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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Sept ans après la chute du Mur de Berlin, Anna Funder, journaliste australienne passionnée par l'Allemagne et son histoire, est partie en ex-RDA sur les traces des victimes du régime communiste et des dirigeants de la Stasi, l'ancienne police secrète du régime de l'Allemagne de l'Est. Les témoignages qu'elle a pus recueillir nous révèlent des vies ordinaires brisées et des histoires individuelles glaçantes. Dans un monde ultra surveillé où la paranoïa, la manipulation et la délation déformaient la vérité, les victimes avaient peu de chances de pouvoir se défendre. Tel est le cas de Myriam arrêtée à seize ans pour avoir distribué des tracts et qui recherche toujours les circonstances de la mort de son mari soi-disant suicidé pendant son incarcération. C'est également Julia, emprisonnée pour être tombée amoureuse d'un Italien et pour ne pas avoir voulu coopérer avec la Stasi contre sa famille. Des victimes de ce régime policier et totalitaire, il y en a encore beaucoup… Anna Funder s'est également intéressée aux bourreaux et a pu en rencontrer quelques-uns. Elle nous parle ainsi de cet agent zélé qui se faisait passer pour un aveugle afin de mieux espionner les gens à leur insu. Très souvent, c'est la nostalgie qui se ressent dans leur propos, mais certainement pas les regrets pour les brimades et les tortures de gens arrêtés arbitrairement.

« Stasiland » nous décrit une époque hallucinante, une société où la vie quotidienne était totalement oppressante. La machine infernale de la Stasi y est parfaitement décrite entre les méthodes de surveillance, les arrestations arbitraires et les interrogatoires où menaces et manipulation psychologique était le mot d'ordre. Si cette enquête se lit comme un roman, c'est avant tout parce qu'Anna Funder n'a pas caché son émotion face aux propos qu'elle recueillait. Les entretiens sont mêlés à ses propres observations, ce qui dénote parfois en effet un manque d'objectivité. Pour autant, son livre est le remarquable témoignage d'une période complexe et revient sur l'histoire d'une partie d'un pays qui, de manière stupéfiante, est passé d'un régime totalitaire à un autre. Surtout, la journaliste australienne permet aux victimes d'exprimer leur douleur et leur incompréhension et révèle des personnes partagées entre la volonté de se souvenir et d'oublier.

Un récit passionnant donc, teinté de l'empathie de l'auteur pour les victimes de la Stasi, mais qui a le mérite de nous faire découvrir une période de l'histoire de l'Allemagne de manière très vivante. J'ai pour ma part été totalement immergée dans cette enquête. Une très bonne lecture.
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J'ai acheté ce livre dans la boutique souvenir de la prison de la Stasi, Hohenschönhausen. Cette indication accessoire colle parfaitement à la dimension paradoxale du rapport des Allemands à la RDA, qui donne à ce livre son titre de Stasiland (évidemment une référence à Disneyland, au marché en toc du souvenir et de la nostalgie autour de la chute du Mur ).

Le livre commence un peu à dater, et le phénomène de l'Ostalgie est, sinon populaire, néanmoins connu. On a toutefois peu d'occasions de se plonger réellement dans la vie de la RDA par des intimités racontées d'une part par des citoyens (compilées par une Australienne, en-dehors du spectre de la nostalgie) et par des anciens agents de ma Stasi de l'autre. Si Berlin et les sujets liés à la RDA vous intéressent, vous pouvez vous ruer dessus : le récit mêle habilement l'histoire à L Histoire, avec des témoignages parfois poignants, écoeurants ou importants (on trouve des témoignages de Karl Eduard von Schnitzler, figure de la télévision de RDA qui décryptait les programmes de l'Ouest pour en dénoncer la propagande, encore totalement illuminé et enthousiaste, ou le témoignage ambivalent mais intéressant de Hagen Koch, cartographe du mur).

Le livre est d'autant plus intéressant qu'Anna Funder nous fait part de ses réflexions personnelles, sur un sujet qui n'intéressait pas ou peu les allemands de l'Ouest : qui s'intéresserait à la vie d'anciens habitants d'un pays fantomatique et éteint, que l'on a cherché à effacer de la carte ? Les musées sur le sujet sont soit dans leur jus, soit lissés, commerciaux, détachés d'un sujet pourtant viscéral.

Un livre réellement fascinant, admirablement mené, qui laisse mesurer l'ampleur immense de l'absurdité d'une société de contrôle absolue, désormais derrière nous, fort heureusement !
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Anna Funder est une autrice australienne qui a étudié (entre autres) la littérature anglaise et pour laquelle les séjours à Berlin, la connaissance de la langue allemande et l'intérêt pour les droits humains étaient sans doute des blocs de construction nécessaires à la rédaction de son ouvrage passionnant, Stasiland.

Afin d'écrire son livre, qu'on pourrait également qualifier de reportage ou témoignage, Anna Funder a donné la parole à des personnes de camps opposés pour ensuite reconstituer un tableau représentant la (ex-)RDA : les victimes du régime totalitaire d'un côté et les membres de la Stasi de l'autre. Venant d'un autre continent et grâce à de nombreuses recherches, Anna Funder a su poser un regard nouveau sur la vie et le fonctionnement de cette machine incroyable que fut la RDA, le « rêve socialiste » basé sur l'espionnage et mensonge.

Les destins de Miriam, Frau Paul ou Julia sont poignants et servent de douche froide à ceux dont les connaissances de l'Allemagne de l'Est se résument à des photos d'une trabi, au film Good Bye, Lenin ! ou aux bisous passionnés devant le Mur de Berlin entre Brejnev et Honecker. Ces histoires de vies brisées alternent avec des rencontres entre Anna Funder et les anciens officiers de la Stasi ou leurs collaborateurs. Ceux-ci ne font pas part de remords, loin de là, mais témoignent du travail « bien fait », de devoir envers le système et frappent par leur capacité à s'adapter aux temps nouveaux grâce à de nombreux entraînements ou formations (notamment l'art de manipuler), tout en contraste avec leur victimes, incapables de se reconstruire.

Certaines informations font tristement écho à des articles de presse contemporains – l'emprisonnement des opposants avant des événements importants (pour que ces derniers ne nuisent pas à la bonne image du régime), la désinformation dans les médias (exercées par le régime totalitaire à l'Ouest par l'intermédiaire des agents), la valeur nulle de la vie humaine, la retranscription des manuels scolaires, des pseudo avocats ou juges…

Outre des faits connus, j'ai appris l'existence des femmes-puzzles de Nuremberg qui essaient de recoller des milliers de bouts de papiers que les membres de la Stasi ont déchirés à la fin de 1989 avant que leur bateau ne coule définitivement. le nombre de sacs s'élève à 16.000 (!), chiffre qui illustre parfaitement l'étendu de l'espionnage des citoyens. Il faudrait encore 400 ans pour recoller tous les documents, mais les nouvelles technologies offrent de l'espoir aux victimes qui souhaitent enfin comprendre certains éléments de leurs vies.

Anna Funder touche à toutes les facettes du système d'autrefois : les fuites vers l'Ouest, le chantage, les tortures, les « suicides » (le régime ne se préoccupaient même pas de fabriquer un camouflage à peu près crédible), ainsi que les différentes perceptions des citoyens (des dissidents, ceux qui s'adaptent, ceux qui vivent dans l'ostalgie des bons vieux temps alias « on n'a pas besoin de bananes« ) mais elle laisse le lecteur respirer à quelques moments en décrivant par exemple l'architecture de Berlin ou en donnant l'envie de visionner la danse nommée Lipsi.

Au final, Anna Funder a su brosser un tableau passionnant et riche d'informations d'une période pas si lointaine qui met en garde contre les régimes totalitaires et qui devrait faire partie des lectures imposées à l'école. A lire et à offrir !
Lien : https://etsionbouquinait.com..
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Anna Funder nous amène au coeur de l'ex-RDA, découvrir les plus intimes rouages de la STASI, ce système pernicieux mais hautement sophistiqué d'espionnage «démocratique».
Les témoignages viennent étayer l'idée que l'on se fait de cette institution, rivalisant avec la CIA (des guignols à côté !) qui persistent quant à eux, un espionnage sans vergogne ! Entre victimes désemparés face aux atrocités commises au nom du communisme et allemands vindicatifs, ce livre trace une route à travers cette Allemagne de l'Est, au sein de laquelle le mot «liberté» n'avait plus beaucoup de sens.. Matériels perfectionnés, attitudes, suspicions, pressions familiales, tout est passé au crible.
Un ouvrage passionnant, qui se dévore en quelques jours, qui nous en apprend beaucoup sur cette STASI omniprésente dans la petite République socialiste, et à mettre en parallèle de l'excellent film «La vie des Autres», de Florian Henckel von Donnersmarck.
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Pas tout à fait un roman, plus qu'un essai historique, Stasiland est avant tout le récit du régime froid, omnipotent et sans pitié de la RDA, incarné par la Stasi, au travers de témoignages époustouflants d'allemands qui ont subi, qui ont trahi, informé ou tout simplement travaillé pour le compte de cette police politique... La surveillance de toute una nation élevé au rang d'art suppurant de vices, de délations, le summum de l'organisation administrative froide, implacable où règne la plus attroce des paranoïas, bref c'est ébouriffant, ça glace l'échine... d'autant plus que finalement, cette horreur était encore en action il y a 20 ans...
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