Réfléchir revient à désobéir.
Quand je faisais du sport, y avait un bon pote à moi, un flic aussi, qui m’disait souvent que les policiers, c’était des délinquants qui avaient bien tournés.
Quand on a peur, on imagine toujours le pire, jusqu'à en perdre toute rationalité.
Je commence à saturer de l’omniprésence de la violence dans ce quotidien. Ce qui m’étonne, outre les profils violents, c’est de constater à quel point ils se sentent intouchables. Comme s’il n’y avait aucun cadre, aucune surveillance de la hiérarchie. Comme si un policier pouvait choisir, selon son libre arbitre et son humeur du moment : être violent ou non.
Je rembobine le film de l’intervention. Il commence comme une intervention anodine. Un tapage en plein après-midi. Des gamins qui éteignent leur enceinte. Un flic énervé qui leur parle comme du poisson pourri (« vous commencez à nous faire chier »). Un gamin qui répond : « On n’a rien fait ». Le même flic qui tapote la joue du gosse et, par ce geste inutile et absolument hors procédure, l’humilie volontairement devant ses potes. Par orgueil, le gamin répond à la provocation physique par une provocation orale (« je te prends en un contre un »). Le flic met le premier coup, il n’en reçoit pas en retour, mais en distribue un nombre considérable, insulte le gosse, l’embarque en garde à vue et le frappe encore à de nombreuses reprises. Ça s’appelle une bavure. Et encore, une bavure sous-entend qu’il y a dérapage, or j’ai le sentiment d’avoir davantage assisté à une agression physique et gratuite.
Nous aurions pu confisquer l’enceinte et nous en aller. Ou ne rien dire et repartir. Ou même embarquer le gamin pour outrage (ce qui aurait déjà été contestable, étant donné que le premier outrage venait de chez nous). Mais il s’est fait tabasser.
"Les policiers sont des délinquants qui ont mal tourné."
«Qui t'envoie, sale journaliste de merde ?» Au volant de ma Clio blanche crasseuse à l'habitacje jonché d'emballages vides, j'imagine mon lynchage en cas d'outing professionel.
Dans quelle profession mal rémunérée un individu est-il prêt à payer de sa poche pour être muté ? [p. 110]
Les flics sont des délinquants qui ont bien tourné….
Il me reste deux jours à tirer. Mano me montre une vidéo de manif à Hongkong. Sur les images, des flics distribuent des coups de matraque, des coups de poing et traînent des manifestants au sol.
- Voilà ! Ça, c'est de la vraie police ! se réjouit mon collègue, devant un homme en sang, roulé en boule pour éviter de nouvelles raclées.