Cosimo ignorait ce que nous savions : les plantes qui ont poussé en sécurité dans des pots, entourées de longues racines, ne s'adaptent pas à la terre. Seules celles qui ont des racines libres, extirpées tôt en hiver, tiennent bon, comme nous.
Au cours de ce mois d'août, Bern examine le moindre repli de mon corps, d'abord avec ses doigts, puis avec sa langue. À certains moments, j’étais tellement gênée et épuisée par l'excitation que je ne savais plus où se trouvaient sa tête, sa bouche, ses mains. La première fois, j'empoignais son sexe et le guidai entre mes jambes car il semblait paralysé de peur. Je n'étais jamais sortie avec un garçon, et en un seul été il me prit tout ce qu'il y avait à prendre.
Je crois que j'ai pleuré un moment, sans bouger. Mais je n'ai pas versé de larmes : cet effondrement s'est produit en secret au fond de moi.
"Quand ils quittaient le salon ivres morts je rangeais tout : le tapis vert replié dans le tiroir les jetons dans la boite. Je vidais les cendriers et rangeais les verres. Avant de regagner le dortoir, je faisais une promenade jusqu'au vignoble . Seuls les animaux sauvages étaient réveillés à cette heure là ."
On fouillait dans ma chambre, je voyais un homme passer d'un côté à l'autre derrière la fenêtre. Mais il n'y trouverait que de la nostalgie
Mais nous étions jeunes, soudés et extraordinairement énergiques, aussi n'était-il pas rare qu'on nous verse un pourboire à la fin de la journée.
Ils utiliseraient du DDT s'ils en trouvaient au supermarché. Ils répandent leurs saletés chimiques partout. Et ils ne savent même pas ce qu'elles contiennent.
L'appartement entier était parsemé de pièges émotifs :du miel pour attirer les mouches, du vinaigre pour les tuer .
Ils n'interceptaient pas l'exaltation des années où nous avions vécu là à six, dans une glorieuse confusion, ni l'intensité des sentiments que nous éprouvions l'un pour l'autre, du moins au début.
Car c'est ce qui arrivait entre Bern et moi au cours de ces années là : nous utilisions de moins en moins la parole, mais nous étions encore capables de reconnaître ensemble le visible et d'inventer également, d'un accord tacite, l'invisible.