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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Choses qui vivent dans le ciel
Les oiseaux
Les libellules
Les nuages
Les chauves-souris
Les étoiles
La lune
Mademoiselle Emily
(p.143)

A l'instar de sa soeur Lavinia, Dominique Fortier s'empare de l'oeuvre d'Emily Dickinson
Lorsque le 15 mai 1886, Emily Dickinson, alors parfaite inconnue, décède, un microcosme s'agite autour de ses écrits.
Si sa soeur Lavinia a respecté ses dernières volontés en jetant ses lettres au feu, une intuition la retient d'y jeter ses nombreux poèmes dont elle découvre avec surprise l'existence. Que faire de tous ces petits bouts de papier griffonnés à la hâte, dans l'urgence, parfois sur des emballages ?
Avec beaucoup de délicatesse et une plume poétique, Dominique Fortier reconstitue l'atmosphère de la maison presque vide, qui n'est plus habitée que par Lavinia, ses chats et quelques fantômes.

« Cela la frappe à ce moment-là, en plein soleil : ses fantômes n'habitent pas à la maison, ni même le cimetière, c'est elle qu'ils habitent, elle les transporte partout où elle va. Elle est, nous sommes des assemblages de poupées russes, spectres, souvenirs, disparus jusqu'au coeur en bois vivant et mort à la fois, jamais à l'abri d'une flambée. (p.133) »

Emily a écrit sans tenir compte des codes de la poésie en vogue à l'époque comme de donner un titre à chaque poème, elle met des majuscules où ça lui chante, des tirets un peu partout, en faisant fi des conventions. Qu'à cela ne tienne, l'éditeur Thomas Higginson et Mabel Todd chargée de déchiffrer les pattes de mouche d'Emily remettront « de l'ordre » dans tout cela. Il faudra ainsi attendre 1955 pour que paraisse un recueil au plus près de l'écriture d'Emily Dickinson.

« Elle [Lavinia] voudrait dire que, pour ce qu'elle en comprend, la poésie de sa soeur est le contraire de la correction, qu'elle appartient au domaine de la faute, de ce qui ne figure ni dans les manuels ni dans les dictionnaires, qu'elle réside dans cette distance qui l'éloigne de ce qui est normal, attendu, que la poésie vit dans cette surprise, qu'elle se construit avec de l'étonnement comme la ruche se construit avec du miel. Les poèmes d'Emily sont le contraire d'une ligne droite - labyrinthe, vol d'abeille - en même temps qu'ils vont droit vers leur but, comme la flèche vers sa cible, qu'ils sont à la fois à la flèche, la cible, la main qui tire et l'air fendu par la pointe d'acier. » (p.123)

A pas de louve, Dominique Fortier retisse avec patience les fils entre les personnages.
L'auteure a une très belle écriture, douce, dépouillée, lumineuse, elle touche au coeur avec ses mots. le lecteur se coule dans la vie solitaire et austère de Lavinia et suit avec bonheur l'attachante petite Millicent, fille de Mabel, qui avec son coeur d'enfant est celle qui comprend le mieux les poèmes d'Emily, dont elle deviendra plus tard l'une des plus grandes spécialistes.
Un livre hommage contemplatif, sensible et profond, qui donne envie de découvrir l'oeuvre d'Emily Dickinson, ainsi que le précédent livre de Dominique Fortier, « Les villes de papier » sur la vie de celle reconnue aujourd'hui comme l'une des plus grandes poétesses américaines.
Mon bémol serait que malgré la beauté de certains passages, les nombreuses libertés prises par l'auteure m'ont parfois un peu dérangée, l'histoire étant beaucoup plus romancée que fidèle à la réalité. Les nombreuses projections de Dominique Fortier sur les sentiments prêtés aux personnages prennent beaucoup de place. Cependant, pour ceux, qui comme moi, ne connaissaient pas l'histoire des Dickinson, ce roman se révèle riche en enseignements.

« Quand elle pense à Emily, à Gilbert ou à sa cousine Sophia, morte à quinze ans, Lavinia les voit tels qu'ils étaient au printemps ou à l'été de leur vie, insouciants comme des chiots. Mais elle sait que la vérité est tout autre, plus merveilleuse encore ; leurs chairs fragiles se sont défaites, leurs os sont aussi lisses que les touches d'un piano, leurs cheveux, telles des soies d'araignée, leurs coeurs, leurs poumons, le blanc de leurs yeux et la pulpe rose de leurs doigts sont allés rejoindre la terre et ils nourrissent l'herbe tendre, ils sont devenus saule, tilleul, sycomore, il servent de maison aux oiseaux et leurs bras grands étendus touchent enfin les étoiles dans le ciel.
Au jardin, à la tombée du jour, les lucioles dessinent des guirlandes mouvantes, qui dansent un instant et se défont aussitôt. Lavinia les observe de la fenêtre de la cuisine, empêche les chats de sortir pour ne pas troubler les fées. Lorsqu'elle monte à l'étage, des heures plus tard, en passant devant la chambre d'Emily, dont la porte est entrouverte, elle découvre qu'une mouche à feu, une seule, est entrée dans la maison et clignote au-dessus de l'oreiller. » (p.114 115)
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I'M NOBODY ! WHO ARE YOU ?

Les Ombres blanches... qui sont ces ombres ?
Celle d'Emily Dickinson, la poétesse recluse. C'est de son oeuvre poétique qu'il s'agira au fil des pages, pas d'elle. Elle vient de mourir au début du roman.
Celle de Lavinia, la soeur d'Emily. Celle qui a brûlé ses lettres, mais qui n'avait pas d'instruction concernant la poésie... et donc veut la faire éditer.
Celle de Susan, la meilleure amie d'Emily mais aussi sa belle-soeur, la femme d'Austin. La femme trompée et malheureuse.
Celle de Mabel, la maitresse d'Austin, celle qui aura la tâche de recopier et d'éditer les poèmes d'Emily. Celle par qui nous connaissons Emily Dickinson.

Et là est l'esprit de ce roman, cet entrelac de femmes qui ont permis que nous soit connu cette poésie diaphane et aérienne.
Les Ombres blanches nous parle de deuil aussi, beaucoup... mais il transpire de la poésie de son personnage principal.

Attention, c'est une suite, celle des Villes de Papier, mais les deux romans peuvent se lire de façon indépendante.




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Très beau roman avec une écriture poétique et envoutante. Nous plongeons au 19eme siècle avec une facilité déconcertante et rentrons dans l'intimité d'une famille qui fait face à la mort d'une des siennes.
L'auteur nous parle d'une famille en plein deuil, une famille qui pleure la mort d'un grande poétesse, Emily Dickinson. Un deuil sous plusieurs angles différents, un deuil vécu parsa soeur, belle-soeur et amie, amante de son frère et la fille de celle-ci.
Que faire après la mort d'un être si cher et qui laisse derrière lui un nombre important de poèmes et correspondances ? Un être qui voulait que tout soit détruit. L'amour d'une soeur va enfreindre ce testament pour rendre éternelle la plume d'Emily.
L'amour, la mort, les mots et l'espoir portent ce magnifique roman.
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Chacun connaît aujourd'hui les poèmes d'Emily Dickinson (1830-1886). Mais cette poétesse recluse à Homestead, sa demeure d'Amherst, n'a pratiquement rien publié de son vivant. Quelques jours avant sa mort, elle demande à sa soeur Lavinia de brûler tous ses écrits. Si Lavinia détruit sa riche correspondance et ses journaux intimes, elle ne peut se résoudre à brûler ses carnets, toutes ses pages noircies de poèmes aux formes étranges.
Lavinia est une vieille fille, désormais seule avec ses chats et ses fantômes dans la demeure d'Homestead. Mais à Amherst vivent aussi son frère Austin et Susan, sa femme. Susan, la meilleure amie d'Emily, est désormais une femme éteinte. Brisée par le deuil d'un enfant, elle est trahie par son mari qui a une liaison avec la jeune Mabel, l'épouse d'un professeur d'astronomie du collège d'Amherst.
Lavinia souhaite faire publier les poèmes de sa soeur. Mais Thomas Higginson, écrivain et maître d'Emily, juge indéchiffrable les écrits disparates de la poétesse.
Comme Susan, anéantie, ne peut prendre en charge ce travail de déchiffrage, elle confie cette lourde tâche à Mabel.
Dominique Fortier crée une jolie atmosphère. Sous l'ombre des disparus, et la meurtrissure des vivants, nous découvrons toute la délicatesse des personnages. Au fil du travail, de l'émergence de la poésie, de la perception d'un héritage, les personnalités s'ouvrent à la vie. Amours naissantes, vocation révélée, maternité retrouvée sous le regard touchant d'une petite fille réceptive à la beauté du monde. Millicent, la petite fille de Mabel, curieuse de son environnement grâce au regard de son père, a cette formidable perception de voir le beau et de le transmettre.
En plus de découvrir comment l'oeuvre d'Emily Dickinson fut portée à l'immortalité, j'ai croisé ici des personnages d'une grande sensibilité. Une belle sensation qui donne envie de lire Les villes de papier, premier tome consacré à la vie d'Emily Dickinson

Lien : https://surlaroutedejostein...
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Le roman de Dominique Fortier a fait mouche. Après "Les villes de papier" où l'auteure imaginait la vie de la poétesse Emily Dickinson, elle écrit ici l'histoire des femmes ayant permis la publication à titre posthume de son oeuvre. Tout démarre donc au moment du décès d'Emily Dickinson qui laisse un grand vide auprès de sa soeur, Lavinia, sa meilleure amie et belle-soeur, Susan et la maitresse de son frère, Mabel. Emily a laissé des instructions précises concernant sa correspondance : il faut la détruire. En revanche rien sur les tonnes de poèmes qu'elle a laissés et toujours refusés de publier. de là à en conclure qu'elle autorisait implicitement leur édition à titre posthume, il n'y a qu'un pas. Alors à partir des écrits d'Emily, petites pattes mouches parfois illisibles, ces femmes vont reconstituer, réorganiser, classer, finaliser l'oeuvre de la poétesse pour en faire un véritable livre 😯. En publiant ces poèmes elles cherchent à faire renaitre Emily ou tout simplement à continuer à passer du temps avec cet être singulier qui leur manque tant.
"Les ombres blanches" est tout à la fois un roman sur la création littéraire, sur le deuil, sur l'incroyable pouvoir des mots mais aussi sur l'espoir qui renait chez ces femmes toutes abîmées par la vie. Un très joli roman 💜💜💜.
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Après Les villes de papier, dans lequel Dominique Fortier imaginait la vie d'Emily Dickinson, elle s'intéresse dans Les ombres blanches aux "fantômes" qui écrivent et peuplent les livres.
Sans sa soeur Lavinia, son amie Susan et même sans Mabel, la maîtresse de son frère, l'oeuvre d'Emily Dickinson ne serait jamais parvenue jusqu'à nous.

C'est l'histoire de ces femmes et leur rapport à la poétesse qui est au coeur de ce roman.
Alors que Lavinia et Susan souhaitent prolonger la présence d'Emily au travers de ses écrits, Mabel a un rapport plus égocentrique à ce livre auquel donner vie. Enfin Millicent, la fille de Mabel, ne connaîtra "Mademoiselle Emily" que de façon posthume mais non moins intense.

Texte lumineux, vivant et poétique, Les ombres blanches traite du deuil et de l'absence et touche au coeur.
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Dominique Fortier nous offre une suite à son essai Les villes de papier et retrace l'histoire de la publication de l'oeuvre posthume d'Emily Dickinson. L'auteure s'est inspirée de personnages réels et a respecté les principaux jalons de cette mise en édition, mais il y a une part d'invention dans les actions et les sentiments des protagonistes. J'ai aimé le style fluide, la présence encore toute vibrante de la poète américaine dans le souvenir et le présent de sa soeur, sa belle-soeur, l'amante de son frère et Millicent, la fille de celle-ci si attachante. Un beau roman donc où la poésie affleure dans les gestes et les propos même les plus quotidiens. Une belle lecture à savourer. Je
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La première partie m'a très vite happée. le style était fluide, l'écriture rythmée. Découvrir les personnes qui ont gravité autour d'Emily et savoir comment ses oeuvres nous sont parvenues étaient passionnants. Malheureusement c'était trop beau pour continué…
Comme dans le premier roman, l'autrice fait un parallèle avec se propre vie et j'ai trouvé que cela cassait le rythme et en alourdissait le propos.
Enfin, je trouve le procédé de donner le mauvais rôle aux hommes (notamment l'éditeur) dommageable et à la limite de la mauvaise foi historique. Et l'absence de bibliographie accentue cet aspect de travestir la réalité.
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