Citations sur La main de l'empereur, tome 1 (20)
-Je l'ai vu tomber. Il essayait de sauver un de ses soldats. Il est mort en héros.
-En héros, ouais, et quant il chiait, ça sentait la lavande. Il s'est fait trouer par un Koushite qu'il n'avait pas vu. S'il avait tenu la ligne avec ses hommes, ils se seraient pas morts pour rien.
-Soldat, je vous remercierai de garder vos commentaires et vos grossièretés pour vous !
-On est vaincu en moins de deux heures, y a des morts qui s'empilent partout, on va probablement crever dans les minutes qui viennent, et ça vous emmerde que j'utilise le mot « chier » ? Z-avez des priorités étranges, mon capitaine.
- Plutôt que la morsure d’un serpent qu’une lance koushite. S’ils ne nous tuent pas directement… Ils ont des tortures élaborées, vous savez.
- Je croyais que les serpents ne mordaient pas, ici, intervint Mandonius.
- Certains le font, mon capitaine. Certains le font. Et si personne n’aspire le venin, vous tombez raide mort. Raide.
- J’en ai entendu parler, observa calmement Adamas. Je vous préviens, ne vous faites pas mordre au sexe, parce que je ne vous aiderai pas.
Au début, Mandonius s'était battu. Il s'était toujours considéré comme une fine lame, certainement pas aussi habile qu'un soldat de métier, mais suffisamment pour se défendre contre des sauvages sans entraînement.
Depuis, il avait changé d'avis. Pour deux raisons.
La première, c'était que ces "sauvages" se débrouillaient mieux qu'il l'avait pensé. Ils compensaient leur manque de technique par leur force, leur souplesse- l'un d'eux avait bondi par-dessus sa lame !"- et leur agressivité. Un moribond l'avait même mordu à travers son pourpoint !
La seconde, et la plus importante, c'était que Mandonius se tenait à côté de Rekk.
- Je suis Unga'Ular, gronda Rekk en levant son épée. Votre foutu Danseur Rouge ! Alors venez danser avec moi !
Le capitaine se remit en position. Il avait réussi à protéger sa cape de soie sauvage des rigueurs de la traversée de la jungle et voilà que son ennemi l'avait éclaboussée de sang. Un peu comme s'il avait décidé de se venger au-delà de la mort.
Ce que Mandonius n'aimait pas, dans la guerre, c'était son côté salissant.
La guerre ne ressemblait pas aux chants des bardes. L'héroïsme, ça sentait la terreur, la pisse et la mort.
- Ce n'est pas en abattant tout le monde qu'on gagne leur loyauté sur le long terme, soupira Honorus.
Il fronça les sourcils. Quelque chose le dérangeait dans cette phrase. S'il voulait devenir un grand orateur, il devait pouvoir trouver le mot juste en toutes circonstances. Puis il oublia cette pensée pour se concentrer sur le plus pressé. Il avait toujours du mal à empêcher son esprit de vagabonder. C'était pour ça que tout le monde le considérait comme un peu simple d'esprit, alors qu'il avait juste besoin de plus de concentration que les autres.
- Sans moi, vous seriez déjà morts de faim ou de soif, râlait Lepidus devant eux.
- Ouais, eh ben, ça ne serait pas forcément un mal. Déesse du Destin, on est en train de marcher vers le Bord du Monde et on va finir par tomber, siffla Adamas. En plus, la dernière mare que tu nous as trouvée était croupie.
- Elle était très bien, cette eau. Tu as un estomac délicat, c’est tout.
- Mon estomac t’emmerde, Lepidus.
- En attendant, c’est pas moi qui ai la chiasse.
- Tu as un bon fond, Dareen. Je ne comprends pas pourquoi tu te livres à la contrebande.
La femme haussa les épaules en sortant de la tente.
- Tu as un bon fond, Rekk. Je ne comprends pas pourquoi tu tues des gens.
Il se pencha sur elle et, avant qu’elle ait pu réagir, l’embrassa rapidement sur la joue.
— Bonne nuit. Tu es une fille formidable, Dareen.
Elle le regarda partir, les mains crispées sur son arbalète. Lorsqu’il disparut enfin au détour d’une rue, elle leva la main pour effleurer sa joue, là où il l’avait embrassée.
— Oui, je suis une fille formidable. Et c’est Bishia que tu aimes, marmonna-t-elle. Moi, j’ai une arbalète. Elle, elle a un beau cul.