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Critiques filtrées sur 5 étoiles  

Un fils connait il son père, peut il entrer dans son histoire, comprendre le sens que celui ci a donné à sa vie, deviner ce qui le tient debout? Pour Philippe Forest, la réponse est non, et, puisque, l'âge étant venu avec aucun espoir que cela s'arrange, son père déclarant : « la vieillesse, un naufrage » il recherche les dates de sa naissance, de la rencontre romanesque avec sa mère, de leur mariage, il reconstitue ce qu'a pu être la vie de son géniteur, après le naufrage définitif, cependant en n'étant sûr de rien, en n'écartant pas d'autres vies possibles, en essayant de s'approcher le plus possible du vraisemblable.


Son père était pilote de ligne, au moment de la création de l'aviation, au moment où l'aviation cesse d'être un art de la guerre, une machine meurtrière destinée à terroriser, pour devenir un voyage à travers les nuages, les merveilleux nuages, un symbole de la liberté et de l'unification du monde. Et cette vie dans les nuages, par sa complexité, devient irracontable, le père est plus souvent en l'air que sur terre avec la famille qu'il a fondé. D'ailleurs, lorsque les enfants entendent parler d'Anchorage et de Karachi, ils savourent la poésie du nom, mais ne cherchent pas plus loin. Impossible dialogue entre parents et enfants, communication sans mots, et qui trouve un dénouement tragique quand une des petites filles de 4 ans meure, nous savons que c'est la fille de Philippe Forest, crucifié par ce drame qu'aucune raison ne peut accepter, la mort d'un innocent.

Philipe Forest, en un langage digne de Proust, qu'il connait parfaitement, tisse l'histoire de ce père lointain -qui très certainement est mort à cause de la mort de sa petite- avec l'histoire de l'aviation, de ses différents héros, de l'anti héros(Lindbergh, lui aussi ayant perdu son fils, et devenu nazi, )de ses dangers, des crashs divers et des disparitions sans explication ainsi qu'avec l'histoire qui a ponctué le siècle dernier en France: l'exode, les bombardements, l'occupation.

Proust n'est pas nommé par hasard, lui qui a offert à son amant un aéroplane, amant qui s'est tué en mai 1914 ( les dates, toujours, puisqu' on ne s'accroche pas à l'espérance d'une vie après la mort, il faut s'accrocher aux dates de cette vie ci, pas une autre.)Et Proust écrit Sodome et Gomorrhe ; lorsqu'il aperçoit dans l'or et le bleu du ciel un avion « à ses yeux comme un fantôme ami dont le pathétique passage dit à la fois , et c'est cet « à la fois »qui compte, l'adieu irréparable à la vie et le salut célébrant la nécessaire et nouvelle naissance du monde », commente Forest.

Forest, avec son chagrin intégral, la perte, prie sans mot, puisqu'il n'espère aucune consolation donnée par les mots, puisqu'il ne croit pas en un autre monde de salvation, aucun secours non plus en la croyance en un autre monde, cependant ne serait ce que « sous la forme mutique d'une prière faite par n'importe qui et pour personne, » les mots doivent être dits.

D'où son roman, pas facile au premier abord, un peu comme les différentes expériences que nous faisons d'autrui. Philippe Forest essaie de faire connaissance avec son père, se souvient même de petits gestes ( faire une croix sur la miche de pain, pleurer son chien « et pleurant sur l'insignifiance pathétique de cette mort comme pour témoigner, un instant et pour l'éternité, du long, amer et inexpiable chagrin de la vie ».) et nous présente un livre bouleversant.
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A travers l'histoire de son père, pilote de ligne, l'auteur nous invite à le suivre dans ce XXe siècle qu'il explore dans toutes ses dimensions.
Servi par un style plein de nuances et de finesse, ce livre est un grand livre à lire à relire et à garder auprès de soi.
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