Emile Gallé explique son art.
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La première de ces deux formes d’art cherche à plaire, à délecter par l’harmonie des contours, l’élégance des attitudes, et cela sans se préoccuper nécessairement d’une expression. Ces grâces, combien sensibles, de la ligne, de la chair et du muscle, cette cadence, ces enivrements du son, ce charme de la couleur, unis quelquefois à la plus raffinée délectation intellectuelle, tout ce ragoût délicat s’est proposé, imposé dès les temps anciens, et avec quel despotisme ! comme étant l’unique fin de toute beauté, de toute perfection, en dehors d’aucune manifestation morale. Ce bel art, que l’on a appelé l'art du beau, c’est un art de décor. Il n’y a pas lieu de l’exalter exclusivement ni de le dénigrer. Il a produit des œuvres admirables, notamment la presque totalité de la statuaire de la Renaissance, ce qui n’est point négligeable.
A côté d’une flore subalpine, je remarque le romarin dans les jardins des chalets, sur les bords du lac ; les paysannes endimanchées qui vont à la messe en portent un rameau à leur corsage ; les arômes mystiques et puissants qui se dégagent de cette plante servent à les tenir éveillées. Là-bas, plus poétique et plus gracieux, le romarin remplace le buis dans les églises ; il y laisse après lui une senteur toute particulière qui se mêle aux vapeurs de l’encens.
S’il y a au monde, dit Eugène Véron, une chose variable et sujette à contestation, ce sont les jugements portés sur les œuvres d’art... Le premier mouvement est de se mettre en révolte contre toutes les innovations qui troublent les habitudes et les systèmes; mais le moment vient bientôt où la discussion rétablit l’équilibre.
Ecole de Nancy. Film Emile Gallé.