- Toutes les voitures fabriquées en gros après 1980 ont des circuits intégrés électroniques, répondit John. Les carburateurs, c'est du passé; maintenant on a l'injection électronique et le démarrage électronique. C'est pour ça que la vieille Edsel de ma belle-mère et les VW de Bartlett roulent encore. Il n'y a pas d'ordinateur dans le moteur, et dans la radio, ce sont encore des tubes à vide. La surtension n'a donc rien à griller. Aujourd'hui, tout dans une voiture est relié à une sorte d'ordinateur. Vive la technologie moderne...
Le nouveau testeur de glycémie était une petite merveille de technologie équipée d'un ordinateur qui calculait et archivait chaque examen sanguin. La semaine prochaine, Jennifer était censée se faire implanter l'une de ces toutes récentes pompes à insuline...et quelque chose lui disait qu'il devait s'estimer heureux de ne pas l'avoir encore fait.
- Papa, il y a quelque chose de bizarre.
- Ah, oui ?
- Écoute.
Il tendit l'oreille. C'était une tranquille soirée de printemps, dont le silence n'était entrecoupé que par le pépiement des oiseaux et l'aboiement d'un chien, au loin...des sons plutôt agréables, en fait.
- Je n'entends rien.
- Exactement, papa. Il n'y a pas de bruit sur l'autoroute.
Il se tourna vers la vallée. La route était loin derrière les arbres, mais sa fille avait raison, il régnait un silence absolu. Ce n'était qu'une fois installé dans cette maison qu'il avait compris son erreur; juste un petit détail qu'il avait négligé en la visitant...mais qui lui avait sauté aux oreilles dès la première nuit: le bruit incessant de la circulation sur l'autoroute, à moins d'un kilomètre de là.
Le téléphone devint subitement muet.
Au même instant, le ventilateur ralentit, la stéréo de Jennifer se tut, et, tourné vers l’alcôve qui lui servait de bureau, John vit l’écran de son ordinateur s’éteindre, tout comme la petite veilleuse verte du bouton d’arrêt. Résonna alors un bip strident, signalant que les systèmes de surveillance et d’alarme incendie ne fonctionnaient plus. Puis, là aussi, ce fut le silence.
Sortant du bureau, venait d’apparaître Tom Barker, le chef de la police.
— Merde, marmonna Jim. Il ne manquait plus que celui-là…
— Tom, comment ça va ? demanda calmement John.
— Comme un chien sans pattes, couvert de puces et qui ne peut pas se gratter, répliqua-t-il.
- Pas ici, se lamenta Charlie. Pas ici, on est en Amérique, bon dieu !
- Si, ici, répliqua John. Pourquoi serait on différents ?
- Non, on est américains ! Ca ne peut pas arriver ici.
C'est le silence qui nous rend fous. Personne ne sait ce qui se passe, ce qu'on est peut-être en train de faire en haut lieu, si on est vraiment en guerre, et, dans ce cas, contre qui et quelle en est l'issue. On se trouve aussi isolés que... je ne sais pas, quelqu'un en Europe il y a sept cents ans, quand le bruit courait que les Tartares arrivaient ou que sévissait une épidémie de peste dans le village voisin.