'à devenir le seul cadre possible.

Si bien que si on se trouvait être sa soeur Maj-Gun, on devenait pour sa part, tout entière, un excès. ... [...]
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[...] ... Les jumelles. Rita, Solveig, de la maison des cousins. Voilà pourquoi la baronne se rendait au marais de Bule ! Elle allait les retrouver. Les jumelles, toujours fourrées au marais, tôt le matin quand les honnêtes gens dormaient encore. Pour "s'entraîner." Devenir "championnes de natation." Et puis quoi encore ? Quel ramdam autour de ce "potentiel" qu'elles s'estimaient avoir. Dont elles se vantaient à tour de bras en faisant semblant de parler entre elles, mais à haute et intelligible voix pour que tout le monde l'entende. Et blabla, et que je te détaille tous les "sacrifices" requis, toutes les "exigences", "s'entraîner, s'entraîner, s'entraîner ..."

Oui, oui. Bien possible qu'on ait eu ce genre de pensées dans le Coin, à l'époque déjà, avant que tout n'arrive. Genre : pour qui se prenaient-elles, ces deux-là ? Ho ! En vrai, elles n'avaient vraiment rien d'extraordinaire. Pas de quoi s'exciter. Cette "maison des cousins" par exemple, d'où elles sortaient - c'était quoi, exactement, comme endroit ?

Dans ce nouveau contexte, voilà qu'on se rappelle tout ce qu'on croit savoir à leur sujet, pas grand chose, mais tout de même bien étrange. L'horrible vieux, celui qu'on appelait le "père des cousins", qui avait gagné le terrain au jeu, les parents morts - quel genre de "danseurs", au fait, ces deux-là ? Des forains, des artistes de cirque ? Et puis soudain un souvenir, tel l'éclair : musique de danse s'échappant par une fenêtre ouverte, rideaux fermés. Notes de rumba. Un rythme entêtant, hypnotique, par les jours d'été chauds et sans vent, autour de la villa de la Première Pointe. Le danseur et sa femme, qui s'entraînaient dans le grand salon en vue d'un concours de danse.

Ce rythme-là, et les enfants silencieux. Les trois maudits. Et, plus tard, après l'accident, les trois enfants en rang d'oignons, grands et costauds tous les trois, ils avaient toujours fait plus que leur âge, adossés au soubassement de pierre de la villa.

Note de rumba, entêtantes, comme si on pouvait encore entendre la musique autour d'eux.

Un tel héritage, un tel mauvais sang dans les gènes.

On frissonne quand on y pense. Ces enfants-là. ... [...]
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Mais ce n’était pas d’un autre côté, le genre de choses qu’on était prêt à admettre. Sa peur. Cette ‘répugnance - là’. Et alors dans une telle situation, la réflexion venait à vous (et la réflexion était justement faite pour venir à vous dans ce genre de situation) avec le message suivant : qu’on était jeune, qu’on avait l’avenir devant soi, garçon prometteur, Mission à accomplir, agir pour, genre, l’humanité. Et Gustav Mahler, mais de façon mesurée, pas de la manière dont ç’avait débordé derrière la porte de la chambre avec la petite amie dans les pires moments, pour atténuer l’angoisse du reniement - car on pouvait dire ce qu’on voulait de Tom, il n’était pas bête - de sa soeur en sa qualité de Putain joyeuse, comme une appellation joyeuse, pas scabreuse, juste hamba hamba, dans un état ouvert, illimité de l’enfance, mais qu’on ne laissait pas entrer dans la chambre et qui restait donc dehors, à tambouriner contre la porte.
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La vie comme une suite de pièces ou de chambres, Suzette. C’est ce qu’elle disait, pendant qu’on découpait les bandes de tissu dans la cuisine - une ambiance spéciale qui, une fois qu’on l’a connue, ne vous quitte plus jamais. Chambres, chambres, chambres, on peut entrer, sortir, continuer vers de nouvelles chambres, de nouvelles pièces. Cette maison là, à quoi elle ressemble de l’intérieur, on ne le sait pas, même si on croit que oui… soudain on se retrouve … pas dans une cave, ni dans un grenier poussiéreux… Mais peut-être juste quelque part où c’est … vide.
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Projet Terre. Orphée qui voulait rejoindre son Eurydice. Ce qu'on a perdu. Dans le monde d'en bas. Le Jardin d'hiver. Les chambres souterraines. Qui brûlent, disparaissent. On n'y est jamais allée. Et pourtant : on a jamais cessé d'y être.
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Ceci, au début, est plus court. Soudain, les allées, la Roseraie 2, l'obscurité où elle roule, dans la voiture, après les grilles du portail qui se sont refermées derrière elle, elle se reconnaît.
Cela tient peut-être aux arbres, les mêmes arbres alignés au bord de l'allée comme s'ils avaient toujours été là. Et aux maisons, hautes, plusieurs étages, même s'il y a de la lumière à presque toutes les fenêtres, ce qui n'avait pas été le cas de son temps. Elle s'en souvient. Tabula Rasa. N'être rien, et neuve. Cette possibilité-là. Tournoyer dans les allées, un jour d'automne, du soleil alors.
Mon amour, ma vie, tournoyer, rien et neuve.
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L'enfant, Fluorescent. Johanna. Dans la chambre des rêves, du temps, de l'histoire. Elle épingle au mur L'enfant, Fluorescent. La femme au milieu d'un champ avec l'enfant dans les bras, photographie en noir en blanc, orage, éclairs. L'enfant de lumière / dans la lumière.
Une explosion ; transcendance.
Elle est l'enfant. Fluorescent, c'est son nom.
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