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Critique de boudicca


Très populaire en France comme à l'étranger, Laurent Gaudé témoigne dans beaucoup de ses ouvrages d'un goût prononcé pour l'histoire (« Cris » relatait le combat des soldats de la guerre 14-18 ; « Pour seul cortège » était consacré au vol par Ptolémée Ier de la dépouille d'Alexandre le Grand...) Avec « La mort du roi Tsongor », l'auteur renoue avec l'Antiquité, bien que celle-ci soit ici fantasmée, et nous offre le récit tragique et ô combien épique de la chute de Massaba, cité belle et prospère gouvernée par le vieux roi Tsongor dont la mort va précipiter la ruine. En l'espace d'à peine deux cent pages, Laurent Gaudé parvient à totalement happer le lecteur qui assiste, désolé et impuissant, au drame qui secoue la dynastie Tsongor. Sous un prétexte qui se révèlera bien vite fallacieux, deux camps vont impitoyablement se déchirer, incapables de retrouver la raison (par orgueil ? par vengeance ?) et inconscients du fait qu'ils soient en train de détruire ce pour quoi même ils prétendaient se battre. Mais au-delà de l'héritage et du royaume du roi Tsongor, la tragédie touche avant tout l'ensemble des protagonistes : l'un parce qu'il voit avec horreur tout ce qu'il avait construit être réduis en cendres ; l'autre parce que la vengeance à laquelle il aspirait n'a pas la saveur attendue ; une autre encore parce qu'elle ne peut qu'assister, impuissante, à la dislocation de sa famille et de ceux qu'elle aime...

Bien que nous ayons ici affaire à un monde fantasmé et un conflit imaginaire, l'hommage au célèbre poète antique Homère et à son « Iliade » apparait vite comme évident. le siège de Massaba 'st ainsi pas sans rappeler celui de la ville de Troie par les Grecs menés par Agamemnon, de même que le sort de la belle Hélène, déchirée entre Ménélas et Pâris, n'est pas sans posséder quelques similitudes avec celui de Samilia, la fille du roi Tsongor elle aussi déchirée entre deux hommes mais qui montrera davantage de force et de courage que sa compagne d'infortune. Mais là où l'influence d'Homère se fait le plus sentir, c'est au niveau du souffle épique qui balaye tout le récit. Une chose est sûre, Laurent Gaudé a travaillé avec un soin tout particulier chaque scène d'affrontement, aboutissant ainsi à des moments de prouesses guerrières ou de bataille impressionnants. L'intérêt et la force du roman tiennent aussi à la psychologie travaillée des personnages : Katabolonga et sa position ambigüe au côté de ce roi autrefois haï et aujourd'hui aimé ; Souba, adolescent mu par sa piété filiale et qui porte sur ses épaules le poids de la tâche colossale qui lui a été confié ; et puis Tsongor, le plus ambivalent de tous, à la fois conquérant arrogant et sanguinaire mais aussi vieillard accablé par son passé et ravagé de ne pouvoir garantir la pérennité de son royaume et de sa dynastie.

« La mort du roi Tsongor » mérite bien sa renommée, de même que Laurent Gaudé qui nous fait don d'un récit aussi épique que tragique mettant en scène des personnages prisonniers de leurs passions. Un roman court qui se lit d'une traite mais qui laisse un souvenir vivace dans la mémoire longtemps après la dernière page tournée.
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