Citations sur L’incroyable histoire du homard qui sauva sa carapace (16)
- Tu ne m’avais jamais dit que tu avais une famille, dit le homard.
- Tu ne me l’avais jamais demandé, répondit Mancho. Et toi, tu en veux, des enfants ?
- Oui, répondit le homard. Peut-être.
- Combien ?
- Pas trop, vingt ou trente mille.
- Tu as raison, dit Mancho, au-delà, c’est trop de responsabilités.
- Tu vois toujours l’aquarium à moitié vide, dit Mancho. On n’est pas si mal ici. L’eau est bonne, on est bien nourris. Si ça se trouve, les gars ont raison ; la liberté est peut-être au bout de l’épuisette.
- La mort, dit le homard. L’épuisette, c’est la mort.
Alors que le petit navire avait quité le port, poussé par une brise tiède, un mouton était sorti, sans faire de bruit, d'un buisson d'hortensias. Il portait à sa patte un bracelet presque neuf, quoiqu'un peu poussiéreux. D'un pas lent, le mouton avait marché jusqu'à la terrasse du restaurant. Là, il avait renversé le pot de craies pour en attraper un bâton, qu'il avait coincé dans son museau. Puis, sans se presser, il avait écrit sur l'ardoise des plats du jour:
Ici on ne mange plus les animaux.
Deux jours passèrent, peut-être trois,
mais personne ne remarqua
qu'un homard vivait là.
La grand-mère n'avait rien vu.
Le père, rien compris.
Le chien, rien senti.
Le chat non plus.
Va-t-en Mancho. Va retrouver les autres et ne t'en fais pas pour moi
"Deux jours passèrent, peut-être trois,
Mais personne ne remarqua
Qu'un homard vivait là.
La grand-mère n'avait rien vu.
Le père, rien compris.
Le chien, rien senti.
Le chat non plus."
Soudain le homard dit :
-Rends-moi un service veux-tu ? Tire sur ma pince.
Jeanne tira sur la pince et un grand prout résonna dans la crique. […]
-ça va mieux dit-il. J’ai bien cru que j’allais éclater.
- Maintenant, réglons nos montres, dit le homard.
- J'en ai pas, répondit Jeanne en passant son index sur son poignet.
- Moi non plus, dit le homard en chuchotant comme si quelqu'un pouvait les entendre, on va faire semblant.
Ils firent tourner les roulettes de leurs montres imaginaires. Puis regardèrent leurs poignets et décidèrent qu'ils avaient tous les deux la même heure.
- Parfait, dit le homard. Plus rien ne peut nous arrêter. (pp. 82-83)
Avec leurs longues pattes et leurs carapaces sculptées, les araignées formaient l’aristocratie du vivier. Les plus gros crabes, les dormeurs, enviaient les traits fins des araignées. Les plus petits crabes, les étrilles, admiraient quant à eux leur grande taille. Les homards, par principe, n’admiraient ni ne craignaient personne. Ils appréciaient cependant la compagnie des araignées et acceptaient de partager avec ces dernières un peu du prestige naturel que leur conféraient leur élégante carapace et leurs pinces musclées, dont on disait qu’elles pouvaient fendre la pierre. Personne ne les avait jamais vu briser la moindre roche mais, vraie ou pas, la légende suffisait à donner aux homards une autorité naturelle que personne ne contestait.
A la mairie, elle retrouva son père, qui y passait ses matinées. "Maire le matin, vétérinaire l'après-midi, vétérimaire le reste du temps", c'est ce qu'il avait dit à Jeanne de répondre quand on lui demandait le métier de son papa. (p. 81)